LA RÉFORME DE LA TAXE professionnelle a failli coûter cher aux professions libérales. En effet, le texte initialement voté par le Parlement prévoyait un régime particulier pour les professionnels libéraux employant moins de cinq salariés : leur CVAE devait être calculée sur 6 % de leurs recettes. Résultat : ils devaient payer beaucoup plus de cotisation que les autres contribuables ! Fort heureusement, le Conseil constitutionnel, saisi de cette anomalie, a jugé les articles concernés anticonstitutionnels et les a annulés. Les libéraux se retrouvent donc soumis au même régime que les autres entreprises, mais avec une conséquence imprévue : ils n’ont pratiquement plus rien à payer au titre de cette CVAE. Vous n’aurez en 2010 que la cotisation foncière à régler, largement moins importante que l’ancienne taxe. Arention cependant cela ne va peut-être pas durer. Un amendement voté dans le cadre de la loi de Fiannaces purrait remettre tout en cause ( lire plus loin)
Détail des deux cotisations.
• La cotisation foncière des entreprises (CFE)
Tous les professionnels libéraux vont la payer, sauf ceux qui auraient été exonérés de taxe professionnelle en 2010. C’est le cas, par exemple, si vous exercez en zone franche urbaine (ZFU) et si vous pouviez être encore exonéré de taxe professionnelle cette année. En cas d’exonération partielle, le pourcentage d’exonération s’appliquera à la CFE.
La situation sera la même si vous êtes installé en ZRR (zone de revitalisation rurale) ou en zone urbaine sensible.
Si vous êtes exonéré de CFE et si vous avez reçu l’avis d’imposition, retournez – le au service des impôts des entreprises qui vous l’a adressé avec un mot d’explication. Et si vous n’êtes pas certain de votre situation, appelez ce service en leur donnant votre date précise d’installation.
Pour le calcul de la CFE, ces sont les éléments de l’année 2008 qui sont retenus. Mais pour son paiement, c’est votre situation le 1er janvier 2010 qui est prise en compte. Quelles en sont les conséquences ?
- Si vous avez cessé votre activité libérale au plus tard le 31 décembre 2009, vous n’avez pas de CFE à payer en 2010.
- Si vous avez cessé votre activité en 2010 sans avoir de successeur, vous recevrez l’avis d’imposition de cette année. Vous devrez demander une réduction de la CFE prorata temporis.
- En cas de cession de clientèle en 2010, c’est le vendeur qui est redevable de la CFE pour toute l’année. Il peut simplement demander à l’acquéreur de lui rembourser la quote-part de CFE correspondant à la période postérieure à la cession, si cette possibilité a été prévue dans l’acte.
- Si vous avez créé votre cabinet en 2010, vous n’aurez pas de CFE à payer pour cette première année d’exercice.
Comme pour la taxe professionnelle, si vos recettes de 2009 ont diminué par rapport à celles de 2008, vous pouvez demander une réduction de la CFE de 2010. Le montant du dégrèvement est égal à :
CFE de 2010 – [CFE de 2010 x (base de calcul de 2009 / base de calcul de 2008)]
La base de calcul de 2008 étant égale au total de la valeur locative des biens passibles d’une taxe foncière et de 6 % des recettes de 2008 et la base de 2009 correspondant à cette même valeur locative plus 6 % des recettes de 2009.
La demande doit être faite par courrier simple adressé au service des impôts des entreprises de votre lieu d’exercice. Il est conseillé toutefois de ne demander ce dégrèvement que s’il est significatif…
Si vous aviez payé au moins 3 000 euros de taxe professionnelle en 2009, vous avez, en principe, reçu une demande d’acompte de CFE correspondant à 10 % de la taxe professionnelle de 2009. Vérifiez si cet acompte a bien été déduit de la somme qui vous est réclamée pour le 15 décembre.
Pour le moment, les communes peuvent fixer un minimum de CFE compris entre 200 et 2 000 euros.
Mais cela peut clairement évoluer, selon le vote du Parlement.
• La cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE)
Comme on va le voir, pour 2010, la grande majorité des professionnels libéraux n’auront pas de CVAE à payer ou paieront un montant forfaitaire très faible. Tout dépend de vos recettes.
