Présent à la 28e édition de l'Université d'été de la CSMF, le directeur général de la Cnam Thomas Fatôme a donné de nouvelles précisions sur le cadre des discussions de la prochaine convention médicale, censées s'ouvrir fin octobre - ou plus vraisemblablement en novembre. Précédant, vendredi, le ministre de la Santé, François Braun, venu spécialement passer la soirée à Antibes, le patron de l'Assurance-maladie s'est employé à répondre aux demandes des cadres de la Conf', qui veulent « se donner les moyens d’une convention dont ils seront fiers ».
L'une de leurs inquiétudes concerne actuellement les consultations de prévention, toute juste annoncés par le ministre de la Santé et que les médecins souhaitent effectuer. « Un travail va s'engager avec le ministre pour définir qui fait quoi, et comment. L'acteur de ces bilans de prévention sera sans doute le médecin traitant, mais pas tout seul », a indiqué Thomas Fatôme, ouvrant la porte à une collaboration avec les infirmiers Asalée ou en pratique avancée (IPA) sans les nommer. Une piste confirmée par Marguerite Cazeneuve, sa numéro 2 lors d'une table ronde samedi matin.
Hiérarchisation des consultations
S'agissant des revalorisations tarifaires attendues, la CSMF proposera lors des négociations une hiérarchisation des consultations sur quatre niveaux, gradués, afin de soutenir les spécialités cliniques en bas de l'échelle de rémunération – un classement sur lequel la branche spécialiste du syndicat planche depuis des mois. Si Thomas Fatôme s'y est montré plutôt favorable, « un tel système ne fonctionnera pas sans mécanisme de régulation et de contrôle », a-t-il toutefois tempéré.
De même sur le rattrapage du coût de la pratique, bloqué depuis 2005 comme l'a rappelé le Dr Franck Devulder, une passerelle devra être trouvée entre les travaux du haut conseil de la nomenclature et la négociation conventionnelle, a déclaré Thomas Fatôme, conscient des demandes qui seront faites sur le volet tarifaire par les syndicats de libéraux, « dans le contexte particulier de l’inflation ». La directrice déléguée à la gestion et à l’organisation des soins, Marguerite Cazeneuve, a souligné que le long travail sur la nomenclature ne devrait pas s'achever avant 2024.
Ne pas « emmerder » les CPTS
L'autre gros morceau de la négociation concernera à n'en pas douter les soins non programmés. Cet été, les médecins ont pu coter la majoration de 15 euros pour les patients reçus régulés par le service d'accès aux soins (SAS) ou le centre 15. Celle-ci n'a été utilisée que par 4 % des généralistes libéraux, a reconnu François Braun, qui s'est néanmoins déclaré ouvert à la pérennisation de cette majoration comme la CSMF le demande.
« Nous avons inventé des organisations territoriales spécifiques bien avant les CPTS, or certains médecins qui évitent les engorgements du centre 15 ne peuvent pas coter le SNP car ils ne sont pas dans une CPTS, a rapporté la Dr Sylvaine Le Liboux, secrétaire générale des Généralistes-CSMF. À l’inverse, certaines CPTS ne peuvent pas avoir une partie de leur financement si elles n'ont pas de projet SAS assez mature. C’est irréaliste (...) et cela freine la dynamique. » L'élargissement de la majoration d'urgence pour les spécialistes (MCU) est également une requête du syndicat.
Il faut d’abord mettre « l'énergie et le financement » sur la construction des équipes autour des médecins traitants, a cadré d'emblée Thomas Fatôme, qui craint un développement des centres de soins non programmés en créant des incitations tarifaires non maîtrisées. « Mon rêve est que si le patient appelle, il aura toujours une réponse. C’est là où la régulation c’est clé, a souligné le patron de la Cnam. Notre objectif n’est pas d'emmerder les CPTS qui se construisent. Mais il faut une articulation avec un SAS ou une régulation. C’est une condition que nous n’avons pas envie de lâcher, sinon cela va être le bazar. »
« Tout est ouvert » sur les assistants
Le travail en équipe avec les IPA et les assistants médicaux devrait également être au menu des discussions. Mais les attentes sont grandes sur les assistants médicaux et les IPA, dont le modèle économique en libéral n'est pas viable pour le moment, a rappelé le Dr Luc Duquesnel, président de la branche généraliste de la CSMF. Pour autant si elles étaient « en accès libre », cela « serait de la défiance ».
Sur le « zonage, le niveau de l’aide, la durée », « tout est ouvert », a redit Thomas Fatôme. « On sait aussi qu’il y a des sujets qui ne sont pas de notre responsabilité sur les locaux, la formation, et il y a aussi la peur de l’embauche, a-t-il expliqué. Nous ferons des propositions dans des logiques clés en main, pour diminuer la crainte de l’embauche, aussi pour les spécialités. Il ne s’agit pas de travailler plus, mais dans d'autres conditions. » Si la lettre de cadrage des négociations par le ministre de la Santé ne lui pas encore parvenue, Thomas Fatôme aura une idée un peu plus précise de ses marges de manœuvres financières, lundi avec la présentation du projet de loi de financement de la Sécurité sociale.
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