Pertinence des actes, disparités des pratiques, gardes obligatoires

La FHF place le gouvernement devant ses responsabilités

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Publié le 06/09/2018
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Crédit photo : SEBASTIEN TOUBON

Rentrée très politique pour la Fédération hospitalière de France (FHF). À l'heure où le gouvernement met la dernière main à sa stratégie de transformation du système de santé, attendue d'ici à la fin du mois, Frédéric Valletoux a décrit par le menu les priorités de l'hôpital public avant sa rencontre avec Agnès Buzyn, prévue le 12 septembre. 

En 2018, le gouvernement avait demandé à l'hôpital public un effort d’économies de 1,6 milliard d’euros dans le budget de la Sécu (PLFSS). Qu'en sera-t-il dans le prochain, en cours d'arbitrage ? Pour dégager des marges financières à l'hôpital tout en transformant un système de santé jugé « à bout de souffle », le président de la FHF veut « s'attaquer réellement à la pertinence des soins, quitte à bousculer certaines pratiques » médicales, en établissement mais aussi en ville. 

Le gisement est considérable : la FHF estime que « 40 à 60 milliards d'euros d'économies » pourraient être générées grâce à un travail méthodique sur la pertinence des actes – dont 20 à 30 % seraient inutiles. « C'est un sujet d'économies majeur qu'on pourrait ensuite réinjecter sur l'attractivité des carrières médicales […] et l'investissement hospitalier », assure Frédéric Valletoux.

Pour illustrer son propos, la FHF a analysé la disparité des pratiques sur trois actes médicaux et chirurgicaux réalisés en 2017 dans les hôpitaux et les cliniques. Résultat : le taux de recours de la chirurgie du canal carpien varie d'un département à l'autre de 1,1 à 3,6 pour 1000 habitants ; de 3,6 à 9,9 pour la coronarographie suivie ou non d'angioplastie ; et de 1,6 à 4,3 pour l'arthroscopie du genou. 

Des généralistes qui bossent « comme des fous »

Frédéric Valletoux ne l'ignore pas : en défendant la « nécessité de participer aux tours de garde » pour les généralistes libéraux, afin de désengorger les urgences, la FHF risque de subir les « foudres » d'une partie des syndicats de médecins de ville. Le patron de la FHF sait aussi que le retour éventuel des gardes obligatoires ne « résout que la moitié des problèmes » de dysfonctionnement du système de santé. « J'ai bien conscience que les médecins généralistes bossent comme des fous et ne sont pas assez nombreux là où on a besoin d'eux », a-t-il tempéré.

Pour mieux répartir les praticiens, la FHF recommande l'interdiction d'installation en secteur II dans les territoires surdenses (tout en maintenant la liberté d'installation en secteur I). La FHF a croisé deux données pour apporter de l'eau à son moulin : 64,6 % des départements voient simultanément leur nombre de passages aux urgences augmenter et leur nombre de médecins généralistes baisser. « La régulation à l'installation est un marqueur politique, cela montre que l'État reprend le contrôle », a commenté Frédéric Valletoux, envoyant un message direct à Agnès Buzyn.

La FHF s'attelle aussi à la réforme territoriale. Annoncée lors de la Paris healthcare week, l'expérimentation sur cinq territoires (Deux-Sèvres, Cornouaille, Douaisis, Haute-Saône et Aube) de la « responsabilité populationnelle » est l'une des réponses du lobby hospitalier pour mieux prendre en charge les besoins de santé. Lancée dans le cadre de l'article 51 de la loi Sécu 2018 (sur l'innovation organisationnelle), cette initiative promeut une approche horizontale des soins où libéraux, hospitaliers, services publics et associations travaillent ensemble sur un territoire et une population donnés. La FHF choisira le 15 septembre deux patientèles cibles (parmi les patients diabétiques, insuffisants cardiaques ou souffrant de BPCO) afin de lancer sa démonstration grandeur nature en janvier 2019.

 

 

 

Anne Bayle-Iniguez EXERGUE :   « La régulation à l'installation est un marqueur politique, cela montre que l'État reprend le contrôle » Frédéric Valletoux, président de la FHF

Source : Le Quotidien du médecin: 9683