« Encensés aux balcons, mais… », le coup de gueule d’un médecin testé Covid+

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Publié le 03/04/2020

Crédit photo : AFP

« D’un côté, on est applaudi tous les soirs aux balcons, de l’autre on n’a aucun soutien quand on est contaminé ». Le Dr Emmanuel Maheu est quelque peu désabusé. Depuis qu’il a été testé positif à Covid-19, mi-mars, le médecin, qui a pris l’initiative de contacter « le Quotidien », s’est senti abandonné par les pouvoirs publics et par les organismes professionnels.

« Il n’y a aucune communication sur ce qui se passe quand on est Covid +, simplement symptomatique, en arrêt, en quarantaine… Et pourtant on doit être nombreux dans ce cas ! », explique le rhumatologue de 62 ans qui exerce en cabinet et à l’hôpital Saint-Antoine, dans le 11e arrondissement de Paris.

Le Dr Maheu raconte comment il s’est heurté à l’indifférence de ses interlocuteurs et à la lourdeur administrative lorsqu’il a contacté l’Assurance-maladie pour déclarer son arrêt de travail et la CARMF pour faire valoir ses droits. Il regrette également le manque de solidarité des complémentaires : « Ils n’ont pas touché aux délais de carence. Résultat : aujourd’hui il vaut mieux avoir un accident de vélo, se casser le poignet plutôt que d’être Covid + », regrette le praticien qui exerce en secteur II. Dans le premier cas, le délai de carence est de 2 jours, explique-t-il. Dans le deuxième, il est de 14 jours…

Combien de médecins contaminés ? Quel impact sur le système de santé ?

Le Dr Maheu reproche également aux pouvoirs publics leur silence sur le nombre de médecins et de soignants contaminés (« Le Quotidien » a appelé les médecins à se signaler). « Pour deux raisons, explique le rhumatologue. La première, elle est symbolique : ça va bien d’encenser les soignants, mais encore faut-il constater qu’ils sont très touchés ! La deuxième, c’est que cela a un impact sur le fonctionnement du système de santé. Si 40 % des médecins sont malades, il faut quand même le savoir non ? »

Le Directeur général de la santé n’est visiblement pas de cet avis. Il y a quelques jours, le Pr Jérôme Salomon déclarait à nos confrères du « Généraliste » qu’il n’envisageait pas de tenir un décompte « un peu macabre » des soignants infectés. « C’est un peu comme si un général partait au combat sans compter ses troupes », lui répond le Dr Maheu.

Toujours symptomatique, près de deux semaines après avoir été testé, le médecin a limité son activité au téléphone et à la délivrance de quelques ordonnances pour certains de ses patients. « Je n’attends qu’une chose, c’est de retourner à l’hôpital pour aider, même si c’est pour être brancardier ou répondre au téléphone », confie le médecin.


Source : lequotidiendumedecin.fr