Congrès de l'ASCO : associer clinique et génomique pour guider le traitement adjuvant dans le cancer du sein

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Publié le 04/06/2019

Dans le cancer du sein RH+, HER2-, N-, combiner l'approche clinique et l'approche génomique permettrait d'adapter le traitement adjuvant après tumorectomie et exérèse du ganglion sentinelle. C'est ce que montre l'équipe américaine dans l'étude TAILORX publiée dans le « New England Journal of Medicine » et présentée lors du congrès de l'American Society of Clinical Oncology (ASCO) qui se tient du 31 mai au 4 juin à Chicago.

Identifier une population « cible »

« Cette étude vise à identifier une population “cible” qui tirerait un bénéfice d'une chimiothérapie adjuvante », commente pour « le Quotidien » la Dr Nathalie Garnier-Viougeat, oncosénologue au Groupe hospitalier Paris Saint-Joseph. Pour cela, les auteurs se sont appuyés sur deux paramètres :
• un score de récidive basé sur 21 oncogènes (identifiés par la même équipe) compris entre 0 et 100 (risque faible : 0-10, risque intermédiaire : 11-25, risque élevé : 26-100),
• et un score de risque clinicopathologique basé sur la taille de la tumeur au diagnostic et son grade histologique à la biopsie.

« L'objectif est de déterminer si la combinaison de ces deux analyses permet d'objectiver les critères de bénéfices de la chimiothérapie adjuvante associée à l'hormonothérapie et ceux de l'hormonothérapie seule », précise la Dr Garnier-Viougeat.

Pas d'intérêt de la chimiothérapie chez certaines femmes

Au total, 9 427 femmes atteintes d'un cancer du sein localisé HER2-, RH+, N- ont été incluses dans l'étude entre avril 2006 et octobre 2010. Elles sont 70,2 % (6 615) à présenter un risque clinicopathologique bas.

En étudiant les différentes modalités de traitement (hormonothérapie seule ou chimiothérapie suivie de l'hormonothérapie) et les différents profils de patientes (selon les deux scores et leur âge inférieur ou supérieur à 50 ans), les auteurs ont mis en évidence plusieurs éléments :
• Chez les femmes de 50 ans et moins présentant un score de récidive bas (0-10), l'hormonothérapie seule est associée à un taux de récidive à 9 ans inférieur ou égal à 1,8 %, quel que soit leur score clinicopathologique. La chimiothérapie n'a donc pas d'intérêt dans cette population. « Pour un score 0-10, le risque de récidive à 9 ans reste de l'ordre de 3 % chez les femmes traitées par hormonothérapie seule quel que soit leur âge », ajoute la Dr Garnier-Viougeat.
• Chez les femmes de 50 ans et moins présentant un score de récidive intermédiaire (11-25), l'hormonothérapie seule n'est pas inférieure à la chimiothérapie adjuvante suivie d'hormonothérapie, quel que soit leur score clinicopathologique. Pour cette population non plus la chimiothérapie ne semble donc pas apporter de bénéfice.
• En revanche, chez les femmes de 50 ans et moins, le risque de récidive à 9 ans était de plus de 12,3 % chez les femmes présentant un haut risque clinicopathologique et un score de récidive intermédiaire (11-25) traitées par hormonothérapie seule, et de 15,2 % chez les femmes avec un score de récidive élevée (26-100) traitées par chimiothérapie puis hormonothérapie. « Nous considérons qu'un risque de récidive supérieur à 5 % n'est acceptable », souligne l'oncologue.

« Les deux scores peuvent permettre d'identifier chez les femmes préménopausées la thérapie adjuvante la plus efficace, le score de récidive apportant une information indépendante du caractère clinicopathologique », résume la Dr Garnier-Viougeat, avant de conclure : « Cette étude, en objectivant des résultats que l'on suspectait, montre que combiner le risque clinicopathologique et le test de 21 gènes a du sens. »

À noter néanmoins que le test basé sur les 21 gènes est coûteux et n'est à ce jour pas pris en charge par l'Assurance-maladie.


Source : lequotidiendumedecin.fr