Imagerie en oncologie

Le radiologue présent à toutes les étapes du parcours de soins

Publié le 29/10/2012
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LA PLACE de l’imagerie en oncologie a grandement évolué au cours de ces dernières années. Auparavant surtout diagnostique, elle est devenue aussi thérapeutique et elle fait aujourd’hui partie intégrante de la prise en charge multidisciplinaire des patients. Cette démarche est facilitée par le développement des Systèmes d’Archivage et de Partage des Images (PACS ou SAPI). « Les outils mis à disposition par les firmes permettent aujourd’hui de proposer un suivi longitudinal des patients et notamment ceux atteints de cancers : il est en effet possible d’accéder assez facilement à l’ensemble des images faites chez un patient, de les relire avec les collègues cliniciens, et les spécialistes d’organes et de les comparer avec les examens antérieurs. Ceci modifie complètement la place du radiologue, qui est désormais sollicité à toutes les étapes de l’évolution de la maladie, du dépistage au suivi sous traitement », rappelle le Pr Frank Boudghène.

L’essor de l’imagerie fonctionnelle.

L’imagerie fonctionnelle est en plein essor, tant dans le diagnostic initial des tumeurs et leur bilan d’extension que dans l’évaluation de l `efficacité des traitements. C’est particulièrement le cas en IRM où l’imagerie de diffusion, initialement développée dans l’exploration des accidents vasculaires cérébraux, trouve de nombreuses applications en cancérologie : les propriétés physiques des molécules d’eau dans les tissus sont utilisées pour évaluer leurs anomalies de diffusion au sein des tumeurs qui vont provoquer un signal visible. De ce fait l’IRM de diffusion corps entier pourrait ainsi concurrencer à terme le PET-scan dans le bilan d’extension de certains cancers, en détectant de petites zones d’activité tumorale à distance, sans avoir recours à des agents radio-actifs. L’imagerie de perfusion se développe dans certaines tumeurs, comme les tumeurs cérébrales où elle permet d’estimer leur agressivité, ainsi que dans les cancers de prostate, où elle se montre très utile pour la réalisation de biopsies ciblées, par exemple en deuxième intention chez un patient ayant une première série de biopsies négatives. L’imagerie fonctionnelle de diffusion est également très intéressante pour apprécier l’évolution de la maladie après traitement, pour à la fois évaluer la réponse thérapeutique (zones actives ou simples séquelles) ainsi que pour détecter les récidives. Ces techniques qui sont encore du domaine de l’évaluation, vont faire partie de la pratique dans les prochaines années, et contribuer à améliorer la prise en charge des patients atteints de cancer, la contrepartie étant qu’elles allongent la durée d’examen. « Or l’un des problèmes actuels est le sous-équipement chronique en IRM en France. Nous ne disposons que de 10 IRM/million d’habitants, ce qui est environ moitié moindre que dans les pays voisins. En cancérologie, les applications sont majeures et alors que l’imagerie est une source de progrès, au même titre que la chimiothérapie, il est tout à fait regrettable que cette avancée se heurte au problème du déficit en IRM », souligne le Pr Boudghène.

Biopsies guidées.

La réalisation de biopsies guidées par l’image, qui s’inscrivent dans le prolongement de l’acte d’imagerie diagnostique, fait aujourd’hui partie intégrante de la pratique des radiologues, dans la plupart des pathologies d’organe. L`imagerie interventionnelle est en plein développement, et la mise au point de système d’aide au guidage en 3D ou en 4D va faciliter à court terme les prélèvements et les ablations tumorales par voie percutanée, tout comme le traitement ciblé de la douleur chez les patients atteints de cancer.

Paradoxalement, ces progrès techniques rapprochent le radiologue du patient, puisqu’il est sollicité tout au long de l’évolution de la maladie, et qu’il est de plus en plus placé au cœur du processus de soin. Ceci pose la question de ce que le radiologue peut dire ou non à son patient. « Le radiologue est le plus souvent placé dans une situation de pré-annonce : le patient vient d’avoir son examen, que lui dire, où et comment lui dire ? Souvent des mots simples suffisent, et il apparaît essentiel d’améliorer la formation des radiologues dans ce domaine. La Fédération d’imagerie du cancer (à la Société française de radiologie) prépare une charte en collaboration avec les radiologues libéraux (FNMR) et hospitaliers (SRH) pour répondre précisément à cette problématique. D’autre part pour prendre en compte l’ensemble des développements en cours dès la formation initiale des radiologues un module transversal d’enseignement d’Imagerie oncologique va être mis en place pour les nouveaux internes sous l’égide du collège des enseignants de radiologie », conclut le Pr Boudghène.

D’après un entretien avec le Pr Frank Boudghène, service de radiologie, hôpital Tenon, Paris.

 Dr ISABELLE HOPPENOT

Source : Le Quotidien du Médecin: 9182