Maladies métaboliques

Le microbiote est devenu incontournable

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Publié le 19/03/2018

Ces dernières années, l'importance du microbiote intestinal a été confirmée dans la physiopathologie du diabète et des maladies métaboliques, ouvrant la voie à de nouvelles pistes de traitements. « La metformine qui est utilisée en 1re intention dans le traitement du diabète de type 2, fait intervenir des modifications de microbiote, rappelle le Dr Vidal (Inserm, Lyon). Si le lien entre ces modifications et l'amélioration du diabète a été bien établi, on ne sait pas encore en revanche si la metformine agit de façon directe (sur des bactéries) ou indirecte, au niveau de l'intestin par exemple. Cet axe de recherche fait donc l'objet d'études. »

Plusieurs souches à l'étude

Autre avancée : l'identification de plusieurs souches bactériennes ayant la capacité d'améliorer le métabolisme du glucose et la sensibilité à l'insuline. Cela a été démontré avec Akkermansia muciniphila : « Cette souche possède une protéine de paroi particulière qui pourrait avoir un effet antidiabétique. Cela ouvre évidemment des perspectives intéressantes en termes de traitement, si l'on arrive à produire cette protéine », considère le Dr Vidal. Des travaux ont d'ailleurs montré que l'espèce bactérienne Akkermansia était diminuée chez les diabétiques : « Restaurer ou augmenter cette espèce bactérienne pourrait donc aussi être une stratégie thérapeutique, ajoute-t-il. La régulation de la bactérie Akkermansia par la metformine a été envisagée, mais les résultats ne sont pas très clairs à ce jour : certaines équipes ont montré que la metformine augmentait cette bactérie alors que d'autres n'ont pas retrouvé de modifications. Il n'est donc pas certain que la metformine agisse sur cette espèce ».

Akkermansia n'est pas la seule à susciter des recherches. « Notre équipe s'intéresse par exemple à d'autres espèces bactériennes de la famille des Lactobacilles », poursuit le Dr Vidal. Il semble en effet que certaines souches probiotiques, dont les Lactobacilles, aient la capacité d'agir sur la sécrétion de GLP1 (incrétine), ce qui ouvre des perspectives intéressantes : des souches pourraient être combinées avec des agonistes des récepteurs du GLP1 ou des inhibiteurs de l'enzyme DPP4 (gliptines). « Il est possible qu'en combinant les gliptines à des probiotiques, leur effet soit amplifié : des travaux sont en cours pour tenter de le démontrer », précise le Dr Vidal.

D'autres souches de probiotiques, utilisées dans les maladies inflammatoires de l'intestin, comme la maladie de Crohn, intéressent les chercheurs, sans que leur effet dans le diabète de type 2 n'ait été encore démontré de façon claire.

En revanche, la relation entre microbiote, inflammation intestinale et le diabète de type 1 est, elle, bien établie, avec la présence de cellules immunitaires dans l'intestin, qui jouent un rôle dans la physiopathologie du diabète de type 1 et qui pourraient être modulées par le microbiote.

Des acides biliaires en phase 2

La dernière piste à émerger est celle des acides biliaires. Ils pourraient être impliqués dans la protection contre le syndrome métabolique. En effet, le microbiote intestinal métabolise ces acides, produisant des métabolites secondaires. Ceux-ci pourraient être des molécules signal, jouant un rôle dans la régulation du métabolisme et des dépenses énergétiques. « La recherche porte sur l'identification d'analogues d'acides biliaires, de souches bactériennes qui pourraient modifier ces acides et de leurs récepteurs, explique le Dr Vidal. Ce sont autant de pistes de traitements futurs pour le diabète de type 2, d'autant que si certaines molécules sont encore en phase préclinique, d'autres font l'objet de phase 2 ».

Entretien avec le Dr Hubert Vidal, directeur de Recherche INSERM, directeur du Laboratoire CarMeN : laboratoire de recherche en cardiovasculaire, métabolisme, diabétologie et nutrition de l'université de Lyon

Dr Nathalie Szapiro

Source : Bilan Spécialiste