Les troubles de la sexualité, principale plainte des patients

Publié le 27/03/2012
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Crédit photo : S TOUBON

L’EXCITATION sexuelle découle de deux phénomènes physiologiques : l’un mécanique, qui nécessite l’intégrité du centre médullaire sacré, et l’autre psychogène, qui nécessite l’intégrité du centre médullaire dorsolombaire.

Très schématiquement, dans la paraplégie haute et la tétraplégie, le centre sacré n’est généralement pas atteint. Chez l’homme, une érection mécanique peut être obtenue lors de masturbation ou de la toilette, d’assez bonne qualité mais ne permettant pas une pénétration. Chez la femme, même en cas de lésions hautes avec anesthésie complète des organes génitaux externes et internes, des sensations orgasmiques peuvent être ressenties à la pénétration profonde grâce à une innervation du fond du vagin par le nerf vague. Dans les lésions basses, la masturbation ne provoque pas d’érection de la verge ni du clitoris et le recours aux fantasmes est insuffisant.

Sexologues spécialisés.

Les troubles de la sexualité constituent l’une des principales plaintes des patients. Les conseils pour vivre une vie sexuelle et affective épanouie doivent être donnés en centre de rééducation fonctionnelle par des sexologues spécialisés, afin d’éviter le traumatisme d’un échec par manque d’information dans le couple installé ou un évitement de nouvelles rencontres.

Les femmes ont souvent peur de ne plus plaire. Elles peuvent ressentir du plaisir à la pénétration si le centre sacré n’est pas atteint. Le recours à un lubrifiant à l’eau est préconisé pour pallier l’absence ou l’insuffisance de sécrétions vaginales.

Les hommes sont en attente de retrouver des érections et des mesures efficaces doivent être proposées d’emblée : inhibiteurs de la phosphodiestérase de type V (80 % d’efficacité, non remboursés) et injections intracaverneuses de prostaglandines (PGE1) (95 % d’efficacité, remboursées).

Une érection peut également être obtenue par l’utilisation d’un vacuum, ou érecteur à dépression. Il s’agit d’un volumineux cylindre en verre où l’homme introduit son pénis. Grâce à une pompe qui établit un vide relatif, l’érection se produit. Cette technique efficace et non agressive nécessite la participation des deux partenaires. Elle peut être utilisée en alternance des injections intracaverneuses ou lors d’échec de prise médicamenteuse.

La mise en place d’une prothèse pénienne est un dernier recours (1 % des hommes). Bien que l’apparence physiologique soit correcte, le tissu érectile est définitivement détruit et la sensibilité reste absente.

Secondairement, les patients sont alors à même d’entendre l’utilité de développer une sensibilité érotique du haut du corps, ce qui, progressivement, permet de provoquer un para-orgasme, qui apporte détente et bien-être.

Un difficile parcours de confiance et de découverte.

C’est un difficile parcours de confiance et de découverte de l’autre qui nécessite information et soutien.

De façon plus générale, après un tel traumatisme, une thérapie comportementale ou de soutien, individuelle ou de couple, s’impose pour gérer les conflits, la rancœur due au handicap, éviter que le conjoint ne devienne le soignant… Une thérapie brève utilisant la méthode par EMDR (Eye-Movement Desensitization and Reprocessing (annuaire des thérapeutes sur le site emdr-france.org) peut être utile. Les massages du corps entier aident à se reconstruire et à retrouver une intégrité corporelle. Les entretiens sexologiques permettent de rassurer et de faire ressortir les ressources du couple pour éviter de rentrer dans un processus de résignation.

Le désir de procréation.

Le désir de procréation est également une question importante. Une femme, quel que soit son niveau d’atteinte médullaire, pourra comme une femme valide être enceinte de façon naturelle. Elle accouchera normalement, sous réserve de bénéficier, en cas de lésion haute, d’une péridurale « thérapeutique » afin d’éviter la survenue d’une hyperréflexie autonome. Pour les hommes, il est conseillé dès le séjour en centre de rééducation, de s’adresser à un CECOS pour conservation du sperme, dont la qualité tend à se détériorer avec le temps. La fécondation lors d’un rapport sexuel est très rare et dans la majorité des cas, le couple fait appel à une procréation médicalement assistée, dont le taux de succès est comparable à celui observé dans la population valide.