- Si vos recettes de 2009 sont inférieures à 152 500 euros, vous n’aurez pas de CVAE à régler. Vous n’avez en outre aucune obligation déclarative.
- Si vos recettes de 2009 sont comprises entre 152 500 euros et 500 000 euros, vous êtes redevables de la CVAE mais, compte tenu de son mode de calcul, vous n’aurez là encore rien à payer.
En effet, la CVAE correspond à 1,5 % de la valeur ajoutée de l’entreprise. Mais les contribuables ayant moins de 500 000 euros de recettes bénéficient d’un dégrèvement égal à la différence entre 1,5 % de la valeur ajoutée d’une part et 0 % de cette valeur ajoutée (ce qui donne 0…). Ce qui donne une CVAE égale à : valeur ajoutée x 1,5 % - valeur ajoutée x 1,5 % - 0 = 0.
Le calcul est surprenant mais le résultat est là : pas de CVAE à payer.
En revanche, vous avez dû déposer au plus tard le 15 juin une déclaration (numéro 1330) donnant le calcul de votre « valeur ajoutée ». Si vous avez omis de le faire, il n’est pas trop tard (c’est la première année…), vous éviterez d’être relancé et remarqué par l’administration.
- Si vos recettes de 2009 sont supérieures à 500 000 euros, le calcul va être le même mais le dégrèvement dont vous allez bénéficier est égal à la différence entre 1,5 % de la valeur ajoutée et un pourcentage compris entre 0 % et 5 % de cette valeur ajoutée. Et on y ajoute un abattement supplémentaire de 1000 euros. Là encore, on arrive à 0.
Toutefois, vous devrez payer une cotisation minimale de 253 euros (avec les frais de gestion). Le paiement de cette somme devra être effectué au plus tard le 3 mai 2011, en principe par télépaiement.
Toutes les explications pour effectuer ce télépaiement se trouvent sur le site www.impots.gouv.fr. de même qu’un simulateur très simple pour calculer la CET (cotisation foncière et cotisation sur la valeur ajoutée).
L’amendement Carrez
A noter l’obligation de télétransmettre la déclaration 1330 pour les contribuables dont les recettes sont supérieures à 500 000 euros.
Et maintenant, que va-t-il se passer ? Qu’aurez-vous à payer réellement en 2010 ? Le texte du Ministère accompagnant le projet de loi de finances indiquait simplement que les articles rejetés par la Haute Assemblée feraient l’objet d’un nouvel examen pour déterminer « les corrections à opérer compte tenu de la censure par le Conseil constitutionnel de l’imposition sur les recettes ». Le manque à gagner pour les collectivités locales a été en effet estimé entre 600 et 700 millions d’euros.
Les députés ont pris les devants puisqu’un amendement a été voté à l’initiative du député UMP du Val de Marne, Gilles Carrez – que l’on a connu mieux inspiré – permettant aux communes de fixer, pour les contribuables dont les recettes sont supérieures à 100 000 euros, un minimum de cotisation foncière compris cette fois entre 200 et 6 000 euros...( voir le Quotidien du 22 novembre)
Quand on connait la démographie médicale pour les quinze prochaines années, on comprend difficilement qu’un élu ait pu avoir une telle idée qui mettra les conseils municipaux dans une situation intenable et va à l’encontre de tout ce que font les municipalités pour retenir les médecins. Quelle commune osera fixer un minimum de cotisation foncière à 6 000 euros ? Certainement pas les petites communes situées dans des « déserts médicaux » qui, bien au contraire, exonéraient de taxe professionnelle les médecins qui voulaient bien s’installer sur leur territoire.
La taxe professionnelle avait au moins le mérite pour les professionnels libéraux d’être proportionnelle aux recettes. On veut la remplacer par une taxation forfaitaire, conditionnée uniquement par le choix du lieu d’exercice, s’appliquant indifféremment aux remplaçants, aux praticiens installés, ne tenant compte ni de leurs recettes ni de leur bénéfice.
Si l’on voulait recréer un « impôt imbécile », comme on appelait la taxe professionnelle, on ne pourrait faire mieux.
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