Réduction des IJ

Le patronat veut mieux former les médecins à la prescription des arrêts de travail

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Publié le 29/04/2019
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« Dans notre rapport, nous avons évité que la responsabilité des arrêts de travail et de leur coût soit portée sur tel ou tel acteur, comme le médecin ou le salarié ».

Lors d'une table ronde organisée par l'Association des journalistes de l'information sociale (AJIS), Stéphane Seiller, conseiller maître à la Cour des comptes et coauteur du rapport sur la maîtrise des arrêts de travail, a apporté plusieurs précisions sur ce texte rendu fin février et écrit en trio avec le Pr Stéphane Oustric, généraliste à Toulouse, et Jean-Luc Bérard, directeur des ressources humaines du groupe Safran.

Pas question de pointer du doigt les prescripteurs. « Les abus sont minoritaires, la ministre de la Santé évoquait le chiffre de 15 % d'arrêts non justifiés, en réalité, au jour même de la prescription, seulement 3 % des arrêts sont abusifs, poursuit Stéphane Seiller. Il est difficile pour le médecin de juger si un arrêt sera toujours justifié au bout de dix jours par exemple, il faut donc sortir le praticien de l'isolement de sa prescription, en le mettant en contact avec l'assurance-maladie et le médecin du travail. »

L'une des principales recommandations du rapport est d'ailleurs d'accompagner plus efficacement les médecins, « pivots » dans la mise en œuvre du retour au travail, et donc de mieux les former à la problématique des arrêts de travail et de leurs prescriptions, par exemple via le DPC. Le rapport propose par ailleurs d'informer les praticiens sur leur profil de prescription grâce à l'envoi d'un tableau de bord « simple et ergonomique ».

Médecins démunis

Ces propositions sont proches des demandes de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME). « Il faut développer le suivi, la formation et le contrôle des prescripteurs, mieux les informer sur leurs pratiques de prescription d’IJ. Les entreprises doivent être mieux outillées aussi, afin qu'elles puissent évaluer l'absentéisme, son volume et ses causes », indique le Dr Pierre Thillaud, membre de la commission sociale de la CPME. « Cela peut aussi être utile – tout en préservant le secret médical – pour que l'employeur mette en place les bonnes mesures de prévention et adapte le poste de travail », estime Éric Chevée, vice-président en charge des affaires sociales.

Côté salarié, la CGT estime que les médecins sont surtout démunis face au mal-être des travailleurs. « À un moment donné, certains médecins sont désemparés et n'ont pas d'autres choix que de faire un arrêt de travail "bricolé" face aux souffrances des patients qu'ils ont en face d'eux », estime Jérôme Vivenza, responsable de l'activité travail-santé à la CGT.

L'une des autres préconisations majeure de la mission est d'instaurer un jour de carence d'ordre public. Ce jour de carence serait obligatoire pour tout le monde, et non couvert par les accords de branche ou d'entreprise. Les fonctionnaires y sont déjà soumis, ainsi que les salariés dont les couvertures complémentaires laissent à leur charge un jour d'arrêt. « L'argument ici n'est pas économique, car sur la dépense d'IJ, cela ne représente pas grand-chose. C'est plutôt la question d'équité entre travailleurs du public et du privé qui motive cette mesure », souligne Stéphane Seiller.

Marie Foult

Source : Le Quotidien du médecin: 9745