Troubles trophiques du diabétique

Informer, éduquer, stimuler l’élan de vie

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Publié le 27/09/2018
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amputation

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Crédit photo : PHANIE

« Chez un diabétique tout trouble trophique (infecté ou non) nécessite d’évaluer l’état vasculaire par un écho-doppler, et si la fonction rénale le permet par un angioscanner », rappelle le Dr Coblence.

Décidé au cas par cas, le traitement des troubles trophiques est le plus conservateur possible. En cas de nécrose humide, une mise à plat s’impose. « Chez le diabétique, le parage des tissus nécrosés ou infectés est d’emblée agressif et extensif, car il ne cicatrise jamais s’il reste de la nécrose ou des collections, même si on revascularise la zone », note le Dr Coblence. Ce parage est complété par un pansement aspiratif négatif continu (VAC®) renouvelé toutes les 72 heures. Si la jambe est vascularisée ce traitement peut permettre la cicatrisation, même en cas d’état septique. La mise en décharge du membre est ensuite impérative (alitement, chaussure de Barouk ou béquilles) avec appui strictement interdit car les traumatismes répétés de la marche créent des contraintes et empêchent la cicatrisation.

Parler d’amputation à un patient non préparé conduit trop souvent à des gestes à minima compassionnels en aigu, pour « tenter » de conserver le pied. « Mais le patient est ensuite très fréquemment saucissonné (8 jours après en trans-métatarsien, puis 15 jours après en trans-tibial, puis un mois après en trans-fémoral). Quand l’amputation est inéluctable, prendre la décision radicale d’amputer d’emblée en trans-tibial assure une cicatrisation et un appareillage rapide. Elle évite au patient une longue hospitalisation avec des soins douloureux, des risques de complications du type inflammation, infection, déséquilibre du diabète, accidents liés au décubitus, dénutrition… voire une fonte musculaire pouvant nécessiter des mois de rééducation avant un possible appareillage », souligne le Dr Coblence.

Sur quels paramètres repose la décision thérapeutique ? Tout d’abord l’étendue de l’atteinte tissulaire ; puis la vascularisation. « Amputer au niveau d’une zone non vascularisée expose à l’échec. Se placer d’emblée en amont de la dernière zone vascularisée », préconise le chirurgien ; ensuite la capacité du patient à marcher. S'il ne marche plus depuis longtemps, une amputation en trans-fémoral sera préconisée en cas de troubles trophiques, car le membre se rétractant en flexion, un moignon transtibial appuie toujours sur le matelas et ne cicatrise jamais. Enfin l’état général (mauvais) ou l’atteinte vasculaire (grave) signent un risque de nécrose de moignon élevé et font envisager l’amputation à l’étage supérieur.

Préparer et accompagner les patients

L’éducation thérapeutique est indispensable pour préserver le capital vasculaire précaire des diabétiques. Si elle insiste sur l’importance des soins de podologie pour prévenir les troubles trophiques, elle doit aussi sereinement préparer le patient à une possible amputation. « Évitons au diabétique de vivre cet épisode grave de sa vie comme l’échec d’années d’efforts. L’amputation est au contraire une solution pour préserver l’autonomie. Les prothèses articulées actuelles, personnalisées et adaptatives, aident à retrouver l’équilibre et une marche naturelle. Mais attention, pas de dépit mais vigilance renforcée : observance, hygiène, soins des petites plaies, alimentation et poids… L’appareillage impose l’adéquation de l’emboîture au moignon d’amputation. Généralistes, diabétologues, chirurgiens, rééducateurs chacun à notre niveau, éduquons, informons et accompagnons le diabétique avant, pendant et après l’amputation pour l’aider à trouver lorsqu’il est amputé, la force de l’indispensable élan de vie », invite à retenir le Pr Paysant.

Dr Sophie Parienté

Source : Le Quotidien du médecin: 9689