Sauvetage de membres chez la souris

Thérapie mixte contre ischémie

Publié le 02/12/2009
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L’ISCHÉMIE INDUIT normalement la production de cytokines responsables d’un « sprouting » (un des mécanismes clefs de l’angiogenèse) et d’une artériogenèse (remodelage vasculaire). Dans le cas particulier de l’ischémie des membres, on observe chez la souris une mobilisation des cellules BMDAC, qui assurent la reperfusion et le sauvetage des membres. L’activité du HIF–1 alpha, un facteur de transcription modulant l’adaptation à l’ischémie, diminue avec l’âge, ce qui se traduit par un affaiblissement des réponses angiogéniques, secondaire à un défaut de mobilisation des BMDAC.

Une option thérapeutique pour restaurer l’adaptation à l’ischémie repose sur une thérapie génique HIF–1 alpha par adénovirus (AdCA5). Mais parce que la thérapie génique n’a pas d’impact sur l’anomalie fonctionnelle des BMDAC, des Américains ont imaginé y associer l’administration de cellules BMDAC afin que l’induction du facteur HIF–1 dans ces cellules favorisent leur intégration au niveau des tissus ischémiés.

Ligature de l’artère fémorale.

Des souris ont été traitées après la création d’une ischémie par ligature unilatérale de l’artère fémorale. L’administration intramusculaire d’une thérapie génique seule, aussitôt après la ligature, accroît l’indice de perfusion des membres LPR (rapport du débit sanguin dans le membre ischémié sur le débit dans le membre non ischémié) chez les jeunes souris mais non chez les rongeurs âgés. L’association, à la thérapie génique AdCA5, de l’administration intraveineuse de BMDAC (cultivées ex vivo sur DMOG, une molécule qui accroît la survie des cellules), 24 heures après l’induction de l’ischémie, donne des résultats bien différents.

D’une part, le traitement combiné induit une augmentation significative du LPR maximum chez les souris jeunes par rapport au traitement par seul AdCA5. D’autre part, le même effet supérieur sur la perfusion est observé chez les souris âgées, chez qui l’association permet également de réduire les scores d’altérations motrices. Surtout, cette approche thérapeutique permet d’augmenter de manière significative le sauvetage du membre ischémié (33 % dans le groupe AdCA5 + BMDAC vs 0 % dans le groupe contrôle ou dans le groupe AdCA5 seule, p = 0,035).

Les auteurs pensent que l’action bénéfique de l’association, à la thérapie génique, de l’administration de BMDAC traitées par le DMOG pourrait s’expliquer par une meilleure rétention des cellules angiogéniques au site de l’ischémie, grâce à leur pré-traitement par le DMOG, qui induit une augmentation de l’expression des bêta 2-intégrines, médiatrices de l’adhésion des BMDAC aux cellules endothéliales. L’effet bénéfique du DMOG était, en effet, aboli par la co-administration d’un inhibiteur de l’HIF-1 ou par la pré-incubation avec un anticorps bloquant les bêta 2-intégrines.

Ces résultats montrent donc que l’association de la thérapie génique AdCA5 à l’administration de cellules angiogéniques dérivées de la moelle osseuse traitées par le DMOG permet d’accroître, de manière synergique, les chances de récupération après la création d’une ischémie chez la souris, prévenant ainsi la nécrose tissulaire. Cette action s’explique au moins en partie par la capacité de la thérapie génique à accroître l’intégration initiale des BMDAC, tandis que le traitement des cellules angiogéniques par le DMOG améliore, de son côté, le maintien des cellules de recrutement au niveau du site de l’ischémie.

Il reste maintenant à évaluer la faisabilité d’une telle stratégie thérapeutique dans l’ischémie des membres du sujet âgé, en déterminant les doses adéquates de vecteur adénoviral et de cellules BMDAC à administrer.

S. Rey et coll. Proc Natl Acad Sci USA (2009) Publié en ligne.

Dr BERNARD GOLFIER

Source : lequotidiendumedecin.fr