« Soit on le signait, soit on nous l’imposait »

Publié le 21/04/2009
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LE QUOTIDIEN : - Vous exercez dans une zone surdotée des Bouches-du-Rhône. Comment se passe votre activité professionnelle ?

NOELLE CHABERT : - On parle parfois de course à l’acte mais pour ma part, je ne dirais pas ça. En revanche, il est vrai que par rapport à la densité nationale qui est de 90 infirmiers pour 100 000 habitants, nous sommes en PACA à 193 pour 100 000. Nous faisons surtout des AIS (Actes infirmiers de soins),

c’est-à-dire de la prise en charge globale de patients, par opposition aux AMI (actes médicaux infirmiers), qui sont les actes du rôle prescrit. La densité infirmière, c’est vrai, est importante dans notre région, mais il est également vrai que par rapport à d’autres régions de France, nous avons moins de SSIAD (Services de soins infirmiers à domicile), si bien que la prise en charge des personnes âgées dépendantes est essentiellement faite chez nous par les infirmiers. Dans les zones très sous-dotées, les infirmiers ne font quasiment que de l’acte prescrit, parce que le reste est pris en charge par les SSIAD.

Les syndicats ont signé cet accord qui vient d’entrer en vigueur, comment le jugez-vous ?

Cet accord est accompagné de revalorisations tarifaires, et le professionnel que je suis trouve que ce

n’est pas mal. Il est également accompagné d’un encadrement de l’extension de SSIAD, et je vois ça aussi d’un œil favorable car nous sommes de plus en plus envahis par ces structures que le plan Raffarin avait développées. Cela étant, lors des dernières négociations préparatoires à la signature de l’accord, les syndicats ont bien senti que la pression mise par l’UNCAM était très forte, et que soit on signait, soit on nous l’imposait.

Pensez-vous que les aides à l’installation dans les zones très sous-dotées, prévues par l’accord, soient suffisantes pour favoriser l’installation ?

Franchement, je ne sais pas. Depuis des années, on voit qu’on essaie de mettre en place des programmes ou des projets dans ce qu’on appelle les déserts médicaux. Et si 3 000 euros, c’est déjà bien, je ne suis pas tout à fait sûre que cela soit suffisant pour susciter des vocations d’installation dans ces zones.

Et vous-même qui exercez dans une des zones les plus dotées en terme de démographie infirmière, pensez-vous que l’accord va régler les problèmes ?

Je pense que c’est malgré tout une garantie d’exercice pour les professionnels exerçant sur place. Des syndicats responsables doivent se projeter vers l’avant et assurer un avenir à leurs mandants. On ne peut pas laisser les gens s’installer indéfiniment. Je vous rappelle qu’en PACA, il y a 193 infirmiers pour 100 000 habitants, et on a vu ces derniers temps des infirmiers qui s’étaient installés en libéral revenir au salariat, parce que leur patientèle ne suffisait pas à les faire vivre.

Vous ne semblez cependant pas enthousiasmée par cet accord...

C’est vrai qu’il constitue une petite entaille dans quelque chose qui tient à cœur de tous les professionnels libéraux, et qui s’appelle la liberté d’installation. Nous y sommes allés parce que nous avons bien vu que sans quoi, les tutelles nous l’auraient imposé sans nous demander notre avis.

Beaucoup de médecins vous reprochent de créer un fâcheux précédent...

J’espère que nous n’avons pas ouvert la boite de Pandore. Mais les syndicats ont au moins mis en place quelque chose de réversible. Puisque le mouvement semblait irréversible, nous nous sommes dit que mieux valait l’accompagner pour le contrôler.

PROPOS RECUEILLIS PAR HENRI DE SAINT ROMAN

Source : lequotidiendumedecin.fr