Insuffisance cardiaque : boom de la télésurveillance

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Publié le 20/02/2024
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Conçue pour améliorer le suivi des patients insuffisants cardiaques, la solution de télésurveillance Satelia cardio, mis au point en 2018 par une start-up bordelaise éponyme, est aujourd’hui présente dans plus de 300 établissements de santé.

8500 patients insuffisants cardiaques télésurveillés sont suivis par Satelia, que 350 médecins utilisent en routine

8500 patients insuffisants cardiaques télésurveillés sont suivis par Satelia, que 350 médecins utilisent en routine
Crédit photo : Satelia

Véritable enjeu de santé publique, l’insuffisance cardiaque touche en France plus d’une personne sur 100 après 45 ans et une personne sur huit après 80 ans. Au total, 1,5 million de personnes souffrent de cette pathologie chronique, à l’origine, chaque année, de près de 200 000 hospitalisations.

Pourtant, selon le Pr Patrick Jourdain, chef de service de cardiologie à l’AP-HP et spécialiste de l’insuffisance cardiaque, « un tiers des hospitalisations serait évitable avec une bonne prise en charge. Dans près de la moitié des cas, les patients présentent des signes cliniques 10 jours avant l’hospitalisation. Ces patients ne font toutefois pas toujours le lien entre leurs symptômes et leur maladie et finissent aux urgences ». Une perte de temps et de chance considérables. « Les services d’urgences et de cardiologie sont très souvent engorgés. Résultats : un patient sur deux insuffisants cardiaques n’est pas hospitalisé en cardiologie, ce qui conduit inévitablement à une surmortalité », regrette le praticien. Selon la Haute autorité de santé (HAS), la mortalité à cinq ans après l’apparition des premiers signes demeure très élevée et comprise entre 30 et 50 %.

Comme un très bon collègue

En 2018, dans l’objectif de réduire les hospitalisations et la mortalité liées à cette pathologie, la start-up bordelaise Satelia a mis au point, en partenariat avec le CHU de Bordeaux, Satelia cardio, un outil de télésurveillance remboursé par l’Assurance-maladie dans le cadre de l’expérimentation Etapes. Près de 13 000 patients ont déjà bénéficié.

Fondé sur un algorithme, le dispositif se veut simple. Une fois l’application installée, le patient est invité à répondre à un premier questionnaire en ligne ou par téléphone en cas d’illectronisme. Toutes les semaines, un suivi régulier est assuré avec sept questions (poids, toux, essoufflement, œdèmes, aggravation des symptômes etc.) posées au patient.

Le plan de soins est tout de suite optimisé et on évite les urgences

Pr Patrick Jourdain, chef de service de cardiologie à l’AP-HP

À partir de ces informations, un score est calculé et une couleur s’affiche à l’écran. En cas de voyant orange ou rouge, le médecin référent est tout de suite alerté. « En fonction de la gravité, le praticien peut prescrire une prise de sang, adapter le traitement ou demander une hospitalisation », suggère le Dr Nicolas Pagès, anesthésiste-réanimateur et cofondateur de Satelia. « Cet outil, c’est comme un très bon collègue, schématise le Pr Jourdain. Même quand le patient est à plusieurs kilomètres, nous sommes tout de suite alertés en cas de problèmes. Le plan de soins est ainsi tout de suite optimisé et on évite les urgences. À terme, cela peut réduire significativement les déserts médicaux en cardiologique sur le plan de l’insuffisance cardiaque ! »

Résultats prometteurs

Au-delà de l’aspect pratique, la solution de télésurveillance semble faire ses preuves. Selon une étude publiée dans le Journal of cardiology and cardiovascular medicine, la capacité de cet outil à identifier les patients à faible risque de décompensation cardiaque est fiable à 99,43 %. La start-up communique également sur de premiers résultats prometteurs en matière de réduction des hospitalisations qui serait en baisse de plus de 60 % après inclusion de l’appli dans la vie des patients.

Avec l’entrée de la télésurveillance en juillet 2023 dans le droit commun et la majoration des forfaits opérateurs pour le télésuivi des insuffisants cardiaques, Satelia espère désormais renforcer sa présence sur le territoire et convaincre de nouveaux médecins. À ce jour, un patient insuffisant cardiaque télésurveillé sur deux (environ 8 500) est suivi par Satelia et 350 médecins l’utilisent en routine.

Aude Frapin

Source : Le Quotidien du Médecin