En France, l’incidence annuelle des AVC est supérieure à 150 000, avec de plus en plus d’adultes d’âge moyen touchés (25 % ont moins de 65 ans). Il s’agit de la première cause de handicap acquis chez l’adulte (> 500 000 patients).
Lors de la phase chronique (six mois après l’AVC), un grand nombre de patients présentent en effet des troubles fonctionnels multiples, tels que des déficiences cognitives, motrices ou sensitives, de la fatigue, des troubles psychoaffectifs… Il est donc essentiel de leur proposer un suivi rééducatif adapté, inscrit dans le temps et complété par un accompagnement psychologique si besoin.
Les bénéfices de l’activité physique démontrés
Les bénéfices d’une activité physique poursuivie régulièrement toute la vie sont prouvés. Elle exerce des effets positifs sur la neuroplasticité et améliore la récupération fonctionnelle, en particulier neuromusculaire, ainsi que la capacité cardiorespiratoire. Elle augmente la qualité de vie et le bien-être psychique. L’entraînement mixte associant les deux types d’activité physique (en endurance et en renforcement musculaire) est préconisé.
Les activités physiques de la vie quotidienne doivent aussi être encouragées. L’enjeu principal est que le patient s’engage dans un projet d’activité physique sur le long terme qui rentre dans sa routine de vie.
« Les patients ont besoin d’être motivés et différentes structures existent un peu partout en France. L’association AVC Arrpac (Accompagnement, Réadaptation, Répit Post-AVC et Cérébro-Lésés), par exemple, a ainsi créé un accueil de jour innovant au service des patients et de leurs aidants. Ouvert en juin 2022, au cœur du parc du CH Le Vinatier, à Bron, il intègre un vaste espace sportif. Son programme AVanCer s’articule autour des capacités de la personne accueillie afin de l’aider à surmonter ses difficultés », a témoigné la Dr Julie Di Marco (Lyon).
Orthophonie, pas de demi-mesure
Concernant le traitement des troubles de la communication et notamment de l’aphasie (un tiers des patients), les recommandations en orthophonie insistent sur la nécessité de séances de forte intensité, à une fréquence élevée ou sur une longue période (grade A). Un rythme supérieur à trois séances par semaine améliore le langage et la communication et, quand il est d’au moins quatre par semaine, la compréhension.
La méthode de stimulation magnétique transcrânienne répétitive (rTMS) et la rééducation informatisée du langage accompagnée d’un thérapeute sont aussi recommandées, mais peu utilisées en pratique.
Des possibilités de télé-rééducation pour les troubles cognitifs
À la phase chronique de l’AVC, un grand nombre de patients présentent des troubles cognitifs. Ces troubles peuvent concerner les fonctions attentionnelles, mnésiques, exécutives… Ils aggravent la dépendance du patient et peuvent provoquer une détresse psychologique. Éviter cette cascade délétère « est tout l’enjeu du traitement la première année de suivi, pour laquelle il faut des soins intenses, à forte dose… Or les ressources sont limitées (nombre insuffisant de neuropsychologues et d’orthophonistes en ambulatoire). Le bilan pluridisciplinaire ne peut pas toujours être réalisé, malgré les recommandations (circulaire 2015 AVC) », regrette le Dr Bertrand Glize (CHU de Bordeaux).
La télé-rééducation peut constituer une réponse aux inégalités territoriales d’accès aux soins dans certaines zones rurales. Les patients peuvent ainsi bénéficier d’une rééducation cognitive personnalisée et supervisée à distance. Elle répond également à une demande croissante d’autonomie des patients avec un retour le plus rapide possible à leur vie ordinaire. La prise en charge est alors organisée au-delà de l’hôpital, avec un suivi à distance et un prolongement de la thérapie. « Au CHU de Bordeaux, afin d’intensifier la prise en charge en libéral et/ou de pallier le désert orthophonique auquel certains patients peuvent être confrontés, l’unité Cola (cognition et langage) a mis en place un protocole de thérapie cognitive et de télé-rééducation. La télé-rééducation a montré son efficacité pour des patients ciblés atteints de troubles cognitifs légers à modérés. L’âge n’est pas un critère limitant. Cependant, les études présentent certaines limites (petits échantillons, études centrées sur le langage…) et des études à plus grande échelle seraient nécessaires », a conclu le spécialiste.
L’HAD plébiscitée mais…
L’hospitalisation à domicile de réadaptation (HAD-R) peut très bien s’adresser aux patients post-AVC en phase chronique nécessitant une rééducation/réadaptation pluridisciplinaire coordonnée par un médecin de médecine physique et de réadaptation (MPR). Intervenir au domicile présente plusieurs avantages : le patient, dans son environnement, est confronté à ses difficultés dans la vie réelle et les progrès sont immédiatement appréhendés. Cela limite les complications liées à l’hospitalisation et évite les déplacements fatigants. De plus, la présence de l’équipe d’HAD-R au domicile facilite l’implication des aidants du patient dans leur environnement de vie quotidienne.
« Pourtant, la rééducation neurologique et orthopédique ne constitue que 4 % de l’activité d’hospitalisation à domicile en Île-de-France » , a précisé la Dr Clara Debarle (Le Bourget). La pérennité de ce dispositif est mise en danger alors que les patients le plébiscitent (Cameron et al. 2023, UK, Disability and Rehabilitation).
Toxine botulique et robot, le combo gagnant ?
De plus en plus d’études rapportent les bénéfices de l’utilisation d’un robot pour la restauration de la marche après un AVC. Récemment, une méta-analyse s’est intéressée à l'efficacité de l'entraînement assisté par robot avec exosquelette (RAT) sur la fonction de marche des survivants d'AVC, en phase chronique (J. Yang, BMJ) avec des résultats contrastés. Parmi les travaux analysés, « une étude a porté sur les effets combinés de l'entraînement assisté par robot et de la physiothérapie par rapport à la physiothérapie seule, sur l'équilibre et la fonction de marche chez des patients victimes d'un AVC chronique après un traitement par toxine botulique-A », explique le Dr Maxence Compagnat (CHU de Limoges). Dans cette étude, 48 patients victimes d'un AVC ayant reçu un traitement par toxine botulique de type A (BoNT-A) pour les muscles spastiques des membres inférieurs ont été répartis dans deux groupes : un groupe RAT avec 30 minutes par jour (sauf le week-end) d’entraînement assisté par robot plus 60 minutes de physiothérapie pendant 3 semaines, et un groupe témoin avec uniquement 90 minutes de physiothérapie. Les évaluations ont été faites au départ et après le traitement aux semaines 6 et 12. La spasticité a été évaluée par l'échelle d'Ashworth, les fonctions d’équilibre et de marche par l’échelle d’équilibre de Berg et le test Timed Up and Go. Des améliorations significatives ont été trouvées dans les deux groupes, en ce qui concerne la spasticité, l'équilibre et les fonctions de marche. Cependant, aux semaines 6 et 12, les améliorations par rapport au test Timed Up and Go de base et à l'échelle d'équilibre de Berg étaient significativement plus élevées dans le groupe RAT. « Un traitement intégré par RAT et physiothérapie pourrait apporter des avantages supplémentaires chez les patients victimes d'un AVC chronique dont la spasticité a été traitée par BoNT-A. On constate une potentialisation des effets. Cependant, d’autres études sont nécessaires ». D’autres recherches commencent avec l’association toxine botulique et entraînement visuomoteur.
D’après la session « Prise en charge à la phase chronique des personnes victimes d’AVC »
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