Les IADE dans la rue pour obtenir le statut d'auxiliaire médical en pratique avancée

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Publié le 16/09/2021

Crédit photo : S Toubon

Ce jeudi, à Paris, au métro Balard, trois femmes vêtues de blouses vertes se dirigent en direction de l’Hôpital Européen Georges-Pompidou (HEGP), point de départ de la manifestation. Comme de nombreux infirmiers anesthésistes diplômés d'État (IADE), elles réclament l’obtention d’un statut correspondant à leur niveau d’études (BAC + 5) et de compétences : auxiliaire médical exerçant en pratique avancée (AMPA). Salariées de l’AP-HM, elles ont toutes les trois quitté Marseille ce jeudi matin, pour « essayer de sauver leurs professions », alerte Patricia, 58 ans. Quelque 300 à 400 IADE ont ainsi battu le pavé dans la capitale. 

Années d'études

« Nous réclamons une reconnaissance de notre niveau d’études, de responsabilité et d’autonomie de notre profession », poursuit l’IADE, remontée contre Olivier Véran qui « désire instaurer le métier d'infirmier en pratique avancée (IPA) aux urgences qui va empiéter directement sur nos compétences et notre statut ».

Et ce n’est pas le Ségur de la santé, considéré comme une « fumisterie » qui a arrangé les choses, se désole Patricia. « Selon les nouvelles grilles, un infirmier anesthésiste débutant va gagner 13 euros de plus qu’un IDE (infirmier diplômé d'État ) et 185 euros en fin de carrière. Alors que nous avons fait deux ans d’études de plus qu’eux, avec les responsabilités qui vont avec. On est en train de brader notre profession. » Et de craindre que ce métier devienne de moins en mois attractif, ce qui pourrait entraîner « une pénurie d’IADE qui seront remplacées par des IPA, entraînant une baisse de la qualité des soins et de la prise en charge ».

Les médecins anesthésistes divisés

Qu’en pensent les médecins anesthésistes ? D'un côté, « de nombreux médecins anesthésistes réanimateurs qui travaillent au quotidien avec les IADE nous soutiennent. Certains ont envoyé des courriers de soutien au ministère », affirme la référente du collectif IADE Alsace, Lucie Munsch, à quelques pas de l’HEGP. Mais, admet-elle, « il y a aussi une partie des anesthésistes qui s’opposent à l’obtention de notre statut d’AMPA, car ils craignent que nous ayons plus d’autonomie, que nous exercions en autonomie totale, sans supervision, comme cela se fait dans certains États américains ».

Pourtant, cette autonomisation n’est pas ce que désirent les infirmiers anesthésistes, assure Lucie Munsch. « Nous ne revendiquons pas d’actes ou de responsabilités supplémentaires. L’ensemble des IADE sont conscients que le binôme (infirmier/médecin) est indispensable. On veut continuer ce travail en collaboration pour sécuriser les patients. On veut simplement que notre activité soit reconnue, c'est-à-dire figée dans la loi. Cela permettrait de sécuriser notre système de formation. »

« Ségur imposture »

À quelques mètres de là, on peut lire sur la blouse d’un IADE « Infirmier anesthésiste en colère ». Et, plus bas : « Ségur imposture ». À ses côtés, Emmanuel Barbe, vice-président du Syndicat national des infirmiers-anesthésiste (SNIA) entend rassurer les médecins qui craignent que la reconnaissance des IADE en pratique avancée ouvre la voie vers leur indépendance professionnelle, « si bien qu’il ne serait plus obligatoire de travailler avec eux ». Ce n’est pas ce que recherche la profession, plaide Emmanuel Barbe pour qui la reconnaissance du statut permettrait tout de même d’élargir l’offre de soins, en « ouvrant la voie à de nouvelles activités pour les IADE, notamment sur le périopératoire, les abords vasculaires ou la prise en charge de la douleur ».

Selon lui, à cause des problèmes de démographie médicale, les médecins n’ont « pas toujours le temps de gérer l’ensemble des activités de périopératoire dans les services de chirurgie ». Si les IADE avaient des compétences complémentaires, cela « libérerait du temps médical pour les praticiens qui pourraient faire davantage d’analyse clinique, plus de consultations, plus de gestions de cas médicaux sévères »


Source : lequotidiendumedecin.fr