71 % des ophtalmologistes exerçaient en 2021 en « travail aidé », a dévoilé le Syndicat national des ophtalmologistes de France (Snof) ce vendredi dans une enquête*. Si ce chiffre est stable par rapport à 2020, le nombre et la diversité des collaborateurs (orthoptistes, infirmiers, assistants médicaux) dans les cabinets d'ophtalmologie sont, eux, en hausse.
Le travail aidé est présent « dans toutes les structures et dans toutes les régions », indique le président du Snof, le Dr Thierry Bour, avec une supériorité du secteur I par rapport au secteur II (77 % contre 59 %). Il est aussi plus plébiscité par les ophtalmos de moins de 40 ans, qui sont 90 % à y avoir recours.
Et une majorité va encore plus loin : 59 % des ophtalmologistes exercent même avec plusieurs professions différentes dans une équipe pluridisciplinaire, soit 8 points de plus qu'en 2020. Ces équipes sont constituées en majorité par des orthoptistes : 53 % des ophtalmologistes déclarent travailler avec des orthoptistes salariés, 25 % collaborent avec des orthoptistes libéraux, 25 % avec des infirmiers, 18 % avec un assistant médical « autre » et 14,5 % avec un opticien salarié.
Le Snof dénombre ainsi en 2021, 2 166 orthoptistes salariés et 740 orthoptistes libéraux intervenant au sein des cabinets, 600 infirmiers salariés, 267 opticiens et 665 autres assistants médicaux. « C'est le nombre d'assistants qui a le plus augmenté, rappelle le Dr Bour. Leur mise en place a été facilitée par la création d’un statut légal dans le cadre du plan Ma santé 2022 et d'aides conventionnelles en 2019 dans l'avenant 7 à la convention médicale ».
« Figure d'exemple »
Ce mode d'organisation « novateur » de la filière visuelle fait aujourd’hui « figure d’exemple en France et en Europe », estime le président de la structure. « Il a permis à la fois de réduire les délais d’attente et d’augmenter l’offre de soins, alors que le nombre d’ophtalmologistes est quasi constant depuis plus de 10 ans », assure-t-il.
Les délais de rendez-vous ont été réduits « significativement en quelques années seulement ». Selon les calculs du Snof, le délai médian pour obtenir une consultation périodique (non urgente) est passé de 66 jours en 2017, à 26 jours en 2021 soit une baisse de 61 %. Le délai moyen a, lui, diminué de 90 à 49 jours. Alors que le syndicat s'était fixé comme objectif il y a cinq ans le « zéro délai en 2022 », il estime qu'il est déjà atteint dans plusieurs grandes villes comme Paris, Lyon ou Nice. « Avec la baisse des départs en retraite dès 2024 et l’arrivée de nouveaux diplômés à 90 % en travail aidé, l’offre de soins devrait croître », veut même croire le Dr Thierry Bour.
Des chiffres qui sont loin de ceux donnés par le Rassemblement des opticiens de France (ROF) il y a quelques semaines, selon lesquels il fallait quatre mois d'attente (en moyenne) pour avoir un rendez-vous chez un ophtalmo pour 56 % des Français, et plus de six mois pour 29 % de la population. « Cette enquête dramatise les choses en disant qu'il n'y a pas de baisse des délais de rendez-vous, alors que plusieurs études, et pas seulement la nôtre, le confirment, réagit le Dr Thierry Bour. Il n'y a pas de mesure objective des délais, car l'étude se contente de demander aux patients combien de temps ils ont attendu… Je ne vois pas l'intérêt. La situation qui pose réellement problème, c'est celle des patients sans ophtalmologiste. »
200 postes d'internes demandés
Pour poursuivre dans cette voie, le syndicat liste « six chantiers prioritaires » pour l'année à venir sur lesquels il invite les pouvoirs publics à se pencher. Il plaide pour continuer à développer le travail aidé en équipe pluri-professionnelle, notamment en élargissant le contrat conventionnel de financement des assistants médicaux aux médecins exerçants seuls et en supprimant le seuil minimum d’activité. Autre demande : mettre en place un plan de déploiement de sites principaux et secondaires dans les zones sous-dotées, avec des mesures incitatives (aide à l’investissement, mise en place d’un zonage spécifique, développement de pôles d’ophtalmologie libéraux).
Pour améliorer la démographie des ophtalmologistes, le Snof appelle à maintenir au-delà de 2023 la croissance du nombre d’internes en ophtalmologie (au moins 200), à affecter prioritairement les postes en plus aux régions ayant une densité moindre et à développer les stages en milieu libéral durant l’internat.
* Enquête annuelle par questionnaire, réalisée du 1er janvier au 12 décembre 2021 auprès de 1 579 participants.
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