La prévalence de l’asthme croît après 60 ans

Les difficultés de diagnostic aussi

Publié le 09/12/2013
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LA FRÉQUENCE de l’asthme chez le sujet âgé atteint près de 10 % après l’âge de 70 ans. Comme l’a noté une enquête de l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé (IRDES), la prévalence de l’asthme diminue après 20 ans et ce jusqu’à 50 ans environ, puis croît de nouveau, en particulier après 60 ans (1). L’asthme est donc une pathologie fréquente du sujet âgé. Il est toutefois nécessaire de pas confondre asthme et broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO) dont la prévalence est aussi élevée à cet âge. Le diagnostic de BPCO est d’ailleurs difficile à distinguer de celui de la maladie asthmatique.

Outre sa fréquence accrue, l’asthme du sujet âgé est caractérisé par une mortalité accrue. La plupart des études se fondent sur les certificats de décès avec des données souvent imprécises. Pour LW Barger et coll. qui ont étudié la mortalité rapportée à l’asthme chez des patients hospitalisés pour exacerbation de la maladie, 85 % des décès surviennent chez des sujets de plus de 55 ans dont les trois quarts étaient connus pour être fumeurs ou anciens fumeurs (2). Par ailleurs, V. Bellia et coll. ont montré dans une étude portant sur 1 233 patients ambulatoires (› 65 ans) que la mortalité à 5 ans est de 24,3 % chez les asthmatiques contre 16,3 % chez les patients indemnes de cette pathologie, les facteurs de risque associés étant l’âge, le tabagisme et la dépression (3).

Retard de diagnostic.

Les raisons de cette mortalité accrue par asthme en gériatrie peuvent être une maladie moins contrôlée, un retard au diagnostic, des traitements inadaptés car volontiers moins agressifs ou moins bien utilisés (pour les dispositifs inhalés) ou encore une diminution de la perception de la dyspnée avec l’âge.

Sur le plan physiopathologique, l’hyperréactivité bronchique est plus fréquente chez le sujet âgé que dans la population générale en raison du vieillissement de l’appareil respiratoire, d’une exposition plus prolongée aux polluants, mais aussi d’une diminution des récepteurs ß2 des voies aériennes inférieures. L’ensemble de ces facteurs contribue à augmenter le risque de développer des symptômes respiratoires et de majorer le déclin annuel du VEMS, ainsi que d’accroître la mortalité.

Sur le plan clinique, l’asthme dans sa forme classique est relativement rare chez le sujet âgé et doit, lorsqu’il apparaît de novo, faire discuter un diagnostic différentiel (4).

La dyspnée de l’asthme vieilli et de l’asthme tardif est plus fréquemment continue, souvent difficile à équilibrer et parfois corticodépendante. Cette dyspnée peut être négligée par le sujet âgé lui-même, soit parce qu’il la considère comme normale pour l’âge, soit en raison d’une mauvaise perception.

Dans la mesure où l’association asthme - BPCO est fréquente chez le sujet âgé tabagique, il convient de rechercher (si possible) une réversibilité partielle du trouble ventilatoire obstructif aux EFR (gain en VEMS› 200 ml sous bêta-2-adrénergiques).

Sur le plan thérapeutique, la stratégie chez le sujet âgé est globalement superposable à celle du sujet jeune (4). Il est toutefois nécessaire de prendre en compte le risque d’ostéoporose en cas de corticothérapie au long cours, y compris pour les corticoïdes inhalés fortement dosés, le risque rythmique potentiel des bêta-2-adrénergiques, les effets neurologiques et cardiovasculaires de la théophylline. Dans les formes difficiles, le médecin peut avoir recours aux anticholinergiques et/ou aux antileucotriènes, voire dans certains cas aux anti-IgE.

* Avec le Dr Élisabeth Meyer-Popin et le Pr Vincent Jounieaux, Service de pneumologie et réanimation respiratoire, Hôpital Universitaire Sud, Amiens

(1) Afrite A, Allonier C, Com-Ruelle L, Le Guen N. L’asthme en France en 2006 : prévalence, contrôle et déterminants. IRDES 2011:1–122.

(2) Barger LW, Vollmer W, Felt RW : Further investigations into the recent increase in asthma death rates: a review of 41 asthma deaths in Oregon in 1982. Ann Allergy 1988 ; 60 : 31-6.

(3) Bellia V, Pedone C, Catalano F, Zito A, Davì E, Palange S, et al. Asthma in the elderly : mortality rate and associated risk factors for mortality. Chest 2007;132(4):1175–82.

(4) Radenne F, Verkindre C, Tonnel, AB. L’asthme du sujet âgé. Rev Mal Respir 2003;20:95–103.

Dr GERARD BOZET

Source : Le Quotidien du Médecin: 9287