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Nirsévimab, gestes simples… : comment prévenir la bronchiolite du nourrisson ? Posez vos questions à la Pr Christèle Gras-Le Guen, pédiatre au CHU de Nantes

Publié le 23/09/2023

La dernière épidémie de bronchiolite a été particulièrement intense et longue avec plus de 73 000 passages aux urgences. Cette année, l'arrivée d'un traitement prophylactique, le nirsévimab, peut changer la donne. Quels bénéfices en attendre ? À qui le prescrire ? Comment, à l'hôpital et en ville ? Quels « gestes simples » conseiller aux parents ? Quelle place future pour la vaccination des femmes enceintes ?

Pour répondre à toutes vos questions, Le Quotidien anime un Live chat le jeudi 28 septembre avec la Pr Christèle Gras-Le Guen, pédiatre au CHU de Nantes et ancienne présidente de la Société française de pédiatrie (SFP).

Saisissez votre pseudo, cliquez sur « validez », puis entrez le texte de votre question ci-dessous (merci de poser une question à la fois). 

Chat Pr Gras-Le Guen

Journaliste QDM (SL)
Bonjour à toutes et à tous.
Bienvenue sur lequotidiendumedecin.fr.
Nous accueillons aujourd’hui la Pr Christèle Gras-Le Guen, pédiatre au CHU de Nantes et ancienne présidente de la Société française de pédiatrie (SFP). Pendant une heure, elle répondra à vos questions sur la bronchiolite du nourrisson et sur les bénéfices attendus d’un nouveau traitement prophylactique, le nirsévimab.
 
Journaliste QDM (SL)
La Pr Gras-Le Guen est arrivée dans nos locaux. Le chat va bientôt commencer.
Live chat avec la Pr Christèle Gras-Le Guen
De gauche à droite, Coline Garré (journaliste), la Pr Gras-Le Guen et la Dr Irène Drogou (journaliste et médecin).
Journaliste QDM (SL)
Bonjour Pr Christèle Gras-Le Guen. Merci d’avoir accepté notre invitation.
Pr Christèle Gras-Le Guen
Merci pour cette invitation et ravie de pouvoir échanger avec nos confrères sur l'actualité en termes de bronchiolite et sur cette campagne de prévention que l'on souhaite de nature à améliorer la prochaine période épidémique par rapport à ce que l'on a vécu l'année dernière.
Gdg
N'y a-t-il pas confusion Beyfortus n'est pas un vaccin. Le traitement est un anticorps avec une durée de vie à priori limitée : laquelle ? Sans stimulation des défenses immunitaires ?
Pr Christèle Gras-Le Guen
Beyfortus n'est en effet pas un vaccin, mais bien un anticorps monoclonal dirigé contre le VRS et destiné à bloquer la partie du virus responsable de son invasivité, il n'y a en effet pas de stimulation des défenses immunitaires. En pratique, les essais cliniques menés avec cet anticorps montrent une efficacité tout à fait remarquable sur la diminution des formes graves de la maladie et des hospitalisations. La durée de vie de l'anticorps est de 150 jours, ce qui correspond à la période épidémique.
-Claire
Bonjour,
Que faire face à un nourrisson qui n'a pas encore reçu de nirsévimab et qui aurait déjà eu un ou plusieurs épisodes de bronchiolites sans documentation microbiologique ?
 
-MiaMAUNOURY
Y a-t-il un intérêt à proposer aux enfants qui ont fait la bronchiolite l'année dernière ?
 
-Arnaud 45
Si un nourrisson a déjà eu une bronchiolite, y a t-il un intérêt à administrer le nirsévimab ?
Pr Christèle Gras-Le Guen
Le nirsévimab est indiqué pour les enfants jusqu'alors non immunisés et donc non infectés par le VRS. En pratique, pour cette première saison épidémique, ce sont les nouveau-nés en maternité qui seront prioritairement immunisés par le nirsévimab et qui seront donc indemnes de tout antécédent de bronchiolite.
Le nirsévimab est destiné aux enfants qui vont vivre leur première saison épidémique, donc pas d'antécédent de bronchiolite pour l'instant. Les recommandations sont d'immuniser le plus vite possible après la naissance pour éviter la situation évoquée, à savoir l'immunisation d'enfants qui auraient déjà fait la bronchiolite.
-BIGOL06
Éventuels effets secondaires du traitement ? Immédiats ? À terme ? Merci.
 
-Bernisette
Risques identifiés et craints, à moyen et long terme ?
 
