Maladies bronchiques et substances inhalées

FMC : les effets délétères du tabac et du cannabis

Publié le 31/01/2013
Article réservé aux abonnés
1359598745405370_IMG_97780_HR.jpg

1359598745405370_IMG_97780_HR.jpg
Crédit photo : PHANIE

LA PRÉVALENCE du tabagisme chez les asthmatiques est de 30 % environ. « Un des principaux inconvénients du tabagisme chez les asthmatiques, souligne le Pr Nicolas Roche, est la diminution de l’efficacité, en l’occurrence les corticoïdes inhalés. Ceux-ci, entre autres actions, bloquent l’expression des gènes de l’inflammation ce qui leur confère leur activité inflammatoire. Pour bloquer ces gènes, les corticoïdes ont besoin de cofacteurs, notamment des histones déacétylases. Or ces histones déacétylases sont inhibées par la fumée de tabac par le biais du stress oxydant ». Il y a aussi les effets irritatifs et pro-inflammatoires propres au tabac, ses effets délétères sur l’épithélium des voies aériennes, les anomalies de sécrétion de mucus qu’il induit.

Plusieurs études ont démontré que les corticoïdes sont moins actifs sur la fonction respiratoire du fumeur que sur celle du non-fumeur. On sait également que les asthmatiques qui fument ont moins de chance d’avoir un asthme bien contrôlé par leur traitement. Et réciproquement, l’asthme non contrôlé est plus fréquent chez les asthmatiques fumeurs que dans l’ensemble de la population asthmatique. « Enfin, souligne N. Roche, lorsque les asthmatiques arrêtent de fumer, le contrôle de l’asthme et la fonction respiratoire s’améliorent. Mais les altérations inflammatoires bronchiques dues au tabac qui s’ajoutent à celles de l’asthme vont mettre un certain temps à diminuer. Certes, le tabac est une source d’inflammation des bronches mais cette inflammation est très différente de celle de l’asthmatique non-fumeur en termes de cellules impliquées. Dans l’asthme, ce sont les éosinophiles qui sont recrutés, dans le tabagisme, ce sont les neutrophiles. Or les neutrophiles sont beaucoup moins sensibles aux corticoïdes ».

BPCO et cannabis

« Le cannabis a un effet bronchodilatateur à court terme, mais cet effet ne se confirme pas du tout sur le long terme où il paraît au contraire délétère pour la fonction respiratoire, note N. Roche ».

Dans plus de 80 % des cas, le tabac est la cause de la BPCO. La fréquence des BPCO liées au cannabis est difficile à évaluer ; en effet, les consommations de tabac et de cannabis sont le plus souvent intriquées chez les consommateurs de cannabis, il est donc difficile de faire la part de la responsabilité de l’un ou l’autre. « Les résultats des études sur le sujet sont assez contrastés, souligne N. Roche. Deux tiers des auteurs notent que le cannabis altère la fonction respiratoire comme le tabac. Un tiers ne relève pas d’altération évidente de la fonction respiratoire ».

Entretien avec le Pr Nicolas Roche, service de pneumologie, Hôtel Dieu, Paris

 Dr BRIGITTE MARTIN

Source : Le Quotidien du Médecin: 9214