Les acteurs du DPC en proie au doute

Publié le 08/12/2010
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L’AVENIR du développement professionnel continu (DPC) passionne les foules à en croire l’affluence à la table ronde organisée par la Haute autorité de santé (HAS) lors de ses rencontres annuelles. Alors que les décrets d’application de la loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST) relatifs à la nouvelle obligation annuelle tardent à paraître au « Journal officiel », la HAS et les représentants des collèges nationaux des professionnels ont exprimé leur impatience et leur volonté de voir le dispositif validé dans sa configuration actuelle. Matignon, qui doit signer les décrets, a confié au « Quotidien » que leur publication n’était qu’une question de semaines (notre édition du 24 novembre). « Ce dispositif doit être simple et accessible pour être efficace, avertit le Dr Cédric Grouchka, membre du collège de la HAS. Même si des ajustements limités sont apportés aux textes et entraînent des retards, je ne souhaite pas de changement d’architecture. » Et pour cause. La Haute autorité a été un des grands artisans de cette réforme. Elle a posé les bases du DPC avec la Fédération des spécialités médicales (FSM) qui recouvre une trentaines de collèges professionnels. Leurs représentants sont aujourd’hui tout aussi désireux de mener à bien cette opération qui n’a que trop tardé. « Nous sommes tous fatigués de 15 ans d’attermoiements du système, saisissons cette chance », clame le Dr Philippe Orcel, président du collège national des rhumatologues. Le Pr Pierre-Louis Druais, qui préside le dernier né des collèges – celui de médecine générale – est tout aussi impatient : « Le DPC est une opportunité pour les professionnels, il est important de ne pas tout casser. »

L’argent, le nerf de la guerre.

Tout le monde n’attend pas la réforme du DPC avec le même enthousiasme. Des syndicats de médecins (CSMF, SML) portent un regard sévère sur l’évolution du système de formation continue et de la disparition à terme de la formation professionnelle qu’ils géraient paritairement avec l’assurance-maladie. Les médecins redoutent d’avoir moins de poids dans l’organisme gestionnaire du DPC (OGDPC), pilote du dispositif qui aura un regard sur le financement. « Nous sommes au milieu du gué, commente le Dr Jean-François Thébaut, président du collège des cardiologues. L’OGC n’existe plus, les CNFMC non plus, il faut une évolution juridique et administrative le plus vite possible. »

L’avenir du DPC n’est pas seulement lié à la parution des décrets. Le futur dispositif qui fusionnera la FMC et l’évaluation des pratiques professionnelles (EPP) devra également bénéficier d’un financement adéquat ! « C’est un enjeu majeur du dispositif, explique le Dr Thébaut. Aujourd’hui, 20 % des médecins utilisent les 90 % du budget disponibles de la formation conventionnelle. Or, 85 % de cette enveloppe est utilisée en médecine générale. Il faudra des fonds supplémentaires ou nous n’y arriverons pas. »« Des discussions sont ouvertes sur la façon dont le chèque DPC va fonctionner », indique Christine d’Autume, inspectrice générale des affaires sociales (IGAS). D’aucuns s’interrogent sur le montant de ce chèque DPC et les modalités de son utilisation. La responsable assure que « si modulation il y a, elle se fera plutôt en fonction des méthodes et pas en fonction de la spécialité des praticiens ».

De nombreux animateurs d’associations de formation continue s’inquiètent. Ils redoutent de n’avoir plus qu’un rôle accessoire dans la réforme qui se joue. « Restera-t-il de la place pour les soirées de formation financées par les labos ? Avons-nous encore une place dans ce système ? », interroge un ORL de Lorraine. « Nous voulons maintenir une place à des opérateurs de terrain, assure le Dr Philippe Orcel. Il pourra y avoir des orientations qui persistent à côté des orientations nationales. » Un médecin généraliste retraité s’inquiète pour l’agrément de son association locale et son financement. « La mise en place de la réforme va prendre du temps, répond le Pr Druais. Une association a toute latitude pour se faire agréer si elle respecte le cahier des charges national. Quant au financement, rien n’est bouclé. »

 CHRISTOPHE GATTUSO

Source : Le Quotidien du Médecin: 8872