Dr Agnès Giannotti, généraliste : « Même si je perds de l'argent, je suis déterminée à fermer tous les samedis matin »

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Publié le 17/12/2019

Crédit photo : S. Toubon

Vice-présidente de MG France, le Dr Agnès Giannotti, installée dans le quartier populaire de la Goutte-d'Or (Paris, 18e), a suivi le mot d'ordre de son syndicat et donc fermé son cabinet samedi matin 14 décembre dans le cadre de l'opération « Samedis noirs de la médecine générale ». Elle explique le sens de cette action forte de protestation.

LE QUOTIDIEN : Pourquoi avez-vous fait grève samedi 14 décembre au matin ?

Dr AGNÈS GIANNOTTI : Cela fait plus d'un an que MG France a demandé à l'État d'élargir les horaires de permanence des soins au samedi matin. Il continue à faire la sourde oreille. Pourtant, cette mesure est un des leviers pour améliorer nos conditions de travail et rendre la médecine générale plus attractive pour les jeunes.

Le samedi matin correspond à la 50e heure d'ouverture des cabinets médicaux ! À l'hôpital ou en centre de santé, les jeunes médecins obtiennent des contrats de travail de 35 heures. Il ne faut pas s'étonner qu'ils ne choisissent pas le libéral. En intégrant les samedis matin aux horaires officiels de permanence des soins, les médecins pourront s'organiser au niveau de chaque territoire pour prendre les tours de garde et avoir des week-ends en famille.

Cette grève est aussi liée au futur service d'accès aux soins (SAS) pour réguler les urgences qui, selon MG France, oublie de donner des moyens à la médecine libérale...

Oui absolument. Agnès Buzyn dit qu'elle compte s'appuyer sur les médecins généralistes dans le cadre du futur service d'accès aux soins afin de soulager les urgences hospitalières. Pour assurer cette nouvelle responsabilité, les généralistes vont devoir s'organiser dans chaque territoire pour libérer des créneaux afin de répondre au téléphone et de donner des rendez-vous aux patients. Mais on nous demande de couvrir les besoins du territoire sans nous donner de moyens supplémentaires ! Il faut arrêter de se moquer de nous...

Votre action des « samedis noirs » ne risque-t-elle pas de saturer davantage les urgences ?

L'objectif n'est pas de saturer les urgences. Mais aujourd'hui, si on veut être entendu, il faut aussi qu'on dérange. En tout cas, moi, j'ai toujours expliqué à mes patients, qui sont des habitués, des familles suivies depuis 30 ans, qu'il y a la maison médicale de garde du secteur qui ouvre dès 14 heures. Ils l'ont bien compris.

Comment vos patients ont-ils été informés ?

Je suis installée dans ce quartier depuis 30 ans. Tous les samedis matin, j'assure environ une quinzaine de consultations entre 10 heures et 14 heures. Depuis une semaine, j'ai informé mes patients avec une affichette dans la salle d'attente. Ceux qui n'étaient pas au courant se sont retrouvés ce samedi matin devant une porte close où j'ai aussi collé une affichette. Mais ils se sont montrés très compréhensifs. Certains sont revenus dans la semaine et disent ne pas m'en vouloir.

Allez-vous refermer votre cabinet samedi prochain ?

Même si je perds de l'argent, je suis déterminée à fermer tous les samedis matin, tant que le gouvernement restera sourd à notre revendication. Je vais aussi informer les confrères du secteur de notre action. Ici, beaucoup de médecins isolés ont déjà fermé leur cabinet les samedis matin car ils n'en peuvent plus. Ceux-là seront peut-être contents de savoir qu'il y a une action pour mettre en place un tour de garde les samedis matin. Cela permettra à leurs patients d'être pris en charge. 

Propos recueillis par Loan Tranthimy

Source : lequotidiendumedecin.fr