Des réquisitions qui crispent les libéraux

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Publié le 27/01/2023
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L'année 2022 aura été jalonnée de réquisitions, autant de points de crispation pour la médecine libérale. En juin, alors que les hôpitaux débordent — et que la FMF s'inquiète « d’un été des réquisitions » — dans le Haut-Rhin, les Côtes-d’Armor ou l'Eure, des libéraux sont convoqués par la préfecture pour assurer la PDS-A. Parfois du jour au lendemain, comme à Mulhouse où un généraliste reçoit un coup de téléphone du commissariat à 22 h, lui demandant de se présenter à la régulation le lendemain matin.

Lors de la trêve des confiseurs, alors que la colère gronde en médecine de ville, six généralistes grévistes de Casteljaloux dans le Lot-et-Garonne sont réquisitionnés par la préfecture. Dans le Val-de-Marne, le 25 et le 31 décembre, ce sont une douzaine de libéraux qui sont assignés pour assurer la PDS au Samu 94 et dans des services d'accueil médical initial. Les arrêtés préfectoraux n'épargnent pas les spécialistes, comme en Haute-Saône, où six anesthésistes libéraux sont réquisitionnés en janvier — parfois pendant 24 h — pour assurer la prise en charge de patients aux blocs de l'hôpital de Vesoul.

Parfois, la manière forte conduit à la crise. À Noël, sept généralistes de la maison médicale de garde installée au CH de Chartres sont réquisitionnés par la préfecture. La goutte d'eau pour ces praticiens, qui subissent depuis des années une insécurité croissante et ont exercé leur droit de retrait. 

« En Charente, c'est tous les soirs ! »

Faute de volontaires, les réquisitions sont parfois devenues chroniques. « En Charente, nous sommes réquisitionnés tous les soirs ! », raconte le Dr Alain Thiburce, président d'honneur de l'association départementale de la PDS. Un petit jeu entre l’agence régionale de santé, la préfecture et les 200 libéraux charentais qui dure depuis six ans. « Beaucoup de secteurs ne remplissent plus leur tableau de garde le soir — et il y a de moins en moins de régulateurs — alors on reçoit des mails de réquisitions…, résume le généraliste de Cognac. À terme, nous aurons tous plus de 65 ans, on ne pourra plus nous réquisitionner ».

Même exaspération en Dordogne, que le président de l’Ordre local qualifie de « département le plus réquisitionné de France ». « Le soir, le week-end, les réquisitions tombent tous les deux ou trois jours sur la tête des médecins, qui sont parfois malades, doivent faire garder leurs enfants, le tout alors que les services d’urgences ferment ! », déplore le Dr Bruno Hammel, qui dénonce une pratique « odieuse ». « La profession, témoigne-t-il, est épuisée par le Covid et se voit martyrisée par les ARS et la préfecture, on est au bout de l’entonnoir. »

 

Léa Galanopoulo

Source : Le Quotidien du médecin