Au cours des journées scientifiques de la Société française d’hépatologie (Afef) qui se tiendront du 4 au 6 octobre à Rennes, l'association SOS Hépatites & Maladies du foie va présenter les résultats d'une expérience menée en juin dernier, le « mois sans sucres ajoutés ».
Selon ses promoteurs, cette expérience démontre qu'il est possible de mobiliser le grand public sur cette question et apporte sa pierre au débat sur l'addiction au sucre et la surabondance de sucres ajoutés dans l'alimentation.
Pendant 30 jours, 371 volontaires se sont lancé le défi de rechercher les sources de sucres ajoutés dans leur alimentation et de trouver des moyens de les réduire. À l'image du Dry January qui questionne la place de l'alcool dans nos sociétés, le mois sans sucres ajoutés ne vise pas à éradiquer le sucre en tant que tel, mais à porter la réflexion sur toutes les sources de sucres cachés de notre quotidien.
Une question qui fédère surtout les femmes
Sur les 371 participants recrutés entre avril et mai, 203 ont complété le suivi, à savoir deux questionnaires majeurs (début juin et fin juin) et trois petits intermédiaires. Un questionnaire de suivi à 6 mois est également prévu.
Le groupe comportait 89 % de femmes, ce qui ouvre une première piste de réflexion pour le Dr Pascal Melin, président de la fédération SOS Hépatites & Maladies du foie. À savoir quels sont « les moyens de mobiliser aussi les hommes », s'interroge-t-il. Sur l'ensemble de l'échantillon, 29 % étaient en état d'obésité et 29 % en surpoids, pour un indice de masse corporelle (IMC) moyen de 27 kg/m2 (l'IMC moyen est de 25,5 en France). Des antécédents de stéatose ou de stéatite non alcoolique (Mash, anciennement Nash) sont déclarés par 29 % des répondants. « Dans les analyses ultérieures, il sera intéressant de voir si ce sont ces patients-là qui ont obtenu les meilleurs résultats », prévoit le Dr Melin.
Une minorité de participants possiblement addicts au sucre
Durant le défi, 14 % des participants ont le sentiment d'avoir totalement arrêté les sucres ajoutés, 33 % pensent qu'ils ont fortement réduit leur consommation, 41 % affirment ne l'avoir qu'un peu réduit et 12 % « pas vraiment ». L'autre chiffre important est que 52 % des participants estiment avoir tenu le défi tous les jours sans exception, et 24 % pratiquement tous les jours.
Cette réduction de la consommation de sucres ajoutés est jugée globalement facile ou peu difficile, mais 5 % des participants l’ont trouvée très difficile. « C'est dans ce groupe-là que la question de l'addiction au sucre peut être questionnée avec le médecin », analyse le Dr Melin. Un quart des volontaires évoque par ailleurs une addiction au sucre.
Les sodas et boissons sucrées étaient déjà identifiés comme une source majeure de sucres ajoutés par la population de l'étude, déjà très sensibilisée à la question. En revanche, le mois sans sucres ajoutés a été l'occasion d'une prise de conscience de leur présence massive dans les pâtisseries et biscuits industriels, le chocolat, les bonbons et barres chocolatées. Ce sont ces aliments, et principalement le grignotage entre les repas, qui ont été le plus réduits.
Un effet sur les fringales
Une moindre consommation de sucres ajoutés s'est accompagnée d'une diminution des fringales chez 45 % des participants et d'une augmentation chez seulement 14 % d'entre eux. Les bénéfices ressentis étaient multiples et variés : plusieurs participants évoquent une amélioration de l'humeur, de la qualité du sommeil, de la tonicité et de la peau. Il est à noter que quelques-uns évoquent a contrario des troubles de l’humeur, du sommeil et une perte d'énergie. Les auteurs estiment qu'il pourrait s'agir des mêmes participants chez qui les fringales ont augmenté et la diminution du sucre a été particulièrement difficile.
Forte de ces résultats, la fédération SOS Hépatites & Maladies du foie lance un appel à la mobilisation pour une deuxième édition en 2024. « L'expérimentation prouve que l'on peut mobiliser un échantillonage représentatif de Français, il n'y a pas de raison que cela ne puisse être reproduit à plus grande échelle », juge le Pr Patrick Marcellin, hépatologue à l'hôpital Beaujon de Clichy (Hauts-de-Seine). Les responsables de l'association avaient prévu de s'adresser ce 3 octobre à Santé publique France pour leur soumettre un projet national de mois sans sucres ajoutés.
L'association formule en outre plusieurs propositions nées de l'expérience : sensibiliser le public et mieux faire apparaître la présence de sucres ajoutés, inciter les industriels à diminuer les teneurs, valoriser les bénéfices liés à la réduction de la consommation, admettre la réalité de l'addiction au sucre (et prévoir une prise en charge adaptée) et intégrer le rapport au sucre dans le parcours de soins. « On pose toujours la question du poids, du tabac et de l'alcool lors des consultations, il faut aussi poser la question de la consommation de sucre », estime le Dr Melin.
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