Patient traité par anticoagulant

Que faire quand l’INR est très instable ?

Publié le 26/10/2010
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Fluctuations

Les anti-vitamines K (AVK) sont actuellement indiquées dans la prévention des emboles artériels dans le cadre d’une arythmie cardiaque par fibrillation auriculaire, la prévention du développement d’un thrombus chez un patient porteur d’une valve mécanique et la prévention secondaire du développement d’une thrombose ou d’une embolie pulmonaire chez un patient ayant une maladie thromboembolique veineuse à la phase aiguë comme à la phase chronique.

Tout au long de la prise d’un AVK, les patients ne restent pas dans la zone dite thérapeutique. En effet, on note des fluctuations constantes de l’INR. Certains patients passent en effet plus de 40 % du temps en dehors de la zone thérapeutique définie préalablement. Différents facteurs peuvent influencer la fluctuation de l’INR :

- des facteurs médicamenteux, les plus fréquents étant la prise d’antiinflammatoires non stéroïdiens, de médicaments antifongiques, d’antibiotiques, de statines. Il apparaît donc raisonnable de proposer aux patients de contrôler leur INR 48 heures après toute modification thérapeutique significative même la simple prise de cuillère mesure d’antifongique ;

- les fluctuations qualitatives et quantitatives de l’alimentation sont elles aussi associées à une modification de l’INR. L’apport de vitamine K est inversement corrélé au taux d’INR. En effet, les aliments riches en vitamine K (choux-fleurs, brocolis, épinards…), pris en quantité excessive, de façon ponctuelle, vont bien sûr favoriser une baisse de l’INR. Pour autant, il ne faut pas interdire la consommation de ces aliments mais bien réguler leur prise, en favorisant une alimentation homogène.

En effet, les fluctuations de l’INR sont significativement associées à une augmentation du risque thromboembolique multiplié par 2 à 3 si l’INR est inf à 2 tandis que le risque de saignement est lui aussi significativement augmenté si l’INR dépasse 4,5.

Mesures

Les mesures à mettre en œuvre pour réduire les fluctuations d’INR comportent une éducation du patient visant à limiter l’automédication, à vérifier l’INR en cas de modification thérapeutique, à faire en sorte que l’apport en vitamine K dans l’alimentation soit homogène avec des fluctuations modérées. Le développement des cliniques d’anticoagulation a permis de réduire d’au moins 10 % le temps passé en dehors de l’INR cible. L’autocontrôle du taux d’INR par le patient pourrait être une solution pour réduire le risque thromboembolique tout comme le risque hémorragique (Heneghan C., et al. « Lancet » 2006 ; 367 : 404-11).

Il est donc nécessaire, à chaque consultation, d’évaluer le bénéfice à la poursuite d’une anticoagulation au long cours comparé au risque hémorragique estimé à 2 % par an. Par ailleurs il est important de garder à l’esprit que 10 % des saignements majeurs survenant chez les patients en prévention au long cours de la maladie thromboembolique veineuse entraînent leur décès.

C’est bien dans ces situations d’INR instable donc à haut risque de récidive ou d’accident hémorragique que les nouveaux anticoagulants oraux pourraient trouver leur place.

 Dr MARC LAMBERT Médecine interne CHRU Lille

Source : Le Quotidien du Médecin: 8844