Vitamine D et oméga-3

Pas utiles pour le cœur, ni contre le cancer

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Publié le 31/01/2019
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vitamine D

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Crédit photo : Phanie

La vitamine D est indispensable pour une bonne « santé osseuse ». La question de bénéfices extra-osseux est largement débattue dans la littérature médicale depuis une quinzaine d'années. Le débat n'est toujours pas tranché sur certaines actions (muscle, système immunitaire…). La présence de récepteurs de la vitamine D s'est avérée associée au cancer et aux maladies cardiovasculaires. Des études d'observation suggèrent une relation entre de faibles niveaux de 25-hydroxyvitamine D et un risque accru de cancer ou de maladie cardiovasculaire. Ces associations mises en évidence dans des études épidémiologiques ou rétrospectives sont toujours sujettes à caution d'un point de vue méthodologique et il est important de regarder les résultats d'études d'intervention sur le modèle d'essais randomisés contre placebo.

C'est ce qui a été proposé aux États-Unis par une large équipe d'investigateurs dans l'essai VITAL (Vitamin D and Omega-3 Trial) dont les données ont fait l'objet de deux articles publiés dans un récent numéro du New England Journal of Medicine.

Cet essai randomisé, contrôlé contre placebo, a évalué le cholécalciférol à la dose de 2 000 UI/jour et les acides gras oméga-3 à la dose de 1 g/jour pour la prévention des maladies cardiovasculaires et du cancer chez les hommes de plus de 50 ans et les femmes de plus de 55 ans. Près de 26 000 participants ont été répartis dans 4 bras équilibrés de randomisation : vitamine D + oméga-3 ; vitamine D + placebo ; oméga-3 + placebo ; placebo + placebo. La durée médiane de suivi était de 5,3 ans. Les critères de jugement principaux étaient les événements cardiovasculaires majeurs (critère composite comportant infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral ou décès d'origine cardiovasculaire) et les cancers invasifs de tous types.

Une absence de bénéfice sur le risque cardiovasculaire et de cancer

Dans le premier article, la comparaison est faite entre les deux groupes sous vitamine D et les deux groupes recevant le placebo de vitamine D (1). Aucune différence significative n'est observée pour les événements cardiovasculaires majeurs (rapport de risque 0,96 ; IC 95 % [IC] 0,86 à 1,08), l'infarctus du myocarde (0,96 ; IC 0,78 à 1,19), les accidents vasculaires cérébraux (0,95 ; IC 0,76 à 1,20) et les décès dus à des causes cardiovasculaires (1,11 ; IC 0,88 à 1,40).

Un cancer a été diagnostiqué chez 1 617 participants, sans différence entre les groupes vitamine D (n = 793) et placebo (n = 824), avec un rapport de risque de 0,96 (IC 0,88 à 1,06) tous types de cancers confondus. Aucune différence n'a été constatée entre les deux groupes concernant la mortalité par cancer, ni l'incidence quel que soit le type de cancer (sein, prostate, colorectal). Dans l'analyse des décès toutes causes confondues (978 décès), le rapport de risque était de 0,99 (IC 0,87 à 1,12). La tolérance globale était bonne, sans risque d'hypercalcémie ou d'autres événements indésirables.

Dans la seconde partie, la comparaison porte sur les deux groupes recevant les acides gras oméga-3 et les groupes avec le placebo correspondant (2). De la même façon, il apparaît que le supplément en acides gras oméga-3 ne diminue pas l'incidence d'événements cardiovasculaires majeurs ou de cancer par comparaison à celle du placebo.

Concernant la vitamine D, ces données confirment celles d'un précédent essai d'intervention réalisé en Nouvelle-Zélande et publié en 2017, l'essai VIDA, dans lequel un supplément à forte dose (100 000 UI/mois) ne diminuait pas non plus l'incidence des événements cardiovasculaires majeurs (3), pas plus d'ailleurs que l'incidence des chutes ou des fractures non vertébrales (4).

Ces données ne remettent pas en cause la nécessité de vérifier le statut vitaminique D de nos patients et de le corriger lorsqu'il est insuffisant. Il faut cependant être conscient de l'absence d'efficacité du supplément en vitamine D seul sur les événements cliniques cardiovasculaires, néoplasiques… ou fracturaires.

Hôpital Lariboisière, Paris
(1) Manson JE et al. Vitamin D supplements and prevention of cancer and cardiovascular disease. N Engl J Med 2019;380:33-44.
(2) Manson JE et al. Marine n-3 fatty acids and prevention of cardiovascular disease and cancer. N Engl J Med 2019;380:23-32
(3) Scragg R et al. Effect of Monthly High-Dose Vitamin D Supplementation on Cardiovascular Disease in the Vitamin D Assessment Study : A Randomized Clinical Trial. JAMA Cardiol 2017;2:608-16
(4) Khaw KT et al. Effect of monthly high-dose vitamin D supplementation on falls and non-vertebral fractures: secondary and post-hoc outcomes from the randomised, double-blind, placebo-controlled ViDA trial. Lancet Diabetes Endocrinol 2017;5:438-47

Pr Philippe Orcel

Source : lequotidiendumedecin.fr