Resaler systématiquement les plats augmente de 28 % le risque de mortalité prématurée

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Publié le 13/07/2022
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Crédit photo : PHANIE

Ajouter systématiquement du sel dans ses plats expose à un surrisque de mortalité, selon une vaste étude de cohorte publiée dans le « European Heart Journal ». Les scientifiques de l'université Tulane, à La Nouvelle-Orléans, ont collecté les données de plus 500 000 personnes inscrites dans la base de données UK Biobank.

Mesurer la quantité de sel consommée en moyenne dans une cohorte n'est pas une tâche facile. Les aliments vendus dans le commerce sont souvent déjà enrichis en sel, aussi la description de l'alimentation renseigne peu. Par ailleurs, certains aliments salés contenant des fruits et légumes sont aussi souvent riches en potassium qui a un effet protecteur vis-à-vis des maladies cardiovasculaires et du diabète. Une méthode efficace repose sur des tests urinaires, mais est difficile à mettre en place.

Sel de table

Pour toutes ces raisons, les auteurs se sont penchés sur une variable facile à mesurer, en demandant aux participants s'ils ajoutaient ou non du sel dans leurs plats. Selon les données de la littérature, le sel ajouté à table représente en effet, dans les pays occidentaux, 6 à 20 % du sel total consommé.

À l'inclusion, les participants devaient dire s'ils salaient leurs plats jamais ou très rarement, de temps en temps, régulièrement ou toujours. Les auteurs ont ensuite mesuré le taux de décès prématurés (définis par un décès survenant avant 75 ans) dans chacune de ces quatre catégories avec ajustement sur l'âge, le sexe, l'ethnie, l'indice de masse corporelle, le tabagisme, la consommation d'alcool, l'activité physique et les maladies chroniques préexistantes (diabète, cancer, pathologies cardiovasculaires). Les participants ont été suivis en médiane pendant 9 ans.

Un quart de risque en plus

En population générale, environ 3 personnes sur 100 meurent de façon prématurée. Comparés à ceux qui n'en ajoutent jamais, ceux qui ajoutent « toujours » du sel dans leur nourriture ont un risque de décès prématuré augmenté de 28 %. Les auteurs estiment qu'il y a un décès supplémentaire pour 100 habitants ayant une forte consommation de sel. À l’âge de 50 ans, les femmes qui salent toujours leur nourriture ont 1,5 an d'espérance de vie en moins et les hommes 2,28 ans par rapport à celles et ceux qui n’en ajoutent jamais.

« Ces données fournissent de nouvelles preuves en faveur des messages de santé qui préconisent une alimentation peu salée, expliquent les auteurs. Même avec une réduction modeste de l'apport en sodium, en évitant de poser une salière sur la table par exemple, il est possible d'obtenir des bénéfices significatifs en matière de santé publique, pour peu que toute la population adopte ce comportement. »

Les auteurs notent qu'une alimentation riche en fruits et légumes a tendance à diminuer le surrisque de décès lié à une forte consommation de sel, sans que l'effet ne soit significatif. Le phénomène mériterait d'être mieux étudié, est-il suggéré.

Message collectif versus individuel

Dans un éditorial accompagnant la publication des résultats, la Pr Annika Rosengren, de l'académie Sahlgrenska (université de Göteborg en Suède) rappelle prudemment que « l'effet exact, sur la santé d'un individu, d'une réduction drastique de son apport en sel, reste un sujet controversé. Compte tenu du fait qu'un régime très pauvre en sel peut ne pas être bénéfique, et même se révéler dangereux, il est important d'établir une distinction entre les recommandations à faire individuellement et les messages délivrés à l'échelle d'une population », insiste-t-elle.


Source : lequotidiendumedecin.fr