En plein cœur de l'été, un incident de quelques heures sur le paiement des feuilles de soins électroniques (FSE) pour des actes en tiers payant aurait pu passer inaperçu. C'était sans compter sur la FMF, qui a épinglé la Caisse nationale d'assurance-maladie sur ce sujet.
Le 22 juillet dernier, le service de traitement des FSE a subi « un incident technique majeur, perturbant […] l’envoi des avis de réception logique » (ARL), indique le Dr Richard Talbot sur le site du syndicat de médecins libéraux. « Ces avis de réception précèdent les avis de paiement. Or, comme il n'y en a pas eu, le paiement des médecins pratiquant le tiers payant a donc été perturbé », explique le généraliste contacté par « le Quotidien ».
D'après l'Assurance-maladie, cet incident technique local est survenu dans un des centres de traitement informatique « à la suite de plusieurs coupures de courant liées à la canicule ». « Certains services et applications de certaines caisses ont pu être perturbés pendant 36 heures, aucune donnée n’a été perdue », a-t-elle indiqué.
L'incident a donc été rapidement réglé. Mais sa gestion a échaudé la FMF. « La plupart des caisses n’ont pas pris la peine de communiquer envers les professionnels, et encore moins de présenter des excuses. La seule communication au niveau national a été un bandeau sur EspacePro », regrette le syndicat.
« Certains médecins se sont inquiétés de ne pas voir les paiements arriver. D'autres étaient en vacances, et ont été alertés par leurs remplaçants, qui eux-mêmes ne comprenaient pas ce qui se passait », assure le Dr Talbot. Surtout, pour le médecin syndiqué, « cela laisse présager ce que pourrait donner un bug plus important dans le cadre d'une généralisation du tiers payant ». Le généraliste rappelle que les professionnels qui pratiquent de façon intensive le tiers payant « ont vu leur trésorerie mise en péril, alors que les factures ont continué à arriver ». Qu'en serait-il si l'ensemble de la profession était dans cette situation ? « Cet incident met en lumière la dépendance de plus en plus importante des médecins envers l’Assurance-maladie, insiste le Dr Talbot. Si demain les caisses, pour une raison ou une autre, arrêtent de payer les [FSE en] tiers payant, la situation économique des médecins deviendra rapidement intenable. »
Trois jours pour se faire payer dans l'Aveyron
Malgré tout, le délai de paiement des FSE réalisées en tiers payant est inférieur à trois jours pour les médecins. Selon le suivi trimestriel réalisé par l'Assurance-maladie, il était de 2,87 jours pour les médecins libéraux, toutes caisses confondues, sur le premier trimestre 2019.
Certaines sont en deçà de cette moyenne, d'autres au-dessus. Les délais les plus longs de paiement sont observés dans les caisses de Mayotte (3,63 jours), de l'Aveyron (3,03), du Loiret (2,99) et de Paris (2,98). À l’inverse, c'est en Guadeloupe et en Martinique que les paiements sont les plus « rapides » pour les médecins, avec respectivement 2,71 et 2,76 jours en moyenne pour se faire payer.
Actuellement, et depuis le 1er janvier 2017, le médecin peut proposer le tiers payant sur la part obligatoire (AMO) à tous ses patients. Par ailleurs, il est dans l'obligation de le pratiquer – toujours sur l'AMO – dans certains cas : accident de travail, maladie professionnelle, maternité, certains actes de prévention, pour les patients avec la CMU-C, l'aide à la complémentaire santé (ACS) ou l'aide médicale d'État (AME), pour les victimes du terrorisme, etc.
D'après le rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) publié en octobre 2017, une « montée en charge » du tiers payant généralisable est à prévoir sur quatre ans, jusqu'en 2021. En 2017, le tiers payant représente 28 % des actes médicaux, hors cas d'obligation légale.
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