« Il y a un an, Jean-Paul Delevoye est venu nous présenter la réforme. Mais il n’y a toujours aucune proposition concrète à ce jour pour les médecins libéraux », a tempêté le Dr Thierry Lardenois, président de la Caisse autonome de retraite des médecins de France (CARMF), en ouverture de son colloque annuel qui s'est tenu à Paris, samedi 5 octobre, en présence de 300 participants inquiets.
Le patron de la CARMF redoute plus que jamais un jeu dupes. « Depuis que nous avons posé des questions précises au Haut-commissaire aux retraites, il n'y a plus aucune réunion programmée ! On tord en permanence les paramètres, grince le généraliste d'Angevillers (Moselle). Et dès qu’on se mobilise sur un thème, Jean-Paul Delevoye comme Emmanuel Macron se renvoient la balle... »
Une perte moyenne de 30 % des pensions ?
La CARMF a donc fait ses propres calculs et ne tourne pas autour du pot : le système universel envisagé aura un impact très négatif sur les futures pensions des praticiens.
Chiffres à l’appui, Henri Chaffiotte, directeur général de la CARMF, a dévoilé des simulations alarmistes pour les médecins libéraux (26 % à 37 % de baisse selon les cas de figure), sur la base du barème dégressif envisagé autour de trois taux de cotisations – soit 28,12 % jusqu'à un plafond annuel de la Sécurité sociale (1 PASS, environ 40 000 euros), 20,53 % de 1 à 2 PASS (80 000 euros) et 18 % jusqu’à 3 PASS (120 000 euros). Avec un taux de rendement programmé à 4,95 % pour le régime universel, « la perte de revenus serait de 30 % en moyenne si le chemin est appliqué. Et ce sont les revenus les plus faibles qui seront les plus pénalisés », déplore Henri Chaffiotte.
Présents à la table ronde, les syndicats représentatifs des médecins libéraux (CSMF, SML, FMF, MG France et Le BLOC) ont rappelé leur position commune sur cinq points non négociables : les droits acquis « à l'euro près », le respect du contrat conventionnel (ASV), la place de la profession dans la gouvernance du futur régime universel, les missions sociales de la CARMF et la sauvegarde des réserves ou le rapport cotisations/prestations qui doit « maintenir le niveau de retraite actuel pour les générations à venir ».
Combat difficile et « technocrates »
« Notre objectif est de conserver un niveau attractif pour les jeunes. Nous allons être extrêmement attentifs aux paramètres qui seront proposés », alerte le Dr Jacques Battistoni, président de MG France. Le Dr Philippe Cuq, co-président du BLOC, appelle à « une union intergénérationnelle et interprofessionnelle ». « Je vous annonce un combat dur et difficile. Il faut réfléchir à la façon dont nous allons pouvoir mobiliser les confrères. Si on reste dans un salon feutré, j’ai peur qu’on n’y arrive pas », harangue-t-il sous les applaudissements.
« Aujourd'hui, la profession souffre de son éclatement de représentation. Si l'ensemble des syndicats parlent d'une seule voix sur ce sujet, ce sont les médecins qui prendront le pouvoir et non pas les technocrates », abonde le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF, qui avait déjà lancé un appel à l'unité syndicale lors de son congrès à Antibes.
Devant une salle attentive, le Dr Jean-Paul Hamon, patron de la FMF, lance un pavé dans la mare. « La vraie question, c'est l’avenir du système conventionnel. Est-ce qu’on a encore intérêt à être médecin en secteur I ? L'État n'est-il pas en train de nous pousser hors de la convention ? On doit se poser la question », dit-il sous les applaudissements, indice de l'agacement
Le président de la CARMF, qui alerte depuis des mois sur le risque de disparition des caisses professionnelles et les dommages collatéraux pour les médecins, s'est réjoui de ces appels vibrants à l'œcuménisme syndical. Le Dr Lardenois va même plus loin : « Nous soutiendrons tous les mots d’ordre de mobilisation ».
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