Vers un C à 30 euros en décembre : après être « allée au bout », la Cnam veut croire à la signature des médecins

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Publié le 17/05/2024
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Au terme d’une ultime séance de cinq heures, la Cnam a finalisé son projet conventionnel, soumis aux syndicats. Le directeur général, Thomas Fatôme, a amélioré des points bloquants comme le calendrier d’application des revalorisations. Le C à 30 euros et l’APC à 60 euros s’appliqueront dès décembre 2024 si l’accord est validé. Suffisant ?

Crédit photo : Sylvain Cricq Sarrailh

Après un marathon de 14 heures jeudi 16 mai, les partenaires conventionnels avaient repris leurs travaux vendredi à midi pour une séance présentée comme cruciale. Le DG de la Cnam Thomas Fatôme avait promis la veille de présenter une copie amendée et finalisée. Ce fut chose faite.

Et au terme d’une ultime multilatérale de cinq heures ce vendredi, il a pu annoncer à la presse en fin de journée être arrivé « au bout de six mois de débats intenses, actifs et riches » avec, entre les mains, un « projet conventionnel équilibré », « conforme à son mandat ».

Thomas Fatôme a confirmé le montant de l’enveloppe globale accordé au projet conventionnel sur 2024-2028, soit 1,6 milliard d’euros « pour ce qui relève de l’Assurance-maladie » et un montant global (incluant les complémentaires santé) de 1,9 milliard d’euros, comme évalué hier dans nos colonnes.

Le texte conventionnel sera remis aux syndicats « en tout début de semaine prochaine ». Ces derniers auront une semaine pour consulter leurs ouailles avant de se prononcer la semaine du 27 mai. « J’ai la conviction que ce projet de convention va permettre d’améliorer dans le même temps le fonctionnement de notre système de santé, l’accès aux soins et l’attractivité de la médecine libérale », a salué le DG de la Cnam.

Du mieux sur le calendrier

Le chemin a été jalonné d’obstacles. Pendant les dernières 48 heures de ce marathon, trois points majeurs d’achoppement ont été identifiés par les syndicats.

La grogne a d’abord porté, comme prévu, sur le calendrier d’application des revalorisations tarifaires présenté dans la nuit de jeudi à vendredi à une tablée de médecins épuisés par une journée de négociations. La Cnam avait soumis deux scenarii aux médecins libéraux : le premier prévoyant un étalement à 28 euros pour les généralistes en décembre 2024 et de 30 euros… en juillet 2025 seulement; le deuxième fixant un C à 30 euros mi-mars (idem pour l’APC à 60 euros). Tollé syndical.

Devant le mécontentement des syndicats (« on a ri jaune » confiait un leader), Thomas Fatôme a changé son fusil d’épaule, en actant une hausse des deux tarifs emblématiques (C à 30 euros et APC à 60 euros) dès décembre 2024. Ce « bougé » stratégique du patron de la Cnam a permis à la caisse de marquer des points.

Autre avancée jugée intéressante par les syndicats : la valorisation des actes techniques (CCAM). Le DG a accepté la hausse du point travail de 0,44 à 0,47 euros, en plus de l’enveloppe déjà sanctuarisée pour la CCAM, un point salué par le Dr Bruno Perrouty, président de la branche spécialistes de la CSMF.

Dernier point dur en suspens : les modalités de cotation de l’avis ponctuel consultant (APC à 60 euros). Lors de la séance, MG France a clairement refusé l’ouverture de cette cotation d’expertise par un spécialiste à la demande d’un autre médecin spécialiste, sans passer par le médecin traitant. « La négociation n’est pas totalement finie sur ce point. On attend les derniers arbitrages sur l’APC », a avertit la Dr Agnès Giannotti, présidente de MG France, qui a fait de cet enjeu une ligne rouge. Pas question de déroger aux règles du parcours de soins pour le syndicat de généralistes, dont le paraphe est indispensable pour un accord majoritaire. La même réserve est partagée par le patron des Généralistes-CSMF. « C’est une ligne rouge aussi pour nous », a prévenu le Dr Luc Duquesnel. « Revenons à l’écriture de la convention de 2016 qui fonctionne, respectueuse du parcours de soins. Je ne suis pas favorable au généraliste gate-keeper ni au bon de sortie mais je comprends les généralistes qui craignent le compérage entre les spécialistes », a analyse son président le Dr Franck Devulder.

Devant la presse, en fin de journée vendredi, Thomas Fatôme a reconnu que cette question n’avait pas totalement abouti. « J’ai bon espoir d’arriver à un équilibre », a-t-il éludé.

Espoir de signature

La séquence de 48h semble avoir rapproché les parties d’un compromis majoritaire.

Thomas Fatôme a clairement montré des signes d’espoir, vantant la méthode de négociations de la Cnam, fondée sur davantage de transparence et d’écoute. « Ca a été difficile, tendu, compliqué, mais ça a fonctionné. On souhaite maintenant que ce texte soit signé », a-t-il confié.

Pour l’heure, aucun syndicat ne s’est prononcé. Chacun va retourner devant ses instances dans les jours qui viennent. « Je ne ferai pas de déclaration si ce n’est que nous soumettrons le texte à nos adhérents », a avancé le Dr Patrick Gasser (Avenir Spé), qui garde en tête son alliance avec la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP) et la grève du 3 juin.

Même son de cloche du côté du SML. « Il y a nettement des avancées avec ce texte », a admis la Dr Sophie Bauer, qui soutient néanmoins le mouvement de grève au sein des cliniques. La FMF voyait aussi le verre à moitié plein. « La Cnam est allée jusqu’au bout de ce qu’elle a pu faire, lâche la Dr Patricia Lefébure, présidente. Nos adhérents se positionneront. »


Source : lequotidiendumedecin.fr