Un outil développé pendant le confinement

Succès d’une plateforme numérique pour l’obésité

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Publié le 29/10/2021
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La plateforme collaborative obésité (PCO) propose un accompagnement pluridisciplinaire, numérique et gratuit à toute personne en surpoids ou en situation d’obésité en France. Pour certains patients, c’est une porte d’entrée dans le parcours de soins.
Près de 6000 personnes se sont connectées

Près de 6000 personnes se sont connectées
Crédit photo : phanie

Durant le premier confinement, en mars 2020, la pandémie de Covid a provoqué l’arrêt des soins et des activités en présentiel pour un bon nombre de patients, dont ceux qui étaient atteints d’obésité. « Nous avions l’impression d’abandonner nos patients. Nous ne leur proposions plus de rendez-vous, ni de programmes d’éducation thérapeutique (ETP). Les patients étaient perdus, angoissés. D’autant qu’ils savaient qu’ils étaient plus à risque que la population générale de faire une forme grave de Covid. Avec des professionnels impliqués dans la prise en charge de l’obésité, issus de différentes régions de France et travaillant à l’hôpital public ou privé ou dans le milieu associatif, nous avons décidé de mettre en place une plateforme numérique pour les patients en surpoids ou obèses, quel que soit leur lieu de résidence en France », a expliqué la Pr Monique Romon, médecin nutritionniste, présidente de l’association Resto, lors d’un colloque organisé par la Société Française de Nutrition.

Des séances d’ETP en direct, par visio

L’objectif premier de la plateforme était d’aider les patients à gérer leur stress et à maîtriser leur comportement alimentaire. De fait, se retrouver seul, confiné chez soi, face à son réfrigérateur et sans activité physique n’était pas idéal. « Notre plateforme visait également à rompre l’isolement via des groupes de parole, des conférences, des ateliers de cuisine, des vidéos et des informations délivrés via Zoom », détaille la Pr Romon. Concrètement, chaque patient pouvait créer son propre planning pour la semaine, en choisissant parmi les activités proposées : art-thérapie, soutien psychologique, cuisine, sophrologie, activité physique… « L’intérêt de la plateforme en visio, c’était que tous les patients pouvaient se voir et effectuaient l’activité ensemble, alors même qu’ils étaient chez eux. Cela leur a permis de tisser des liens, d’échanger après les ateliers. Une fois déconfinés, certains se sont même rencontrés alors qu’ils habitaient dans des régions différentes », confie la Pr Romon.

Une efficacité similaire au présentiel

À la fin du confinement, le retour des patients a été très positif. Près de 6 000 personnes se sont connectées. « Certains patients, éloignés des soins pour diverses raisons (déserts médicaux, perte de mobilité…), ont découvert ce type d’accompagnement grâce au digital. Pour eux, cela a été une manière d’entrer dans le parcours de soins. Nous avons également mené une étude montrant que notre programme d’ETP délivré en virtuel est aussi efficace (en termes de modification du comportement) que nos séances de groupe en présentiel », précise la Pr Romon.

L’initiative s’est poursuivie : actuellement, les activités de cette plateforme sont accessibles à tous les patients obèses ou en surpoids, en France. « Le projet s’est structuré et nous avons maintenant recours à une plateforme professionnelle intitulée Barnabé (1). Le projet porte aussi un nouveau nom, Fabrikt@sante », précise la Pr Romon.

L’ETP à distance présente, toutefois, un désavantage de taille. « Les patients s’inscrivant sur la plateforme ont un niveau socioculturel supérieur à l’ensemble de nos patients. Or, un grand nombre de personnes en situation d’obésité sont issues de milieux socio-éducatifs modestes : ils ne sont pas à l’aise avec les outils digitaux. Et lorsqu’ils résident dans des déserts médicaux, ils sont largement défavorisés. Nous avons comme projet d’accompagner ces patients vers le digital, avec les centres sociaux et les associations qui sont nos partenaires habituels. Il s’agit d’essayer de les sortir de cette "fracture numérique" par le biais du soin », espère la Pr Romon.

(1) www.barnabe.io

Hélia Hakimi Prévot

Source : lequotidiendumedecin.fr