IL AURA FALLU 25 jours aux sénateurs pour venir à bout du projet de loi Hôpital, patients, santé et territoires. Dans la nuit du 5 au 6 juin, ils ont finalement adopté le texte par 177 voix contre 153. En voici les principaux points.
Réforme de l’hôpital
• La gouvernance de l’hôpital public est de nouveau toilettée. Conseils de surveillance, directoires, communautés hospitalières de territoire… l’architecture votée par les sénateur est inchangée mais sous la façade, les lignes ont bougé. En outre, les CHU sont désormais concernés par la réforme.
Désormais, le président de la commission médicale d'établissement (CME), vice-président du directoire, élabore, en conformité avec le contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens, le projet médical de l'établissement. Il coordonne avec le directeur la politique médicale de l'établissement. Le directoire, à majorité médicale, approuve le projet médical et prépare le projet d'établissement.
Le directeur nomme les médecins au directoire sur présentation d'une liste de propositions établie par le président de la CME. S’il y a désaccord, le directeur peut demander une nouvelle liste ; en cas de nouveau désaccord, il nomme les membres de son choix. Même chose pour les chefs de pôle. Schéma identique également pour les contrats de pôle (le président de la CME donne son avis, le directeur de l’hôpital tranche).
• Les services sont de retour.Avec les unités fonctionnelles, ils sont nommément réapparus dans le texte.
• Les nouveaux contrats médicaux à l’hôpital, basés sur des objectifs qualitatifs et quantitatifs, soumis à rémunération variable ont reçu l’aval des sénateurs qui appellent ces médecins des « cliniciens hospitaliers ».
Par ailleurs, un directeur d’hôpital peut, sur proposition du chef de pôle, après avis du président de la CME, admettre des médecins, sages-femmes et odontologistes exerçant à titre libéral à participer aux soins dans ses murs. À l’inverse, la loi interdit pendant deux ans aux médecins hospitaliers démissionnaires de concurrencer via un exercice libéral l’établissement qu’ils ont quitté.
• Les médecins des cliniques ont davantage voix au chapitre.Quand une clinique exerce des missions de service public, ses médecins doivent les mettre en uvre mais s’ils ne le font pas, la clinique ne peut plus rompre de manière unilatérale le contrat d’exercice du médecin. Par ailleurs, désormais, dans les cliniques, la CME participe à l'élaboration de tous les contrats qui ont une incidence sur la pratique médicale de l'établissement.
Médecine libérale
• Le contrat de santé solidarité a été réintroduit. Si d’ici trois ans les mesures incitatives à l’installation n’ont pas porté leurs fruits, les praticiens des zones surdenses devront prêter main-forte à leurs confrères des zones déficitaires en offre de soins ou à défaut s’acquitter d’une taxe annuelle d’un montant proche de 3 000 euros.
• Une répartition quinquennale des postes d’internat est prévue, sur proposition de l’Observatoire national de la démographie des professions de santé (ONDPS).
• Un contrat d’engagement de service public est mis en place à destination des étudiants et internes. Ces derniers pourront bénéficier d’une bourse mensuelle versée par le centre national de gestion (CNG) jusqu’à la fin de leurs études médicales s’ils s’engagent en contrepartie à exercer à la fin de leur formation dans une zone sous dotée. La durée de leur engagement est égale à celle pendant laquelle l’allocation leur a été versée et ne peut être inférieure à deux ans.
• Le développement professionnel continu (DPC) est entériné. Ce concept fait fusionner la formation médicale continue (FMC) et l’évaluation des pratiques professionnelles (EPP). Le DPC sera obligatoire. Un décret en conseil d’État devra préciser les modalités de sa mise en place.
• La médecine générale est inscrite au Code de la santé publique et les soins de premier recours sont définis dans la loi. À partir de la rentrée universitaire 2009-2010 et pendant quatre ans, la loi prévoit la création de 20 postes de professeurs des universités, 30 postes pour les maîtres de conférence et 50 postes de chefs de clinique pour la discipline de médecine générale.
• Les sénateurs ont modifié le parcours de soins en autorisant les patients à
se rendre en accès direct sans restriction chez l'ophtalmologiste, le
psychiatre ou le gynécologue.
