Feuille de route Alzheimer, Parkinson, SEP : les associations restent sur leurs gardes

Par
Publié le 02/07/2021
Article réservé aux abonnés
Depuis la fin du plan maladies neurodégénératives 2014-2019, les associations en espèrent un nouveau. La feuille de route publiée le 2 juin ne les satisfait qu'à moitié. Un collectif* s'en est ému auprès du ministère de la Santé dans une lettre ouverte.
La feuille de route prévoit une version  enrichie en 2023-2024

La feuille de route prévoit une version enrichie en 2023-2024
Crédit photo : Phanie

Un nouveau plan était attendu, ce sera une feuille de route pour 2021-2022. Les associations œuvrant dans le champ de la maladie de Parkinson, la maladie l'Alzheimer et la sclérose en plaques (SEP) − les trois pathologies couvertes par le précédent plan maladies neurodégénératives (MND) − lui réservent un accueil mitigé, même si cette feuille de route est présentée comme une transition vers une version enrichie pour 2023-2024.

Dans une lettre ouverte au ministère, les associations font part de leurs « inquiétudes concernant les questions centrales qui demeurent sans réponse, en particulier la définition d'un budget à la hauteur de l'enjeu et d'un calendrier défini et opposable ».
Troisième plan inabouti

Cet « entre-deux » est diversement apprécié par les parties prenantes comme l'exprime Benoît Durand, directeur délégué de France Alzheimer : « Nous avons eu trois plans depuis 2004, dont le plus important était celui de 2008 à 2012, rappelle-t-il. Le dernier plan n'était pas abouti et doit faire l'objet d'une continuation à laquelle la feuille de route répond en partie, mais seul un nouveau plan aurait une ambition suffisante ».

Un avis partagé par Amandine Lagarde, vice-présidente de l'association France Parkinson : « Notre ressenti est en demi-teinte », juge-t-elle. Si elle estime qu'un certain nombre de mesures vont dans le bon sens, elle regrette l'absence, à ce stade, d'un nouveau plan MND.

« Cette feuille de route ne répond pas à l'enjeu de l'autonomie à domicile qui va monter d'ici à 2022 », estime pour sa part la présidente de l'Association française des sclérosés en plaques (Afsep), Jocelyne Nouvet-Gire. « Il y a aussi la question de l'accueil des personnes qui ne peuvent ou ne veulent pas se maintenir à domicile, poursuit-elle. Nous avons créé cinq structures de 46 lits, mais plus de 1 000 personnes auraient besoin d'une place ».

La feuille de route se décompose en dix axes, dont certains sont plus détaillés que d'autres. Ainsi, il est d'ores et déjà prévu, au titre de l'axe 2 (meilleure réponse dans les situations de rupture de parcours par troubles psycho-comportementaux), de financer cinq nouvelles unités cognitivo-comportementales, en complément des 25 déjà existantes. D'autres mesures dépendent des arbitrages faits dans d'autres contextes, comme celui de la réforme du grand âge et autonomie.

Les associations regrettent que la feuille de route soit suspendue à une loi ou à un programme encore en discussion. « On a très peu de visibilité sur le contenu de la loi grand âge et sur la période à laquelle elle va arriver », explique Lorène Gilly, responsable du suivi des politiques publiques chez France Alzheimer.

Améliorer les conditions d'hospitalisation

Un des axes prioritaires de la feuille de route est l'amélioration des conditions d'hospitalisation. « L'hospitalisation constitue souvent une rupture dans le parcours de soins », explique Amandine Lagarde. France Parkinson fait remonter des situations où les médicaments sont confisqués aux patients pour des raisons de sécurité. « Les patients connaissent l'importance de l'observance et de la prise médicamenteuse en temps et en heure, affirme Amandine Lagarde. Il n’y a pas de volonté de maltraitance, mais les protocoles de sécurité doivent être changés. »

L'accueil aux urgences est aussi un sujet qui attire l'attention des associatifs. « Il est compliqué, pour ces malades, de décrire leurs symptômes, abonde Benoît Durand. On a aussi des risques de dénutrition chez les personnes qui ne peuvent que difficilement expliquer leurs difficultés motrices ou leurs douleurs dentaires. »

Décloisonner sanitaire et médicosocial

En revanche, les associations sont satisfaites qu'un axe de la feuille de route soit consacré aux jeunes. « Entre 10 et 15 % des malades de Parkinson sont confrontés à des problématiques de maintien dans l'emploi, justifie Amandine Lagarde. Il y a aussi les problèmes de prêts bancaires et de mutuelles… Il faut également fournir des moyens à la médecine du travail. »

Pour France Parkinson, un axe important d'amélioration de la prise en charge passe par la médecine de ville. L'association mise beaucoup sur les infirmières en pratique avancée, notamment pour rendre l'éducation thérapeutique moins hospitalo-centrée.

« On est vigilant sur le décloisonnement entre le sanitaire et le médicosocial, renchérit Benoît Durant. Il y a des nouveaux actes à trouver, pathologie par pathologie. Nous sommes aussi vigilants sur la réforme de l'allocation personnalisée d'autonomie et sur le reste à charge des familles ». Pour le transfert de tâches vers la ville, Jocelyne Nouvet-Gire émet des réserves : « Les infirmières qui interviennent à domicile ne sont pas assez nombreuses. Leur donner des missions supplémentaires ne fera que surcharger des professionnels de santé qui n'ont déjà pas assez de temps pour faire du nursing. »

*APF Handicap France, France Alzheimer, Ligue française contre la sclérose en plaques, Unisep et France Parkinson

D.C.

Source : Le Quotidien du médecin