Statut unique de PH et fin du concours

Les syndicats de praticiens hospitaliers fixent leurs lignes jaunes

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Publié le 16/05/2019
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Crédit photo : SEBASTIEN TOUBON

La modernisation du statut de praticien hospitalier (PH) dès 2020 fait partie des points sensibles du projet de loi de santé dont l'application est programmée par ordonnances. Une procédure qui ne signifie pas que le débat sera escamoté, justifiait Agnès Buzyn dans nos colonnes en mars, mais qui doit permettre une concertation des parties prenantes. 

Une période de négociations a donc été ouverte le 3 avril et devrait se prolonger jusqu'à la fin du mois de juillet. Un groupe de travail intitulé « Modernisation du cadre de l'exercice médical à l'hôpital », piloté par la direction générale de l'offre de soins (DGOS) et composé essentiellement de syndicats de PH, planche sur les mesures du gouvernement. La dernière réunion en date − la troisième sur les sept prévues − avait lieu ce mercredi 15 mai.

Népotisme

Qualifié d'« acte administratif inutile » par Agnès Buzyn devant les parlementaires, le projet de loi prévoit la suppression pure et simple du concours de PH pour faciliter l'entrée dans la carrière hospitalière. Pas question de remettre en cause une procédure nationale équitable, répondent en chœur les cinq principaux syndicats de PH.

« Pour le bien des patients, nous avons demandé le maintien d'une évaluation par les pairs comme c'est le cas dans tous les métiers à haut risque et à haute technicité », explique le Pr Sadek Beloucif, président du Syndicat national des médecins, chirurgiens, spécialistes, biologistes et pharmaciens des hôpitaux publics (SNAM-HP), inquiet de la perte de compétence médicale que pourrait engendrer une telle décision. « Chaque année, 10 % des candidats au concours sont éliminés, abonde le Dr Renaud Péquignot, président d'Avenir hospitalier (AH), c'est bien qu'ils n'ont pas le niveau ou qu'ils sont incapables de travailler en équipe ! »

Beaucoup voient dans cette mesure de suppression du concours une menace pour l'indépendance d'exercice. « C'est la porte ouverte au népotisme ! », fulmine Patrick Léglise, pharmacien hospitalier et délégué général adjoint de l'Intersyndicat national des praticiens hospitaliers (INPH). « Sans le maintien d'une liste d'aptitude nationale, chaque directeur d'établissement pourra décider localement qui a le droit d'accéder ou non au statut de PH », analyse-t-il.

Malgré la garantie donnée par la DGOS, à l'issue de la première réunion de travail, de maintenir une nomination nationale des praticiens hospitaliers, l'INPH continue de battre en brèche ce « statut loco-national » qui reléguerait le Centre national de gestion (CNG) « au rôle de chambre d'enregistrement d'un recrutement purement local ».

Carrières plus fluides

L'autre mesure phare inscrite dans l'article 6 du projet de loi Buzyn vise à créer un statut unique de PH titulaire en regroupant les praticiens à temps plein et ceux à temps partiel. L'objectif ? Faciliter et valoriser l'exercice mixte en supprimant les bornes qui limitent pour l'instant la part d'activité libérale qu'un PH a le droit de pratiquer.

À l'avenir, chaque praticien pourrait fixer librement avec sa direction les quotités de son activité qu'il dédie à tel ou tel type d'exercice. Sur ce point, les syndicats affichent un relatif consensus favorable. « À condition de maintenir le concours et de ne pas faire de ce nouveau statut unique un fourre-tout », nuance le Dr Norbert Skurnik, président de la Coordination médicale hospitalière (CMH), qui craint l'arrivée incontrôlée de praticiens libéraux. « Praticien hospitalier, c'est une compétence supplémentaire qui s'apprend », juge-t-il.

Pour le Pr Beloucif (SNAM-HP), le statut unique de PH titulaire, s'il s'accompagne parallèlement d'une rénovation du statut de PH contractuel, comme cela est prévu dans la réforme, doit permettre un « équilibre entre sécurité et flexibilité ».   

Mais surtout, parmi les points non abordés en réunion figure l'attractivité – y compris financière – des carrières, sujet en jachère depuis le plan attractivité de Marisol Touraine (partiellement appliqué). L'INPH réclame une revalorisation de 30 % de la grille de rémunération des PH. Jacques Trévidic, président de la Confédération des praticiens des hôpitaux (CPH), préconise la suppression des cinq premiers échelons pour valoriser l'entrée dans la carrière. Pour autant, le pharmacien hospitalier ne se fait pas d'illusions : « La DGOS a expliqué qu'elle n'était pas favorable à des mesures générales et préférait des mesures ciblées sur certaines disciplines ou certains lieux d'exercice ».

Martin Dumas Primbault

Source : Le Quotidien du médecin: 9750