-Hervé W
Quels effets indésirables pour le nirsévimab ?
Pr Christèle Gras-Le Guen
A ce jour, environ 10000 enfants ont été inclus dans les essais cliniques évaluant le Beyfortus. Aucun effet grave n'a été rapporté et parmi les effets mineurs il n'y avait pas de différence de fréquence par rapport au placebo (fièvre modérée, rougeur au point d'injection, etc.).
En matière d'anticorps monoclonal anti-VRS, on dispose déjà de l'expérience du palivizumab utilisé depuis 25 ans chez les enfants prématurés ou cardiopathes sans effet secondaire sérieux rapporté.
Hervé W
Le nirsévimab empêche-t-il l'infection ou en diminue-t-il la sévérité ?
Pr Christèle Gras-Le Guen
Le nirsévimab protège des formes graves de la maladie et diminue de manière significative le recours à l'hospitalisation. Il n'empêche donc pas l'infection et permet de souligner l'importance des mesures barrière spécifiques aux tout-petits qui sont indispensables à mettre en œuvre de manière complémentaire.
Doc elgar
La France est elle le seul pays à utiliser le beyforus et à lancer une grande campagne de vaccination ?
Pr Christèle Gras-Le Guen
La France est la première à lancer une campagne d'immunisation d'une telle ampleur auprès des nouveau-nés en maternité. D'autres pays comme les Etats-Unis ou l'Allemagne ont également prévu d'utiliser le nirsévimab en ciblant les enfants les plus à risque comme ceux porteurs de maladie chronique.
-Dr EB
Bonjour,
Comment a été défini le nombre de doses commandées ? Que dire aux parents qui ont du mal à accéder au nirsévimab en ville ?
 
-Tatiana
Comment expliquez-vous que le succès de Beyfortus n'a pas été anticipé ? A peine 10 jours après le lancement de la campagne, le petit dosage a dû être priorisé pour les maternités.
Pr Christèle Gras-Le Guen
Excellente question ! Le nombre de doses réservées a été défini à partir du taux d'adhésion habituel des parents pour les nouveaux vaccins (moins de 20 % pour le vaccin anti rotavirus et anti méningoB). La capacité du laboratoire à produire le médicament a été également prise en compte pour cette première saison.
La priorisation des doses 50 mg pour les maternités correspond à la volonté de protéger avant tout les tout-petits de quelques jours qui ont été admis dans les réanimations l'hiver dernier en grand nombre. Ce sont eux cet hiver qui doivent bénéficier en priorité de cette innovation thérapeutique.
Pour les parents qui ont du mal à accéder au nirsévimab en ville cette saison, il faut pouvoir leur expliquer le rationnel de protéger avant tout les très jeunes enfants susceptibles d'être admis en réanimation avec une forme grave de bronchiolite et également, mettre en avant les mesures barrière adaptées aux nourrissons.
Ces mesures barrières en pratique sont : éviter les lieux confinés et trés fréquentés (galeries marchandes en période de noël), éviter les contacts avec des personnes malades contagieuses (attention aux passages de bras en bras et au défilé de visiteurs à la maternité), porter soi-même un masque et se laver les mains si on est parent enrhumé, le temps que l'infection guérisse, sans oublier les mesures plus habituelles, comme aérer régulièrement, ne pas fumer dans l'environnement du bébé, encourager l'allaitement maternel, etc.
EFI
Quels gestes simples à faire par les parents en attendant le médecin ?
Pr Christèle Gras-Le Guen
L'objectif cette année serait de ne pas attraper le virus de la bronchiolite et donc de mener une campagne de prévention pour convaincre que la bronchiolite n'est pas une fatalité. Une fois l'infection installée, il faut alors expliquer aux parents la technique de désobstruction des voies aériennes supérieures (cf le flyer des recommandations HAS 2019 sur le traitement de la bronchiolite) ainsi que le fractionnement des repas. L'environnement de couchage doit également garantir la sécurité des périodes de sommeil selon les recommandations internationales pour les moins d'un an (couchage à plat sur le dos avec une turbulette sans couette ni oreiller, sans peluche et sans tour de lit).
Journaliste QDM (SL)
Bonjour Professeur,
Quel est le profil de sécurité du nirsevimab ? Quel est le rapport coût/efficacité ?
Pr Christèle Gras-Le Guen
Le profil de sécurité est excellent à ce stade des connaissances. La question du rapport coût/efficacité est trop précoce puisque le prix n'en a pas été encore défini pour les prochaines saisons.
Journaliste QDM (SL)
Live chat avec la Pr Christèle Gras-Le Guen