Le généraliste.

Le médecin généraliste doit systématiquement prendre contact avec un centre spécialisé pour y adresser son ou sa patiente et surtout s’assurer de la prise en charge sexologique ou d’aide à la procréation. Cela permet de libérer le patient d’une démarche éprouvante et au médecin d’avoir un lien avec les soignants.

Par une attitude confiante et empathique, le médecin praticien peut aider son patient à croire en ses possibilités de rencontrer un partenaire ou de vivre une vie de couple épanouie. Il doit également être alerté si une personne blessée médullaire dit perdre ses urines lors des rapports sexuels. Il faut dans ce cas impérativement reprendre la rééducation urinaire. De façon générale, la vessie doit toujours être vidée avant un rapport, par pression, percussion ou autosondage… Il n’y a ensuite aucun risque de fuite urinaire pendant environ deux heures. Le port d’un préservatif peut toutefois rassurer l’homme lors des premiers rapports.

Bibliographie :

- Soulier B. 2° Ed 2001 Aimer au-delà du handicap. Vie affective et sexualité du paraplégique, Paris, Dunod, 212 p. Epuisé

- Soulier B. 2001 Un amour comme tant d’autres ? Handicaps moteurs et sexualité, Paris, APF, 290 p. Se commande uniquement à l’Association des Paralysés de France (APF) par courrier à APF, Bd Auguste Blanqui 75013 PARIS (joindre un chèque de 19,24 €) ou par tél 01 40 78 69 00

- Soulier B. 2008 Vivre avec le handicap au quotidien. Guide du mieux être de la personne handicapée et de ses proches, Paris, InterEditions-Dunod, 211p

L’EXCITATION sexuelle découle de deux phénomènes physiologiques : l’un mécanique, qui nécessite l’intégrité du centre médullaire sacré, et l’autre psychogène, qui nécessite l’intégrité du centre médullaire dorsolombaire.

Très schématiquement, dans la paraplégie haute et la tétraplégie, le centre sacré n’est généralement pas atteint. Chez l’homme, une érection mécanique peut être obtenue lors de masturbation ou de la toilette, d’assez bonne qualité mais ne permettant pas une pénétration. Chez la femme, même en cas de lésions hautes avec anesthésie complète des organes génitaux externes et internes, des sensations orgasmiques peuvent être ressenties à la pénétration profonde grâce à une innervation du fond du vagin par le nerf vague. Dans les lésions basses, la masturbation ne provoque pas d’érection de la verge ni du clitoris et le recours aux fantasmes est insuffisant.

Sexologues spécialisés.

Les troubles de la sexualité constituent l’une des principales plaintes des patients. Les conseils pour vivre une vie sexuelle et affective épanouie doivent être donnés en centre de rééducation fonctionnelle par des sexologues spécialisés, afin d’éviter le traumatisme d’un échec par manque d’information dans le couple installé ou un évitement de nouvelles rencontres.

Les femmes ont souvent peur de ne plus plaire. Elles peuvent ressentir du plaisir à la pénétration si le centre sacré n’est pas atteint. Le recours à un lubrifiant à l’eau est préconisé pour pallier l’absence ou l’insuffisance de sécrétions vaginales.

Les hommes sont en attente de retrouver des érections et des mesures efficaces doivent être proposées d’emblée : inhibiteurs de la phosphodiestérase de type V (80 % d’efficacité, non remboursés) et injections intracaverneuses de prostaglandines (PGE1) (95 % d’efficacité, remboursées).

Une érection peut également être obtenue par l’utilisation d’un vacuum, ou érecteur à dépression. Il s’agit d’un volumineux cylindre en verre où l’homme introduit son pénis. Grâce à une pompe qui établit un vide relatif, l’érection se produit. Cette technique efficace et non agressive nécessite la participation des deux partenaires. Elle peut être utilisée en alternance des injections intracaverneuses ou lors d’échec de prise médicamenteuse.

