L’Académie de chirurgie s’inquiète des conséquences sur la prise en charge en chirurgie pédiatrique d’une mise en œuvre « trop rapide » des décrets d’autorisation en chirurgie dans un contexte de pénurie de l’offre de soins particulièrement marquée en chirurgie pédiatrique. Alors que le sujet a occupé les discussions de sa séance de février dernier, elle met sur la table plusieurs propositions, dont un moratoire et des mesures d’attractivité pour éviter des pertes de chances pour les jeunes patients.
Publié en décembre 2022, ce décret modifie les conditions d'implantation des activités de soins de chirurgie : il organise une gradation des soins entre centres de proximité, centres spécialisés et centres de recours et encadre la pratique de la chirurgie pédiatrique. Si la reconnaissance de la chirurgie pédiatrique comme une spécialité demandant des compétences spécifiques est saluée, l’Académie soulève plusieurs éléments qui pourraient « aggraver » une situation déjà tendue, explique-t-elle dans un communiqué.
Un délai « trop court » pour la mise en œuvre
Est d’abord pointé le « retard de concertation » entre les agences régionales de santé (ARS) et le Conseil national professionnel de la chirurgie de l’enfant et de l’adolescent (CNP-CEA) sur les dispositifs spécifiques régionaux (DSR). La mise en œuvre de ces derniers dépend également des recommandations actualisées de la Société française d’anesthésie-réanimation (Sfar) et de l’Association des anesthésistes réanimateurs pédiatriques d’expression française (Adarpef) qui ne seront applicables qu’en juillet 2024. Le délai est ainsi jugé « trop court ».
Autre point critique : l’autorisation d’opérer les enfants en urgence donnée aux chirurgiens adultes viscéraux, orthopédiques, gynécologiques et urologues. « Poser l’indication dans cette situation peut nécessiter une expertise particulière », est-il relevé. Enfin, l’Académie s’alarme des effectifs restreints de chirurgiens pédiatriques (375 pour plus de 11 millions de moins de 15 ans) et d’anesthésistes pédiatriques.
Des difficultés déjà observées sur le terrain
Cumulés, ces éléments font craindre « de sérieuses difficultés d’offres de soins » et le risque d’un « désengagement » des praticiens et/ou des établissements. Pour les activités d’ORL pédiatriques, cette crainte est « déjà palpable ». Sur les 100 000 enfants de moins de 3 ans bénéficiant chaque année d’amygdalectomies, d’adénoïdectomies ou d’aérateurs trans-tympaniques (56 % de 1 à 3 ans et 42 % de moins de 1 an), des difficultés se poseraient déjà pour 5 000 à 30 000 cas, est-il estimé.
Ce contexte justifie un moratoire « de plusieurs mois », plaide l’Académie, le temps notamment d’installer les DSR. Des mesures d’attractivité sont également nécessaires pour les disciplines pédiatriques concernées. Enfin, l’Académie propose de reprendre le concept de T2A spécifique pour les soins non programmés pour revaloriser les tarifs des actes et des GHS de chirurgie et d’anesthésie pédiatriques.
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