LE QUOTIDIEN : Le ministre de la Santé, Adonis Georgiadis, a annoncé la mise en place des interventions chirurgicales payantes dans le secteur public. De quoi s’agit-il exactement ?
Dr KOURI-KALLERGI : La Grèce est confrontée à la plaie des listes d’attente interminables, notamment en ce qui concerne la chirurgie, car nous manquons cruellement de soignants, comme la plupart des pays européens. Avec la pandémie de coronavirus, la situation s’est aggravée et les patients doivent attendre plusieurs mois avant d’être opérés. En l’état actuel, seuls les malades oncologiques sont prioritaires. Leur dossier est examiné à part et les interventions sont réalisées dans un délai tenant compte du stade de gravité de la santé du patient. L’idée n’est pas de privatiser la santé publique mais plutôt d’inverser la tendance et de faciliter les conditions d’accès aux soins chirurgicaux. Par ailleurs, les tarifs, qui devraient varier en fonction du type d’opérations, seront plus accessibles. Cette solution permettrait aussi en quelque sorte d’augmenter les salaires des soignants car les honoraires seront répartis entre l’équipe médicale, les médecins, les infirmiers et le personnel hospitalier impliqué, ce qui leur fera un revenu supplémentaire. Ce n’est pas une mauvaise chose car en Grèce, le salaire moyen d’un médecin ne dépasse pas les 1 600 euros sans les gardes. C’est trop peu !
N’avez-vous pas le sentiment qu’un tel programme puisse créer des inégalités ?
Je ne crois pas car ce dispositif permettra au contraire aux habitants des régions où les centres privés ne sont pas implantés d’avoir accès aux soins chirurgicaux. Par ailleurs, de plus en plus de Grecs se tournent déjà vers le privé pour se faire soigner. Les patients ont le sentiment qu’ils peuvent y développer une meilleure relation avec les praticiens. Par ailleurs, la qualité de soins et les prix y sont particulièrement attractifs et pas seulement pour la population locale. C’est l’une des raisons, d’ailleurs, pour lesquelles le tourisme médical est en train de se développer ici, notamment en ce qui concerne la fécondation in vitro. En 2022, la loi a été corrigée et les conditions d’accès à la FIV ont été facilitées. La limite d’âge pour la FIV est passée à 54 ans. La législation sur la gestation pour autrui a également été assouplie. Enfin, la cryoconservation est accessible à tous, non seulement à des fins médicales mais aussi sociales. Tous ces facteurs expliquent le dynamisme du secteur privé en Grèce.
Ne faudrait-il pas intervenir pour relancer le système public, pilier essentiel des sociétés modernes, défaillant depuis la grande crise de la dette publique ?
Récemment, plusieurs mesures importantes ont été adoptées pour redresser la barre du secteur public, qui a été ravagé d’abord par la crise, puis par la pandémie de coronavirus. En premier lieu, le gouvernement a lancé un programme de dépistage à l’échelle nationale contre les cancers du sein, du col de l’utérus, du colon, de l’intestin et les maladies cardiovasculaires. L’âge du début du dépistage a également été abaissé. Pour le cancer du col de l’utérus par exemple, l’âge est passé à 21 ans et les tests peuvent être effectués gratuitement jusqu’à 65 ans. Les tests ponctuels prévoient un frottis du col de l'utérus, la réalisation en cas de nécessité d'un test HPV-HR (détection de la présence du virus HPV) puis d’une biopsie et d’une éventuelle conisation. Un plan contre l’obésité chez les jeunes de moins de 18 ans a également été mis en place. Il prévoit une aide psychologique et un suivi avec un spécialiste de la nutrition. Un réseau d’unités médicales mobiles a par ailleurs été créé, notamment pour permettre aux îliens, qui peuvent difficilement rejoindre le continent, d’avoir accès à la médecine de santé publique. Tous ces programmes sont pris en charge à 100 %. En outre, des fonds ont été débloqués pour améliorer la qualité du réseau hospitalier. Par exemple, 156 dispensaires ont déjà été rénovés. L’objectif n’est pas de privatiser la santé et d’affaiblir ultérieurement le secteur public mais plutôt de préserver sa spécificité.
En tant que médecin, pourquoi vous présentez-vous aujourd’hui aux élections ?
Je me présente pour la première fois car jusqu’à présent, mes engagements familiaux et professionnels ne me permettaient pas de me lancer dans une campagne électorale. En ce qui concerne mon programme, je veux bien sûr mettre mes compétences sur la table et aider à trouver des solutions pour relancer la démographie et plus encore la santé en Europe.
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