La mise en place d’une prothèse pénienne est un dernier recours (1 % des hommes). Bien que l’apparence physiologique soit correcte, le tissu érectile est définitivement détruit et la sensibilité reste absente.

Secondairement, les patients sont alors à même d’entendre l’utilité de développer une sensibilité érotique du haut du corps, ce qui, progressivement, permet de provoquer un para-orgasme, qui apporte détente et bien-être.

Un difficile parcours de confiance et de découverte.

C’est un difficile parcours de confiance et de découverte de l’autre qui nécessite information et soutien.

De façon plus générale, après un tel traumatisme, une thérapie comportementale ou de soutien, individuelle ou de couple, s’impose pour gérer les conflits, la rancœur due au handicap, éviter que le conjoint ne devienne le soignant… Une thérapie brève utilisant la méthode par EMDR (Eye-Movement Desensitization and Reprocessing (annuaire des thérapeutes sur le site emdr-france.org) peut être utile. Les massages du corps entier aident à se reconstruire et à retrouver une intégrité corporelle. Les entretiens sexologiques permettent de rassurer et de faire ressortir les ressources du couple pour éviter de rentrer dans un processus de résignation.

Le désir de procréation.

Le désir de procréation est également une question importante. Une femme, quel que soit son niveau d’atteinte médullaire, pourra comme une femme valide être enceinte de façon naturelle. Elle accouchera normalement, sous réserve de bénéficier, en cas de lésion haute, d’une péridurale « thérapeutique » afin d’éviter la survenue d’une hyperréflexie autonome. Pour les hommes, il est conseillé dès le séjour en centre de rééducation, de s’adresser à un CECOS pour conservation du sperme, dont la qualité tend à se détériorer avec le temps. La fécondation lors d’un rapport sexuel est très rare et dans la majorité des cas, le couple fait appel à une procréation médicalement assistée, dont le taux de succès est comparable à celui observé dans la population valide.

Le généraliste.

Le médecin généraliste doit systématiquement prendre contact avec un centre spécialisé pour y adresser son ou sa patiente et surtout s’assurer de la prise en charge sexologique ou d’aide à la procréation. Cela permet de libérer le patient d’une démarche éprouvante et au médecin d’avoir un lien avec les soignants.

Par une attitude confiante et empathique, le médecin praticien peut aider son patient à croire en ses possibilités de rencontrer un partenaire ou de vivre une vie de couple épanouie. Il doit également être alerté si une personne blessée médullaire dit perdre ses urines lors des rapports sexuels. Il faut dans ce cas impérativement reprendre la rééducation urinaire. De façon générale, la vessie doit toujours être vidée avant un rapport, par pression, percussion ou autosondage… Il n’y a ensuite aucun risque de fuite urinaire pendant environ deux heures. Le port d’un préservatif peut toutefois rassurer l’homme lors des premiers rapports.

Bibliographie :

- Soulier B. 2° Ed 2001 Aimer au-delà du handicap. Vie affective et sexualité du paraplégique, Paris, Dunod, 212 p. Epuisé

- Soulier B. 2001 Un amour comme tant d’autres ? Handicaps moteurs et sexualité, Paris, APF, 290 p. Se commande uniquement à l’Association des Paralysés de France (APF) par courrier à APF, Bd Auguste Blanqui 75013 PARIS (joindre un chèque de 19,24 €) ou par tél 01 40 78 69 00

- Soulier B. 2008 Vivre avec le handicap au quotidien. Guide du mieux être de la personne handicapée et de ses proches, Paris, InterEditions-Dunod, 211p

 Dr ISABELLE HOPPENOT D’après un entretien avec le Dr Bernadette Soulier, médecin sexologue.  Dr ISABELLE HOPPENOT D’après un entretien avec le Dr Bernadette Soulier, médecin sexologue.

Source : Le Quotidien du Médecin: 9105