Prise en charge de l’obésité chez l’adolescent

La relation de confiance avant tout

Publié le 28/10/2013
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Crédit photo : S TOUBON

LE NOMBRE d’adolescents obèses ne cesse de croître. Une augmentation en grande partie liée à l’évolution des modes de vie, en particulier de l’alimentation mais aussi de l’image corporelle qui est véhiculée par notre société. Cette poursuite de l’idéal minceur, qui touche de nombreuses adolescentes, peut rapidement déboucher sur des problèmes d’anorexie où à l’inverse sur une obésité réelle et durable suite au cercle vicieux infernal des régimes excessifs et inappropriés.

Médecin traitant.

Le médecin traitant est alors en première ligne. Il doit être à écoute de ces jeunes filles sans surpoids mais insatisfaites de leur image corporelle et en quête de régimes. Il est essentiel que ces adolescentes aient un aperçu des normes de la courbe de corpulence au fil des ans, comprennent qu’un certain « embonpoint » est physiologique à l’âge de 14-16 ans et que des régimes inappropriés peuvent avoir des conséquences dramatiques car pouvant entraîner des perturbations durables, dont un surpoids, qui seront plus difficiles à résoudre ultérieurement. Il n’est, en général, pas nécessaire de faire appel à un psychologue sauf si des troubles du comportement alimentaire sont suspectés.

Un soutien technique et psychologique tout au long de la mise en place des nouvelles habitudes alimentaires.

En cas d’excès de poids réel, une relation de confiance doit s’instaurer entre les professionnels de santé, médecin ou diététicien, et l’adolescent car s’agissant d’une maladie chronique, la « route » va être longue pour atteindre l’objectif. La consultation ne doit pas être anxiogène face à un adolescent dont le surpoids a déjà entraîné une souffrance relationnelle importante avec perte de l’estime de soi et de son corps. La première étape consiste en la formulation avec l’adolescent des différentes étapes de sa vie pour mettre en exergue les éléments qui ont conduit à la prise de poids tels que des événements douloureux, des problèmes familiaux ou des comportements alimentaires inappropriés.

Une obésité d’ordre familial doit aussi être recherchée notamment lorsqu’une partie de la fratrie présente aussi un excès de poids. Il s’agira ensuite d’établir « un projet » personnalisé qui sera mené sur le long terme avec le soutien constant du praticien et de la famille car la perte de poids est difficile et longue à obtenir.

Comportements pulsionnels.

L’objectif de ce projet consiste à aider l’adolescent à analyser et gérer ses vrais besoins alimentaires et à lutter contre les comportements pulsionnels qu’il a développés pour tenter de combler des manques où de satisfaire des émotions. L’adolescent doit toujours se poser ces questions simples : « Est-ce que j’ai vraiment faim ? », « Est-ce nécessaire que je reprenne de ce plat-là ? », « Est-ce nécessaire que je me serve aussi largement ? », « Pourquoi grignoter devant la télé ? ». En effet, l’obèse envisage souvent la nourriture à d’autres fins que celles de satisfaire ses besoins alimentaires. La prise de conscience doit être familiale avec une « rééducation alimentaire » qui s’adressera à toute la famille pour éviter d’isoler l’adolescent, ce qui risquerait de majorer la mauvaise estime de soi. On évitera toujours les régimes stricts et arbitraires et les propos accusateurs suite à d’éventuels écarts ou reprises de poids.

L’hospitalisation n’est pas la règle sauf en cas d’insulino-résistance ou d’autres pathologies graves associées. Dans certains cas, il peut être opportun d’envisager une « rupture » familiale dans des établissements spécialisés.

La prise en charge est d’autant plus facile qu’elle est faite précocement. Pour le Dr Jean-Michel Lecerf, elle est réussie quand « on observe une stabilisation puis une inversion du poids sans retour à un système fluctuant "type yoyo" et lorsque l’adolescent se sent mieux dans son corps, a appris à gérer ses besoins grâce aux signaux du corps et reprend des habitudes alimentaires sans frustration ni culpabilité ».

 Dr ISABELLE STROEBEL

Source : Le Quotidien du Médecin: 9275