• Le testing dans les cabinets professionnels n’est pas reconnu comme mode de preuve dans les refus de soins. L’IGAS pourra effectuer des contrôles dans les cabinets médicaux.
• Lorsqu’un médecin « se dégage de sa mission de soins pour des raisons professionnelles ou personnelles », il doit indiquer à ses patients le confrère auquel ils pourront s’adresser en son absence. Le praticien doit également informer le conseil départemental de l’ordre de ses absences programmées selon les modalités définies par décret.
• La réforme de la biologie médicale par ordonnance est confirmée.
• L’expérimentation du dossier médical personnel sur clé USB est prévue avant le 31 décembre 2010.
• La permanence des soins est confiée aux agences régionales de santé (ARS).
• Les assurés ou ayants droit de 16 à 25 ans pourront bénéficier chaque année d’une consultation de prévention, réalisée par un médecin généraliste, pour laquelle ils sont dispensés de l’avance des frais.
• La refonte des ordres professionnels s’accompagne d’un changement de périodicité des mandats (renouvellement par moitié tous les 3 ans) et de la création d’un statut de l’élu ordinal.
Prévention et santé publique
• L’éducation thérapeutique, précisent les sénateurs, s’inscrit dans le parcours de soins du patient. Elle a pour objectif de le rendre plus autonome en facilitant son adhésion aux traitements prescrits et en améliorant sa qualité de vie. Elle ne peut conditionner le remboursement des actes et des médicaments afférents à la maladie. Les programmes d’éducation thérapeutique sont proposés au malade par le médecin prescripteur et donnent lieu à un programme personnalisé. Tout contact entre le malade, son entourage avec une entreprise pharmaceutique, de matériel médical est interdit. Un rapport sera présenté au Parlement avant le 31 décembre 2010 sur la mise en uvre des programmes d’éducation thérapeutique, leur financement et sur la création éventuelle d’un fonds national
• Les sénateurs ont prévu que les infirmières et les pharmaciens pourraient renouveller, pour une durée maximale de six mois non reconductible, les prescriptions, datant de moins d’un an, des contraceptifs oraux. Ces spécialités seront remboursées.
• Revenant sur une disposition votée par les députés, les sénateurs ont autorisé la vente de boissons alcoolisées dans les boutiques des autoroutes et dans les lieux de restauration de ces autoroutes. En revanche, aucune vente n’étast autorisée sur les aires de repos et service.
L’interdiction de vente aux moins de 18 ans est également maintenue.
• Enfin, le Sénat s’est déclaré favorable à la fusion, au sein d’un nouvel établissement public, de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments et de l’Agence de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail. Le gouvernement pourra procéder à cette réforme par ordonnance.
Les agences régionales de santé (ARS)
• Les ARS rassembleront à partir de 2010 les ARH, DDASS, DRASS, CRAM, URCAM…
• Elles seront chargées de décliner les politiques nationales de santé au niveau régional.
• Elles piloteront notamment le schéma régional de l’organisation des soins qui concernera aussi la médecine libérale.
• Un contrat va déterminer pour 4 ans les objectifs pluriannuels de gestion du risque.
• Un conseil national sera chargé de piloter les ARS et d’évaluer périodiquement les résultats de leur action.
• Le directeur de l’ARS sera nommé en conseil des ministres. Le conseil de surveillance est chargé de se prononcer sur le budget de l’agence, émettre un avis sur le plan stratégique régional de santé, le contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens de l’agence, ainsi qu’au moins une fois par an, sur les résultats de l’action de l’agence.
• L’ARS détermine les zones où seront mises en uvre les mesures destinées à favoriser une meilleure répartition géographique des professionnels de santé, des maisons de santé, des pôles de santé et des centres de santé.
• Les unions régionales des professionnels de santé (URPS) vont voir le jour avec une représentation des médecins dans trois collèges professionnels. La validité des conventions et accords est subordonnée à leur signature par une ou plusieurs organisations reconnues représentatives au niveau national aux élections à l'URPS regroupant au moins 30 % des suffrages exprimés au niveau national dans chacun des trois collèges
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