Hub
Bonjour. Y a-t-il des analyses en cours pour expliquer les 3 décès dans le bras ayant reçu le nirsévumab ?
Pr Christèle Gras-Le Guen
La population inclue dans les études est une population de grands prématurés avec une lourde morbi-mortalité. C'est précisément à cause de cette vulnérabilité que ces enfants sont prioritaires pour cette immunisation. Pour mémoire, l'incidence des décès n'est pas différente dans le groupe témoin.
Robert 10
Peut-on espérer moins d'asthme chez l'enfant en prévenant la bronchiolite chez le tout-petit ?
Pr Christèle Gras-Le Guen
C'est une hypothèse en effet soutenue par de nombreux pneumopédiatres.
L'idée de prévenir les bronchiolites du nourrisson est avant tout d'éviter une infection pénible pendant huit à dix jours pour de très jeunes enfants et une inquiétude parentale, ainsi qu'une désorganisation de toute la vie de la famille à l'occasion de l'infection.
Robert 10
Le VRS est-il un virus connu pour développer des mutations ? Est-ce que le nirsévimab pourrait perdre en efficacité en cas de variants ?
Pr Christèle Gras-Le Guen
C'est une question très importante. Il est prévu durant cette saison de travailler avec le centre de référence des VRS de manière à analyser les situations d'infection à VRS chez les enfants qui auront été immunisés.
So
Où va le Nirsevimab une fois injecté chez des nourrissons non infectés par le VRS ?
Pr Christèle Gras-Le Guen
Il s'agit d'un anticorps comme ceux déjà présents chez l'enfant qui persiste durant 150 jours dans la circulation et permet de bloquer le système du virus destiné à la pénétration dans la cellule.
jaune citron
Chez les nourrissons à haut risque, le nirsévimab fait-il aussi bien que le palivizumab ? Pourquoi le palivizumab est-il réservé à cette population ?
Pr Christèle Gras-Le Guen
Selon l'avis de la HAS sur le nirsévimab, il n'y a en effet pas de différence d'efficacité montrée. Pour autant, l'utilisation du palivizumab est extrêmement contraignante et pénible compte-tenu de la demi-vie du produit qui impose 5 à 6 injections par hiver. La communauté pédiatrique souhaite faire bénéficier dès cet hiver les enfants prématurés du nirsévimab.
pierre-tramierr
Enfant âgé de 18 mois sans pathologie pulmonaire. Doit-on encore prescrire nirsévimab ? Merci
Pr Christèle Gras-Le Guen
L'AMM du produit ne concerne que les moins d'un an. Cet hiver, pour la première utilisation du nirsévimab, la priorité est donnée aux nouveau-nés en maternité.
Journaliste QDM (SL)
Ce Live chat est sur le point de se terminer. Une dernière question.
 
Roger
A partir de quel résultat estimerez-vous que cette campagne de traitement a été un succès ?
Pr Christèle Gras-Le Guen
On ne dispose pas d'un moyen de mesure du nombre exact des bronchiolites dans notre pays mais on pourra se baser sur les indicateurs surveillés par Santé publique France, comme le recours à SOS médecins, les admissions aux urgences pour bronchiolite ainsi que les hospitalisations. Le succès sera également d'avoir obtenu la confiance des familles et fait bénéficier 200 000 enfants de cette immunisation.
Journaliste QDM (SL)
C’est fini pour aujourd’hui. Merci Pr Gras-Le Guen d’avoir participé à ce Live chat avec les lecteurs du Quotidien. À vous le mot de la fin.
Pr Christèle Gras-Le Guen
Pour cette première période d'immunisation, le rôle des médecins traitants sera majeur dans l'information des familles depuis la période périnatale jusqu'à la prescription et l'administration du nirsévimab. L'autre aspect majeur de cette campagne de prévention est de pouvoir également informer les familles de l'importance des mesures barrières spécifiques aux tout-petits de manière à les protéger du VRS mais aussi de tous les autres virus susceptibles de circuler cet hiver (grippe, covid, etc.) et qui ne seront pas évités par le nirsévimab.
Si la priorité pour cette première saison est de protéger les nouveau-nés dès la maternité ainsi que les enfants suivis pour une maladie chronique ou anciens prématurés, l'objectif à terme sera bien de proposer l'immunisation à tous les enfants de moins d'un an. L'arrivée possible d'un arsenal thérapeutique plus large (vaccination en fin de grossesse ou des nouveau-nés) permettra d'optimiser la stratégie de prévention de ces bronchiolites sans se départir des mesures de bon sens que sont les gestes barrières.
Journaliste QDM (SL)
Merci à toutes et à tous pour votre participation. Rendez-vous prochainement pour un nouveau Live chat.

Source : lequotidiendumedecin.fr