C’est dans un contexte sanitaire inédit que 110 cadres de la CSMF se sont retrouvés ce vendredi sous le soleil d’Antibes, pour la 26e Université d’été du syndicat, placée sous le signe du renouveau.
Malgré les visages masqués et des règles de sécurité strictes (signature par chaque participant d’un engagement à respecter les gestes barrières, prise de température quotidienne, respect de la distanciation), l’ambiance était bon enfant pour l'ouverture de ce congrès, qui est à la fois la vitrine confédérale et un moment de brainstorming stratégique alors que les élections professionnelles se profilent l'an prochain.
Souder les troupes
Fil rouge du congrès, la question de la rénovation du syndicalisme, miroir de la mutation de la profession, ne laisse aucun cadre indifférent.
Installé depuis 2004, le Dr Patrick Czerwinski, président de la CSMF du Havre, ne cache pas ses attentes. « Je veux que les présidents au niveau national montrent la voie et me guident dans cette rénovation. Il faut plus de femmes, plus de jeunes et surtout l’unité syndicale », lâche le généraliste, qui n’a pas oublié les turbulences internes provoquées par le départ de plusieurs leaders spécialistes cette année et la création d’Avenir Spé par le Dr Patrick Gasser. « J’ai été au départ choqué mais j’ai compris ensuite pourquoi je ne parvenais pas en interne à travailler avec certains spécialistes. Ceux-là, ils considéraient que les généralistes étaient encore une sous-spécialité. Mais depuis leur départ, généralistes et spécialistes travaillent mieux ensemble ».
Combat et construction
Un peu plus loin, le Dr Sylvaine Le Liboux, 57 ans, généraliste à Valençay (Indre) et secrétaire générale des Généralistes-CSMF, engage une conversation animée avec d'autres confrères. « J’attends un discours combatif et constructif. On est un syndicat qui veut améliorer le système de soins français et cela passe par la médecine libérale ! Cela fait vingt ans qu’on a un système hospitalocentré ! Avec la Covid, j’espère qu’on a enfin compris que les libéraux ont toute leur place dans la santé publique pour s’occuper des urgences, des patients chroniques ».
Ancien vice-président de la CSMF, le Dr Yves Decalf est un fidèle des Universités. Il reconnaît que la maison confédérale « a connu plusieurs scissions ». « Les médecins sont des libéraux individualistes, il faut retrouver un sens collectif. J'ai toujours été favorable à une alliance spécialistes et généralistes. Le projet confédéral permettra de rénover le syndicat et trouver une unité forte », dit-il.
Face aux cadres, c'est précisément le message porté par le président de la CSMF Jean-Paul Ortiz, qui a prôné l'unité et l'engagement dans son discours d'ouverture. « Construire l'avenir de la santé des Français, construire la médecine de demain, c'est la construire tous ensemble et non en s'isolant », martèle le néphrologue de Cabestany. Cette cohésion sera indispensable pour rénover la centrale mais aussi dans les prochaines négos conventionnelles.
Cabinet 3.0
À quelques mois des élections professionnelles aux URPS, le premier syndicat représentatif des médecins libéraux sait qu'il joue gros. Il doit être une force de proposition pour accompagner les médecins dans la mutation profonde de l’exercice, réclamée notamment par les jeunes, tout en défendant les piliers de la médecine libérale.
En 2030, fini l'exercice en solo, les praticiens exerceront dans un cabinet de groupe « où l’esprit doit être celui de l’entreprise libérale », explique le Dr Ortiz. Dans dix ans, le cabinet doit « devenir une véritable entreprise qui se transmet et qui développe des relations avec de multiples acteurs. Il doit se construire autour de la coordination ».
Alors que les négociations avec la CNAM se profilent, la CSMF a des idées pour valoriser cette coordination mais aussi certaines pratiques. Cela concerne par exemple la télé-expertise, « tellement ridiculement valorisée que peu utilisée » et le dossier médical personnel. « Le volet de synthèse médicale doit être considéré comme un véritable acte médical, long, complexe et donc à rémunérer en tant que tel ».
Consultation : 4 niveaux et c'est tout !
Côté tarifs, la Conf' appelle la CNAM à changer de logiciel en allégeant « les modalités de tarification de l’acte médical devenues tellement complexes que beaucoup de médecins ne savent plus utiliser la nomenclature ». Le syndicat prône carrément la suppression de « toutes ces lettres qui viennent compléter des lettres de base que sont le C ou le CS ». « Il faut coter la consultation exclusivement en 4 niveaux, avec des valeurs simples et évolutives, qui doivent recouper l’ensemble des situations cliniques », suggère le patron de la CSMF.
Pour l’heure, la lettre de cadrage des négos envoyée par Olivier Véran au nouveau DG de la CNAM, Thomas Fatome, laisse le syndicat sur sa faim. « Cette lettre de cadrage ne nous convient pas. Il faut aller au-delà », lance, remonté, le Dr Luc Duquesnel. Pour le président des généralistes de la CSMF, le périmètre reste trop restreint. « Il n’y a rien sur la valorisation de la coordination généralistes/spécialistes ou celle de la consultation. La prochaine convention s’appliquera en 2023. Les médecins ne peuvent pas continuer à réaliser des consultations complexes de 45 minutes à 25 euros », dit-il.
De son côté, le président de la branche spés, le Dr Franck Devulder, est sur la même longueur d'ondes. « La rémunération des spécialistes français est bien en dessous de celle de leurs collègues de l'Europe de l'ouest. Nous voulons une revalorisation de nos activités de consultation ». Des revendications que les cadres de la CSMF comptent bien relayer auprès du ministre de la Santé qui interviendra demain samedi (à distance) devant les congressistes !
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