À Paris, un centre pour dépister les hétérozygotes

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Publié le 17/06/2022
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Le centre d'information et de dépistage de la drépanocytose est ouvert au grand public, sans rendez-vous et sans ordonnance.
Le centre reçoit un nombre croissant de jeunes sensibilisés via les réseaux sociaux

Le centre reçoit un nombre croissant de jeunes sensibilisés via les réseaux sociaux
Crédit photo : Phanie

En termes de prévention, il est primordial de dépister les adultes hétérozygotes à risque de donner naissance à un enfant malade. C'est la raison d'être du centre d'information et de dépistage de la drépanocytose (Cidd), installé dans le 13e arrondissement de Paris.

Historiquement, le centre a ouvert ses portes en 2006, sous l'impulsion du Pr Gil Tchernia (neveu de Pierre Tchernia, mais surtout hématologue très investi dans la lutte pour la santé des populations migrantes de l'hôpital du Kremlin-Bicêtre, AP-HP). Son but : proposer un dépistage au grand public, sans rendez-vous et sans ordonnance. « Nous recevons beaucoup de personnes qui se posent des questions, souvent à la suite d'un diagnostic dans leur famille », explique au « Quotidien » la Dr Assa Niakate-Tall, médecin responsable du centre de vaccination Bertheau, au sein duquel elle s'occupe plus particulièrement du Cidd. Dans deux tiers des cas, c'est la naissance d'un enfant porteur sain ou malade qui déclenche la demande de consultation. Depuis un an, le centre reçoit un nombre croissant de jeunes sensibilisés via les réseaux sociaux.

Près de 400 consultations par an

Les quelque 800 usagers (couples, individus, familles) qui se présentent chaque année peuvent bénéficier d'un prélèvement sanguin pour l'analyse gratuite et sans ordonnance de l'hémoglobine. « Les résultats sont toujours remis dans le cadre d'un entretien médical, poursuit la Dr Niakate-Tall. C'est important, car il y a des informations concernant le risque de transmission génétique, dont il faut impérativement s'assurer qu'elles ont été bien comprises. Si le patient est mineur, il faut veiller à ce que l'information lui soit rappelée quand il est en âge d'être lui-même parent. » Dans certains cas, les informations sont transmises au médecin généraliste qui se chargera de la consultation d'annonce. Le Cidd, à ce titre, a tissé des liens étroits avec les omnipraticiens du nord de Paris. Au terme de deux ans de réflexion plutidisciplinaire, une annexe a été ouverte dans le 18e arrondissement parisien en 2016.

À l’issue de la consultation, les personnes hétérozygotes formant un couple à risque partent avec les coordonnées de la consultation génétique où se faire suivre en cas de nouveau projet parental. « On les informe des modalités d'accès au diagnostic anténatal à chaque grossesse, ce qui est autorisé pour la drépanocytose, ainsi que de la possibilité d'interruption médicale de grossesse », détaille la Dr Niakate-Tall. Régulièrement, les médecins du centre diagnostiquent des syndromes drépanocytaires composites SC, Sß+ ou Sß0 (cf. encadré page 11). Ces formes hybrides, peu symptomatiques, supposent une prise en charge particulière. « Il nous arrive aussi de recevoir des gens qui se savent malades, mais qui arrivent en France sans dossier médical. Nous leur en constituons un avant de les orienter vers les centres de référence », complète la médecin.

La problématique des migrants précaires

Depuis quelques années, les médecins du Cidd répondent à une demande croissante et récente de dépister les hétérozygotes au sein des populations migrantes précaires.

« Nous articulons, pour les migrants, le dépistage de la drépanocytose avec celui de la tuberculose et avec la vaccination dans le cadre de permanences médico-sociales, précise la Dr Niakate-Tall. Selon la situation, le bilan d'arrivée comprendra une étude de l'hémoglobine, une radio thoracique et une sérologie pour vérifier que le patient est bien vacciné. »

Le centre sert également de point d'information et de formation destiné aux associations et aux professionnels de santé (agents de la ville, PMI). « Finalement, la prévention représente 80 % de notre activité, estime la Dr Niakate-Tall. D'ailleurs, depuis 2014, nous avons mis en place une consultation voyageur drépanocytaire : les sites hospitaliers de référence qui n'ont pas de consultation internationale m'envoient les patients. » (cf. encadré)

D. C.

Source : Le Quotidien du médecin