3 JUILLET 2013, Paris. Salam, 10 ans, Syrienne, vient d’arriver de Jordanie où ses parents se sont réfugiés après le début de la guerre. Après le drame qui, il y a un an déjà, lui a ravi sa sœur et volé ses jambes. Le 12 juillet 2012, la ville de Khirbet Ghazalah, dans la banlieue de Deraa, est bombardée. Les deux fillettes échouent à rejoindre un abri à temps. Salam perd ses deux jambes écrasées sous les gravats, tandis que sa sœur décède sous ses yeux.
Un an après, dans la salle d’attente de l’établissement d’appareillage orthopédique Protéor, Salam a le regard voilé. Son visage triste, où l’on devine les cicatrices laissées par les éclats d’obus, est gonflé par la fatigue du voyage. Malgré la bienveillance de sa famille d’accueil composée de Sophie Mutar, une Syrienne arrivée en France en 1984, et de son fils Khaled, la fillette reste mutique. Ses moignons recouverts de corne – elle se hisse dessus pour se déplacer seule, confie Khaled – pendent dans le vide.
Le souci du suivi.
C’est grâce à la Chaîne de l’Espoir que Salam (voir notre diaporama sur la jeune Syrienne), ainsi que cinq autres enfants Syriens, ont pu venir en France. En janvier 2013, l’ONG avait déjà transféré trois enfants dont Amar, 7 ans, amputé d’une jambe et d’une main, qui a laissé un souvenir ravi à toute l’équipe. L’orthoprothésiste Marielle Cazin, responsable du centre Protéor, est l’une des artisans de cet espoir rendu aux victimes de la guerre. Elle ne compte pas son temps (ni ne le fait payer) pour façonner les prothèses qui les remettront debout. L’argent qu’elle reçoit de la part de la Chaîne de l’Espoir (une prothèse coûte entre 2 000 et 6 000 euros) finance son fournisseur et le matériel, qu’elle choisit le plus simple possible pour ces enfants.
En 3 rendez-vous, Marielle Cazin fabrique un moulage adapté aux genoux de Salam puis lui fait essayer des prothèses, avant de les lui livrer définitivement, moins d’un mois après la première rencontre. La tâche n’est pas exempte de difficultés. Marielle Cazin a sollicité l’avis du Dr Didier Pillard, chirurgien orthopédiste, qui s’inquiète du devenir des petits : « Appareiller un enfant est une responsabilité. Son suivi aussi. Si l’os pousse et transperce la peau comme c’est souvent le cas chez des amputés accidentels, il faudra opérer, rogner le tibia, et remettre des parties molles », prévient-il.
Salam souffre d’un genu valgum. L’orthoprothésiste cherche un compromis. « Il ne faut pas qu’elle amplifie ce genu valgum sinon une intervention risque d’être nécessaire », analyse-t-elle. La petite aura 3 manchons en mousse d’épaisseurs différentes qui accompagneront sa croissance. Les prothèses seront creuses, pour ne pas frotter contre le genou. Elles devraient durer un an ; l’orthoprothésiste a visé la courbe de croissance haute pour déterminer la pointure du pied et la hauteur des tubes.
Aider même à distance.
Au fil des essayages, les gestes de Salam se font de plus en plus prestes et précis. Elle enfile avec détermination la première couche, l’embout, puis la chaussette et le fixe prothèse et se dresse courageusement sur ces nouveaux pieds. Les pas sont encore hésitants, elle se plaint d’une douleur derrière la jambe. Marielle Cazin part chauffer les prothèses pour les ajuster.
La spécialiste cherche à parer à toutes les éventualités. « J’ai installé des pieds enfants sur un montage adulte, car en Jordanie, ils n’ont pas de pied enfant. Ils pourront donc remplacer les chaussures par des modèles adultes », explique-t-elle à la famille d’accueil de Salam. « En cas de problème, filmez et envoyez-moi les clichés. Je garde les moulages. Des ONG pourront fournir de nouvelles prothèses à l’étranger. J’aiderai à distance », assure-t-elle en glissant dans les bagages de Salam des fixe-prothèses et du jersey pour Amar.
Le 22 juillet Salam repart radieuse de l’établissement Protéor, lançant un sonore « merci » à la responsable du centre. Elle ira voir la Tour Eiffel et fera de longues balades dans les parcs avec sa famille d’accueil. « Elle était vraiment changée, magnifique, elle avait le moral, et voulait encore passer du temps en France », confie Sophie Mutar. Depuis le 8 août, Salam a retrouvé ses parents en Jordanie. « Son frère m’a envoyé des vidéos pour me montrer comme elle marche bien ! » se réjouit Sophie Mutar.
Comme Amar il y a quelques mois, ou cet été Rhokaya, 14 ans, qui a reçu une prothèse du bras, Salam est l’une des victoires de la Chaîne de l’espoir. Mais elle ne saurait faire oublier les milliers d’enfants syriens aux vies et corps amputés par la guerre. « En Syrie, c’est toute une génération de handicapés qui grandit. Il faudrait réussir à opérer sur place. Qui va reconstruire le pays ? », s’interroge le Dr Ismaël Moutawee, coordinateur syrien en France de la Chaîne de l’espoir.
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