Poursuivre une alimentation spécifique jusqu'à 3 ans

L'intérêt du lait de croissance

Publié le 14/03/2016
Article réservé aux abonnés
L'intérêt du lait de croissance

L'intérêt du lait de croissance
Crédit photo : Phanie

Dès l'âge de 12 mois, un grand nombre d'enfants reçoivent une alimentation similaire à celle d'un adulte, mais en plus petite quantité. C'est ce que révèle l'enquête Nutri-Bébé (1) qui a analysé, dans le détail, l'apport nutritionnel des enfants de 0 à 3 ans. En effet, jusqu'à 11 mois, l'alimentation de l'enfant est essentiellement composée d'aliments spécifiques et de fait-maison. Mais dès le 12e mois, une rupture se produit, marquée par l'augmentation massive de produits industriels non spécifiques. Ainsi, les plats cuisinés industriels non adaptés à l'enfant sont consommés à 54 %, dès 12 mois et à 76 %, dès 18 mois. Quant aux pommes de terre en friture, elles concernent 48 % des enfants dès 12 mois et 76 % dès 18 mois. De même, la consommation de biscuits, gâteaux et viennoiseries passe de 35 % dès 8/11 mois à 81 % chez les 12/23 mois. « Entre 1 et 3 ans, l'enfant gagne 40 % de sa taille adulte et 3 centimètres de périmètre crânien. Il a donc des besoins spécifiques, en terme de qualité, mais aussi, de quantité. Une alimentation non adaptée à cet âge peut avoir un impact sur la santé à l'âge adulte », souligne le Dr Bellaïche, pédiatre spécialisé en nutrition infantile à l'hôpital Robert Debré, à Paris.

Trop de protéines et de sodium


Chez les enfants de 15 jours à 3 ans, l'étude Nutri-Bébé met également en exergue une consommation excessive de protéines. A 3 ans, les apports sont 4 fois plus que nécessaires avec 42,2 g/l consommés contre 11,5 g/l recommandés par l'Autorité européenne pour la sécurité des aliments (EFSA). L'apport en sodium est également trop élevé (2 g par jour de 18 mois à 3 ans), soit trois fois plus que le maximum recommandé par l'EFSA chez 24/29 mois. « Or l'excès de sel sollicite de façon excessive la fonction rénale. Les études montrent que les enfants de 12 à 23 mois, consommateurs de laits de croissance ont des apports moyens en sodium et protéines, bien plus faibles (que les non-consommateurs) et adaptés à leurs besoins nutritionnels. Exemple : un enfant consommant 500 ml de lait de vache par jour, 25 g de viande à midi et le soir, et 100 g de formage blanc au goûter a un apport protéique trop important de 37 g par jour. Le même régime, associé à 500 ml de lait de croissance (à la place du lait de vache), réduit cet apport protéique de 25 g par jour », indique le Dr Bellaïche.

Des apports insuffisants en fer et lipides


L'étude Nutri-Bébé révèle, par ailleurs, l'insuffisance des apports en fer à partir de 12 mois et surtout, après 24 mois. Entre 12 et 24 mois, 45-55 % des enfants ont des apports en fer inférieurs aux recommandations. Entre 24 et 36 mois, 74-77 % des enfants ont des apports en fer insuffisants. « Des travaux diligentés par le Pr Patrick Tounian (pédiatre à l'hôpital Trousseau) indiquent qu'entre 1 et 3 ans, les apports recommandés en fer ingérés sont au alentours de 4 mg/j (soit 0,7 mg/j de fer absorbés). Pour atteindre cet objectif, l'enfant devrait consommer 1 kg d'épinards par jour, un poisson d'un demi kg et 41 litres de lait de vache alors que 360 ml de lait de croissance suffisent à atteindre ces besoins nutritionnels en fer. Par ailleurs, il est aujourd'hui prouvé que la carence en fer chez l'enfant en bas âge, peut entraîner une anémie, une susceptibilité accrue aux infections, mais aussi des anomalies du développement cognitif (troubles de l'attention, hyperactivité...) », précise le Dr Bellaïche.
Après 2 ans, 72 % des enfants ont des apports lipidiques, notamment en acide alpha-linoléique (AAL) inférieurs aux recommandations françaises. « Or, les acides gras essentiels sont indispensables à la construction et au développement du système nerveux (cerveau, notamment). Les enfants âgés de 12 à 23 mois consommant du lait de croissance reçoivent, pour leur part, 77 % d'apports en plus d'acide linoléique et 71 % en plus d'AAL que les autres », conclut le Dr Bellaïche.

 

D'après un entretien avec le docteur Marc Bellaïche, pédiatre spécialisé en nutrition infantile à l'hôpital Robert Debré (Paris)

(1) Le volet consommation de l'étude Nutri-bébé (conduite par le Crédoc pour le secteur des aliments de l'enfance) a été mené en 2013 auprès de 1188 enfants de 0 à 3 ans (échantillon représentatif de la population française). Il repose sur l'analyse de carnets de consommation : les consommations des enfants ont été renseignées par les mères sur 3 jours

Hélia Hakimi-Prévot

Source : Nutrition