Obésité : un facteur de transcription impliqué dans la survenue de complications métaboliques

Publié le 07/05/2015

Crédit photo : S. TOUBON

Une étude réalisée par Nicolas Venteclef, chargé de recherche INSERM, et Irina Udalova, de l’Université d’Oxford (Royaume-Uni), suggère que le système immunitaire influence directement le stockage des adipocytes dans la région viscérale, ceci via le facteur de transcription IRF5. Leurs résultats sont parus dans la revue « Nature Medicine ».

IRF5 « chef d’orchestre de l’activation » des macrophages

Cela fait une dizaine d’années que les chercheurs soupçonnent que l’obésité est liée à un état inflammatoire. « Cet état inflammatoire chronique pourrait jouer un rôle fondamental dans le développement des pathologies métaboliques associées », notent les auteurs dans leur étude. En effet, lors d’une prise de poids, le tissu adipeux se développe soit dans la région viscérale – on parle alors d’obésité androïde, qui peut s’accompagner d’une insulinorésistance –, soit au niveau sous-cutané, donnant lieu à une obésité dite gynoïde. Or, une précédente étude de 2014, réalisée par l’équipe de Nicolas Venteclef et de Karine Clément avait montré que, dans l’obésité viscérale, « un dialogue inflammatoire et pro-diabétogène s’opère entre les macrophages et les lymphocytes du tissu adipeux », menant à des complications métaboliques délétères que l’on ne retrouvait pas chez les patients atteints d’obésité gynoïde, pour qui le risque de développer ces complications était réduit. « Il est donc crucial de déchiffrer les différentes facettes de l’inflammation pour mieux appréhender les pathologies multifactorielles associées à l’obésité, comme le diabète de type 2 », souligne l’équipe. La caractérisation des macrophages a permis à l’équipe d’identifier le facteur de transcription IRF5 comme « chef d’orchestre de l’activation » des cellules de l’immunité.

Reprogrammation du tissu adipeux

Afin de démontrer le rôle prépondérant de l’IRF5 dans l’obésité et le diabète de type 2, les chercheurs ont séparé une centaine de souris en deux groupes : un groupe contrôle et un groupe où le facteur de transcription était désactivé dans les macrophages des adipocytes. Ils ont ensuite soumis l’ensemble des souris à un régime riche en lipides, pendant 12 semaines.

Les résultats montrent que les souris dépourvues d’IRF5 ont développé une obésité gynoïde sans complications métaboliques, contrairement au groupe contrôle exprimant IRF5. « Le décodage des mécanismes moléculaires et cellulaires a permis de révéler une importante reprogrammation de l’inflammation du tissu adipeux intra-abdominale en l’absence d’IRF5, contribuant à limiter son expansion », note l’équipe. L’absence d’IRF5 a entraîné une réponse immunitaire « anti-inflammatoire » des macrophages M2 et des lymphocytes TH2, conduisant à un « remodelage tissulaire », freinant l’expansion du tissu adipeux viscéral au profit du tissu adipeux sous-cutané.

« Les chercheurs ont toujours démontré que les cellules immunitaires inflammatoires étaient délétères. Or dans l’étude, on s’aperçoit qu’en changeant le phénotype de ces cellules d’une manière spécifique, on est capable de redistribuer l’accumulation de graisse dans le corps. Cela montre qu’on commence à comprendre le rôle des fonctions immunitaires dans le cadre des maladies métaboliques », a expliqué Nicolas Venteclef au « Quotidien ». Le chercheur précise que l’étude rentre dans le cadre de la recherche translationnelle, l’observation effectuée chez la souris est « transposable chez l’homme ». La prochaine étape de l’équipe sera d’étudier la suractivation d’IRF5 dans les complications du diabète « de type athérosclérose, rétinopathie diabétique et également plusieurs complications rénales comme la fibrose », conclut Nicolas Venteclef.

Sophie Martos

Source : lequotidiendumedecin.fr