La Cour des comptes réclame des réformes « rapides » des CHU, modèle « en voie d’essoufflement »

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Publié le 07/03/2019
Cour des comptes

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Crédit photo : Phanie

Après un rapport en janvier 2018 sur la recherche et l'enseignement au sein des centres hospitaliers universitaires (CHU), puis un second en décembre 2018 sur leur rôle dans le système de santé, la Cour des comptes a publié ce mardi un référé. Ce dernier, consacré à l'activité de soins et au rôle des 30 CHU français, a été transmis au gouvernement et cinq recommandations y sont formulées. 

Le constat de départ est douloureux :  le modèle des CHU est « en voie d’essoufflement », « tant pour ce qui est des conditions de financement des établissements, que de leur pilotage stratégique ou de l'attractivité de la carrière hospitalo-universitaire », assènent les « sages » de la rue Cambon.

Cette situation appelle des réformes « rapides ». La Cour recommande en priorité de favoriser l'apparition d'une dizaine de « réseaux de CHU ». Cela apparaît comme « une nécessité » pour renforcer la coordination avec les autres établissements de santé. Actuellement, les 30 CHU exercent leurs activités de soins (proximité, expertise ou recours) de façon inégale : une dizaine de CHU présentent bien une spécificité, tandis que d'autres ont une activité proche d'établissements non universitaires, fait valoir la Cour. De même, l'activité de recherche est concentrée dans les plus grands CHU ; tout comme le taux d'encadrement des étudiants par médecin enseignant.

La constitution de réseaux diminuerait ces disparités. En matière de recherche, elle permettrait plus de coordination des moyens et de visibilité internationale. En matière de soins, les réseaux éviteraient une dispersion des moyens, « incompatible » avec une recherche de meilleure qualité et d'efficience. La fixation d'un seuil minimal pour exercer certaines activités comme la transplantation, serait par ailleurs « cohérente » avec la mise en place des réseaux.

Contractualisation des missions

Au chapitre des carrières hospitalo-universitaires, la Cour appelle à en restaurer « l'attractivité » tout en mettant en place un suivi d'activité. Elle pointe « un risque de désaffection » pour le statut de PU-PH, créé il y a 60 ans. Les hospitalo-universitaires rencontrent aujourd'hui « des difficultés » : l'exercice de leurs trois missions (recherche, enseignement, clinique) est bien souvent « illusoire » et la plupart se concentrent sur « une ou deux missions ». À cela s'ajoutent la gestion des pôles/services, et parfois l'expertise auprès d'institutions publiques. Le référé propose donc de faire définir par les ministères de la Santé et de l'Enseignement supérieur « les obligations de service » des hospitalo-universitaires. Une « contractualisation tripartite entre l'université, le CHU et le médecin » permettrait de leur donner une « visibilité pluriannuelle » sur leurs missions et résultats.

Troisième recommandation : revoir les conditions de financement des CHU, en modifiant notamment les conditions d'allocation des dotations des missions d'enseignement, recherche, référence et innovation (MERRI). Ces financements forfaitaires sont répartis de façon inégale entre les CHU, mais aussi à d'autres centres hospitaliers, en fonction d'indicateurs dont la légitimité est « contestée », estime la Cour. Elle appelle à cesser ce « saupoudrage » et à accroître la part de ces dotations réservée au financement des appels à projet et des structures de recherche.

Ancrer la démarche qualité dans les CHU

Le pilotage national des activités hospitalo-universitaires et « la coordination stratégique des acteurs aux niveaux régional et local » sont aussi à améliorer. Cela passe là encore par une meilleure coordination entre les ministères de la Santé et de l'Enseignement supérieur et de la recherche. La Cour propose par exemple de présenter « l'ensemble des crédits budgétaires et extrabudgétaires, des dépenses fiscales et emplois affectés à la recherche biomédicale et à la formation initiale » dans une annexe au budget de la Sécu. Au niveau local, les relations entre le président de l'université, les dirigeants du CHU et les organismes de recherche doivent être renforcées, avec la mise en place d'une instance de concertation et de synchronisation des contrats.

Enfin, la juridiction plaide pour que la qualité devienne « un objectif essentiel des politiques des CHU ». Des marges de progrès sont possibles, estime la Cour des comptes. « Les CHU ne figurent pas parmi les meilleurs établissements au regard de la certification de la qualité mise en œuvre par la Haute autorité de santé (HAS) », assène-t-elle. Un quart des CHU ne sont pas certifiés dans les notes maximales (A et B), dont ceux de Toulouse ou de Clermont-Ferrand. La Cour souligne que les établissements ont encore du mal à « s'approprier » cette démarche.


Source : lequotidiendumedecin.fr