Retard de croissance : vigilance même chez les « grands » !

Par
Publié le 20/09/2021
Article réservé aux abonnés

Si la taille des tout petits est généralement scrutée de près, la surveillance s’amenuise volontiers avec le temps, avec une tendance à banaliser une croissance retardée chez le grand enfant et le jeune adolescent.

Crédit photo : VOISIN/ PHANIE

La moyenne d’âge au diagnostic d’un retard de croissance se situe entre 8 et 9 ans. Chez certains enfants, celui-ci est posé dès 3 ans, voire avant, mais chez d’autres, cela peut attendre jusqu’à 14-15 ans. Encore aujourd’hui, une large partie des enfants ayant un déficit en hormone de croissance (5 % des retards de croissance) et qui répondent à l’indication d’une supplémentation ne sont pas diagnostiqués. Et lorsqu’il est instauré, le traitement par supplémentation en GH l’est en moyenne à l’âge de 9 ans, ce qui peut être trop tardif.

« Le retard au diagnostic est probablement plurifactoriel, indique le Pr Agnès Linglart (endocrinologie et diabète de l’enfant, hôpital Bicêtre, Paris). Alors que les petits sont très surveillés et que l’on est attentif au moindre problème de croissance, avec les années, les visites pédiatriques s’espacent, le carnet de santé est délaissé, avec une tendance à banaliser une croissance retardée chez le grand enfant et le jeune adolescent. » Même quand l’alerte est donnée tôt, on patiente souvent en croyant que l’enfant va rattraper son retard, et l’on perd ainsi de précieux mois. « Il ne faut pas attendre que l’enfant soit plus grand ou même la puberté, comme on le croit trop souvent, regrette Agnès Linglart. Et il faut bien réaliser que continuer à grandir n’est pas une garantie, surtout si l’enfant reste en dessous de la courbe de croissance ou s’il est bien plus petit que ses parents. »

« On ne s’inquiète jamais inutilement »

Parce qu’il rencontre régulièrement l’enfant, le médecin traitant a un rôle prépondérant dans le diagnostic d’un retard de croissance et la rentrée peut être un bon moment pour faire le point. Le carnet de santé est l’outil de suivi par excellence. « Quel que soit l’âge, toute déviation des courbes doit alerter », en l’occurrence une taille inferieure à -2 DS par rapport à la courbe de référence, ou une différence de plus de 1,5 DS par rapport à la taille cible (taille que devrait atteindre l’enfant en fonction de la taille de ses parents), ou encore un « changement de couloir » de croissance, considéré comme sévère au-delà d’un couloir et demi. « On ne s’inquiète jamais inutilement, martèle l’endocrinologue. Il n’y a pas de fausse alerte, en ce sens que s’inquiéter d’un retard de croissance peut éviter une perte de chance à l’enfant et qu’il y a toujours des éléments à optimiser pour favoriser une croissance jugée trop lente (conseils nutritionnels, vitamine D, sommeil). »

La comparaison des courbes de taille et de poids permet de différencier les causes endocriniennes des pathologies chroniques, où une perte de poids accompagne le retard de croissance. Le bilan biologique initial comprend NFS, VS et CRP, les anticorps anti-transglutaminase pour la maladie cœliaque, un ionogramme, une créatinine, un bilan hépatique, une calcémie/phosphatémie, ainsi qu’un bilan endocrinien avec la TSH et l’IGF1. Un caryotype à la recherche d’un syndrome de Turner doit être demandé chez les filles. La radiographie pour déterminer l’âge osseux sert avant tout au pronostic de taille. Si une cause hypophysaire est suspectée, une IRM peut même être réalisée en 1re intention. « L’enfant doit être adressé sans délai à une consultation croissance lorsque cette approche n’a pas fourni d’explication, ou que le bilan est normal avec un retard de croissance qui persiste ou s’aggrave », précise le Pr Linglart.


Source : lequotidiendumedecin.fr