Livre blanc du Centre Primo Levi

Aider les victimes de torture

Publié le 25/06/2012
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Crédit photo : AFP

PLUS DE 100 000 personnes ayant subi des tortures et des violences politiques, et ayant dû fuir leur pays d’origine vivent en France sous différents statuts, demandeurs d’asile, déboutés de droit d’asile, ou encore réfugiés statutaires. Afin de faire la lumière sur leur situation et sur leurs besoins en matière de soin, mais aussi d’accompagnement social et juridique, le Centre Primo Levi publie un livre blanc.

Ce centre créé en 1995 a pour but d’offrir une aide à ces personnes exilées, qui ont survécu à la torture et aux violences infligées dans un contexte de persécution politique. Le document est le fruit d’un travail collectif, mené par des médecins, des psychologues, des chercheurs, ou encore des responsables associatifs.

« Nous publions ce livre blanc pour sortir de l’ombre ces populations que leurs tortionnaires ont voulu détruire », explique Éléonore Morel, la directrice générale du Centre Primo Levi. En France, aucune étude sur le nombre de personnes touchées ni aucune enquête épidémiologique n’ont été menées. Et les victimes ne sont pas seulement traumatisées par ce qu’elles ont vécu dans leur pays d’origine, elles le sont aussi par les conditions de leur exil, et leurs conditions de vies en France. Elles vivent bien souvent dans des conditions très précaires, et n’ont que très difficilement accès aux soins. « Le psychotraumatisme issu de la torture est une spécificité. Ce qui fait cette spécificité fait également la difficulté de sa prise en charge. Tous les médecins ne peuvent pas y faire face », souligne Michel Brugière, le président du centre.

« On ne guérit pas de la torture, mais on peut aider les victimes à se reconstruire et à refaire confiance aux autres », poursuit Éléonore Morel. « La prise en charge est longue et dure en moyenne deux ans et demi. » Cette prise en charge n’est pas seulement médicale, les réfugiés ont souvent besoin d’un accompagnement social ou juridique. « Le système de santé de droit commun n’est pas adapté à leurs souffrances », note-t-elle. « Ils vont avoir besoin d’une prise en charge exceptionnelle, car ils ont subi des violences inouïes. »

Améliorer les conditions d’accueil.

Seulement cinq centres sont spécialisés dans l’accueil de ces personnes. Complètement saturés, ils ne parviennent à prendre en charge que 6 000 des 100 000 personnes qui auraient besoin d’aide. Le livre blanc demande un élargissement des politiques publiques en direction des migrants, ainsi que la mise en place de programmes de recherche. Les victimes ont besoin d’un accompagnement spécifique, et la méconnaissance des effets de la torture peut entraîner des retards de diagnostic et des traitements inadaptés. Le Centre Primo Levi souhaite également que les centres spécialisés, qui apportent leur aide à ces exilés, soient soutenus. Il préconise également l’adaptation et le renforcement des structures de droit commun, qui ne sont pas adaptées. Il est aussi nécessaire de former les professionnels de santé, et notamment les médecins généralistes qui sont souvent en première ligne. Enfin, alors que les conditions d’accueil des réfugiés se durcissent en France, le livre blanc demande que des conditions adéquates au soin soient créées, et ce en garantissant l’accès au logement, à l’assurance-maladie et aux minimums sociaux.

CÉCILE RABEUX

Source : Le Quotidien du Médecin: 9147