Déserts médicaux : une association de citoyens saisit le Conseil d'État pour remédier à « ce fléau »

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Publié le 17/05/2021
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Crédit photo : Phanie

Chose annoncée, chose faite ! Après un courrier « préalable et gracieux » envoyé le 11 janvier et resté sans réponse du Premier ministre, l'Association des citoyens contre les déserts médicaux (ACCDM) a porté plainte auprès du Conseil d'État. Par l'intermédiaire de son avocate Corinne Lepage, le recours a été envoyé le 21 avril pour enjoindre le gouvernement à prendre toutes les mesures immédiates pour lutter contre les déserts médicaux.

« Malgré le discours rassurant des ARS sur l’efficacité à venir de l’augmentation du numerus clausus, de l’arrivée de médecins étrangers, du déploiement des infirmiers de pratique avancée, de la création de maisons de santé pluridisciplinaires, la désertification médicale ne cesse de s’aggraver », déplore l'association dans un communiqué. « Aucune des lois Santé depuis 2009 (loi Bachelot, loi Touraine, loi Buzyn = N.D.L.R.) n’a pris de mesures efficaces au plan national pour venir à bout de ce fléau », ajoute-t-elle.

Ainsi, par son inaction, le gouvernement a commis « une erreur d'appréciation de la situation » et violé, peut-on lire dans ce recours, plusieurs principes d’égalité de la Déclaration des Droits de l’Homme ​et les valeurs constitutionnelles d’accès à la santé : droit à la santé, droit à la protection sociale, égalité devant les charges publiques (les citoyens habitant dans les déserts médicaux contribuent à un système de soins dont ils ne peuvent pas bénéficier). Pis, son inertie coûterait cher au système de santé, entre 1 et 5 milliards d'euros par an, estime l'ACCDM citant un rapport des sénateurs Hervé Maurey et Jean-François Longeot.

Trois mesures urgentes

Face à la situation urgente (9 millions de Français sans médecin traitant), le Dr Laure Artru, rhumatologue et membre de l'ACCDM considère aussi que le choix du salariat proposé aux médecins n'est pas satisfaisant. « Qui va obliger les médecins à être salariés dans les zones fragiles ? », demande-t-elle. « Aujourd'hui on se bat pour la médecine libérale. Il faut bien que ceux qui la défendent s'organisent pour que les patients bénéficient d'une médecine de qualité. S'ils ne le font pas, ils devront assumer les contraintes », indique le Dr Laure Artru. Pour la rhumatologue, trois types de mesures contraignantes devraient s'imposer : la limitation de la durée des remplacements « de 3 à 4 ans », la prolongation du SASPAS de 18 mois à 2 ans pour que les internes puissent poursuivre la formation dans les zones fragiles et enfin, la mise en place du conventionnement sélectif pour réguler l'installation en fonction des besoins. « L'Ordre des médecins doit assurer cette mission et il ne le fait pas actuellement », regrette le Dr Artru.

En tout cas, si le Conseil d’État confirme la recevabilité de cette requête, l'État devra in fine « organiser la juste répartition de l’offre de soins sur le territoire, en faisant voter les lois qui le permettront », espère l'association. La haute juridiction administrative devra rendre son avis dans un délai de 18 mois. Pour l'heure, l'ACCDM compte bien mettre la question des déserts médicaux au cœur de la campagne présidentielle 2022 et interpeller les candidats sur les programmes des politiques de santé.


Source : lequotidiendumedecin.fr