Mensonge, fraude fiscale : l'ex-ministre et chirurgien Cahuzac devant ses juges lundi

Publié le 02/09/2016
CAHUZAC

CAHUZAC
Crédit photo : S. TOUBON

Ministre du Budget, il avait un compte caché à l'étranger : Jérôme Cahuzac sera face à ses juges lundi, près de quatre ans après avoir déclenché le plus retentissant scandale du quinquennat.

Il a eu un répit de quelques mois, le temps d'examiner une requête de la défense, mais l'ancienne étoile montante socialiste va finalement comparaître, jusqu'au 15 septembre, devant le tribunal correctionnel de Paris pour fraude fiscale, blanchiment et pour avoir « minoré » sa déclaration de patrimoine en entrant au gouvernement en mai 2012.

Énergique pourfendeur de la fraude fiscale, Jérôme Cahuzac, 64 ans, a menti au fisc, au Parlement, au président, « les yeux dans les yeux ». Pendant des mois, il a nié l'existence d'un compte dissimulé à l'étranger. Sa démission en mars 2013 puis ses aveux en avril ont fait tanguer le gouvernement.

Séisme

Il s'est dit « dévasté par le remords », semblant à peine réaliser l'écho que prenait l'affaire dans le monde politico-judiciaire : la création d'un parquet national financier, d'une Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, jusqu'à la publication des déclarations d'intérêts pour tous les parlementaires.

L'ancien ministre ne sera pas seul sous les feux de la justice : à ses côtés, son ex-épouse, le Dr Patricia Ménard, et leurs conseillers, le banquier suisse François Reyl et l'ex-avocat Philippe Houman. Ils risquent une peine allant jusqu'à sept ans de prison et un million d'euros d'amende.

Les Cahuzac avaient tenté d'échapper aux poursuites pour fraude fiscale, dénonçant une « double peine » alors qu'ils avaient déjà accepté un redressement fiscal majoré de 2,3 millions d'euros. L'audience avait été suspendue, le temps pour le Conseil constitutionnel de trancher. Mais en juin, les Sages ont estimé qu'en fonction du « montant de la fraude, de la nature des agissements de la personne ou des circonstances », il était justifié de traîner les fraudeurs devant les tribunaux tout en leur infligeant de lourds redressements.

Clinique florissante

Le procès du mensonge reprend donc son cours.

L'affaire débute en décembre 2012, quand le site d'information Mediapart révèle l'existence d'un compte caché de Jérôme Cahuzac, d'abord en Suisse puis à Singapour. Le parquet ouvre une enquête le mois suivant. L'enquête fait apparaître les mécanismes d'une fraude fiscale « obstinée », « sophistiquée » et « familiale ».

A l'origine de cette entreprise, Jérôme Cahuzac, chirurgien de formation, et sa femme dermatologue Patricia Ménard qui ont tenu ensemble une florissante clinique spécialisée dans les implants capillaires avant de se séparer.

Au début des années 90, l'argent coule à flot, entre les règlements des riches patients de la clinique et les lucratives activités de conseil de Jérôme Cahuzac qui, après un passage au cabinet du ministre de la Santé Claude Evin, propose son expertise à des laboratoires pharmaceutiques.

Montages élaborés

Un premier compte est ouvert par un « ami » en 1992 à UBS, puis un autre au nom de Cahuzac lui-même l'année suivante. En 1998, tous les avoirs sont transférés chez Reyl.

Quand le secret bancaire suisse commence à se fissurer en 2009, les 600 000 euros que détient Jérôme Cahuzac prennent la route de Singapour, en faisant un détour par une société-écran panaméenne puis une autre aux Seychelles, un montage réalisé avec l'aide d'un intermédiaire basé à Dubaï.

Pour le client, rien n'avait changé : il appelait toujours sa banque à Genève, donnait son nom de code, « Birdie », et pouvait se faire livrer des espèces, dans la rue, à Paris.

Une fois le scandale passé, les biens revendus et les avoirs rapatriés, reste l'épreuve du procès.

(Avec AFP)

Source : lequotidiendumedecin.fr