Son discours de politique générale était très attendu. Le 30 janvier, Gabriel Attal, fraîchement nommé Premier ministre en début d’année, s’est exprimé pendant près d’une heure et demie devant les députés pour exposer ses priorités, deux semaines après la conférence de presse du Président. La santé est clairement l’une d’entre elles.
Dans son « grand oral », premier rendez-vous ô combien décisif pour lui, sur fond de crises multiples, dont celle du secteur de l’agriculture qui se manifeste partout dans l’Hexagone, Gabriel Attal a choisi comme gimmick d’« affronter pour avancer ».
Des SAS ou des gardes
Constatant les difficultés d’accès aux soins des Français, en ville comme à l’hôpital, Gabriel Attal a défini comme principaux objectifs de sa politique de santé l’idée d’augmenter par tous les moyens le temps médical, mais aussi d’améliorer l’accès aux soins de tous les Français. Quitte à revenir sur l’une des pierres angulaires de la médecine de ville : le volontariat des gardes.
Je suis prêt à aller plus loin en restaurant l’obligation des gardes pour les médecins libéraux en soirée et en week-end
Gabriel Attal, Premier ministre
C’est « la » mesure phare du discours du locataire de Matignon, celle qui s’apparente à un fort coup de pression de Matignon à l’endroit des syndicats de médecins libéraux, en pleines négociations conventionnelles. « Dès cet été », chaque département devra être doté d’un service d’accès aux soins (SAS). Mais si ce n’est pas le cas, le Premier ministre s’est dit « prêt à aller plus loin en restaurant l’obligation des gardes pour les médecins libéraux en soirée et en week-end, dans leur cabinet, à l’hôpital ou en maisons de santé ». Il faut « agir pour qu’aucun territoire ne soit oublié », a-t-il insisté.
Pour libérer du temps de soins, l’ancien conseiller de Marisol Touraine a confirmé vouloir accélérer la formation des assistants médicaux pour porter leur nombre de 6 000 aujourd’hui à 10 000 d’ici à la fin de l’année. Une mesure qui permettrait « 2,5 millions de consultations de plus pour les patients chaque année », précise-t-il.
Les paramédicaux à la rescousse
Pour compter plus de médecins sur le territoire, le Premier ministre a également promis des « solutions fortes, tout de suite ». Ainsi, il entend régulariser les médecins étrangers qui exercent en ce moment en France, nommer un « émissaire » chargé d’en recruter en dehors de l’Hexagone, et faciliter le retour des étudiants en médecine français partis à l’étranger.
Cette dernière proposition fait écho à la proposition de loi du député Les Républicains (LR) Yannick Neuder, cité nommément dans la foulée par Gabriel Attal. Comme le préconise le cardiologue, élu de l’Isère, le Premier ministre souhaite faciliter les passerelles pour les paramédicaux, pour qu’ils accèdent plus facilement aux études de médecine et qu’ils deviennent plus rapidement praticiens. Une infirmière anesthésiste à bac + 5 ayant travaillé plusieurs années doit, si elle le souhaite, pouvoir entrer directement « au moins en troisième année de médecine », a illustré par l’exemple Gabriel Attal.
L’hôte de Matignon ne s’en est pas tenu là. Au sujet des rendez-vous non honorés, « insupportables » pour les Français comme pour les soignants, il préconise une mesure « claire, dès cette année », à savoir : « quand on a rendez-vous [chez le médecin, NDLR] et qu’on ne prévient pas, on paye ! ». Soit une « taxe lapins », déjà évoquée par ses soins, lorsqu’il était ministre du Budget.
Éviter d’enflammer le Parlement
Autre mesure politique forte, à l’intention de la droite cette fois : comme s’y était engagée son prédécesseur Élisabeth Borne, le nouveau Premier ministre promet, dans la continuité, de réformer l’aide médicale d’État (AME) et, ce, « avant l’été », en se fondant sur le rapport Evin-Stefanini. La réforme des retraites ayant laissé des traces, ce sera finalement « par voie réglementaire », histoire d’éviter d’enflammer une fois de plus (de trop) le Parlement.
Parmi les autres sujets santé abordés : la santé mentale, qui sera une « grande cause de l’action gouvernementale », a promis Gabriel Attal. Le dispositif « Mon soutien psy », qui « n’a pas eu le résultat escompté », sera réformé en profondeur, notamment par l’augmentation du tarif de la consultation et l’accès direct aux psychologues sans passer par un médecin. En outre, le Premier ministre compte s’appuyer sur les maisons départementales des adolescents pour mener à bien son action, en promettant une par département.
Quant à la fin de vie, question « intime et délicate », Gabriel Attal confirme « l’appel grave » des Français à « revoir notre droit ». En ce sens, l’attendu projet de loi d’aide active à mourir sera débattu « avant l’été » dans une volonté « d’équilibre ». Le chantier de l’enfance et du bien vieillir ont aussi été cités comme chantiers en cours, dans une volonté « d’accompagner à tous les âges de la vie ».
L’hôpital, grand oublié
C’est, au final, l’hôpital qui aura le moins inspiré Gabriel Attal. À moins que sa sortie un peu précipitée le 13 janvier au CHU de Dijon sur les « 32 milliards supplémentaires » accordés à l’hôpital et, plus largement, à la santé, ne l’ait échaudé. Le Premier ministre a simplement regretté que les accords financiers du Ségur de la santé ne soient pas « arrivés partout ». « Ça va changer rapidement ! » a-t-il lancé. Sans préciser pour autant comment.
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