Professions intermédiaires, numéro unique de santé, intérim…

Gouvernance, compétences : les aléas d'une proposition de loi controversée

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Publié le 01/12/2020
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Les députés examinent en séance une proposition de loi (PPL) clivante de la majorité censée concrétiser plusieurs mesures du Ségur de la santé.

Crédit photo : S.Toubon

Traduire plusieurs mesures issues du Ségur de la santé, tel est l'objectif de la proposition de loi (PPL) de la majorité discutée en séance publique à l'Assemblée nationale. De la gouvernance des hôpitaux à la lutte contre l'intérim médical, ce texte « fourre-tout » fait l'objet de vifs débats.

Le Dr Stéphanie Rist, députée du Loiret et rapporteure du texte, s'attendait à des discussions « chahutées », elle ne s'y est pas trompée. L'examen a commencé par une reculade. Face à la fronde des syndicats de praticiens hospitaliers et libéraux soutenus par l'Ordre, la création d'une profession médicale intermédiaire entre l'infirmière et le médecin a été abandonnée. À la place, l'élue a fait voter un amendement demandant au gouvernement un rapport d'ici un an sur les pratiques avancées et les protocoles de coopération.

À l'inverse, une autre mesure clivante a été votée. Elle élargit les compétences des sages-femmes en leur permettant de prescrire et de renouveler des arrêts de travail selon les référentiels appliqués aux médecins, mais aussi de prescrire des dépistages d'infections sexuellement transmissibles. Consolation pour les syndicats médicaux, les amendements visant à créer la fonction de sage-femme « référente » sur le modèle du médecin traitant ont été rejetés.

Passage en force

Autre surprise : le texte amendé acte la création d'un « numéro national unique dédié à la santé », le 113, en remplacement du 15 et du 116-117. Le député Thomas Mesnier (LREM), à la manœuvre, tenait à inscrire cette mesure dans « le marbre de la loi » quelques jours après la désignation des 22 territoires chargés d'expérimenter dès janvier le service d'accès aux soins (SAS). Surpris par ce timing, nombre de députés ont dénoncé un « passage en force ».

Côté hôpital, la PPL acte le retour du service comme « échelon de référence » en matière de gouvernance (organisation, pertinence des soins). Les chefs de service devront désormais être nommés « par décision conjointe » du directeur et du président de la commission médicale d'établissement (CME), après avis des chefs de pôles et concertation avec les soignants. Dans un souci de simplification managériale, possibilité a été donnée, dans les établissements qui le souhaitent, de fusionner la CME avec la commission des soins infirmiers, de rééducation et médicotechniques (CSIMRT). 

Pour lutter contre les dérives de l'intérim médical, l'article 10 permet aux directeurs généraux des ARS de déférer devant la justice administrative les hôpitaux qui ne respectent pas le plafonnement des rémunérations (outre le rejet automatique des paiements irréguliers). Une mesure jugée injuste par Jérôme Goeminne, nouveau président du Syndicat des manageurs publics de santé (SMPS). « Doit-on blâmer un directeur qui recrute à un tarif supérieur au dernier moment l'anesthésiste qui évitera la fermeture sur 24 heures du service de maternité ou la déprogrammation sur-le-champ de tous les blocs ? »

Martin Dumas Primbault

Source : Le Quotidien du médecin