Centre de santé hospitalo-universitaire

Le CHU de Marseille se projette dans les quartiers Nord

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Publié le 23/06/2023
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Prolongation de l'AP-HM dans un secteur défavorisé, le « centre de santé hospitalo-universitaire » des Aygalades – une première sous ce statut – propose une offre de soins pluridisciplinaire de premier recours. Et le CHU ne veut pas en rester là. 
Le Dr Michel Rotilly, généraliste et coordonnateur du centre

Le Dr Michel Rotilly, généraliste et coordonnateur du centre
Crédit photo : AP-HM – Christophe Asso

Lorsqu'en 2021, l’espace santé a déménagé à la cité des Aygalades, à côté de la pharmacie, dans les quartiers Nord de Marseille (15e), les médecins avaient déserté, partis les uns après les autres et non remplacés. Mais aujourd’hui, quatre généralistes (pour 2,6 équivalent temps plein – ETP – sous le statut de PH contractuel) reçoivent en consultation les habitants des 590 logements au sein de ces locaux de 280 m2, en pied d’immeuble, propriété du bailleur social 13 Habitat, tous les jours de la semaine avec ou sans rendez-vous. 

Tous sont salariés de l’Assistance publique – Hôpitaux de Marseille (AP-HM), porteuse du projet, comme l’ensemble de l’équipe pluridisciplinaire d’une douzaine de personnes. Parmi elles, une infirmière, une sage-femme, une psychologue, une diététicienne, une médiatrice en santé, deux agentes d’accueil, un infirmier coordonnateur, un interne de médecine générale… Les professionnels peuvent se déplacer dans les centres sociaux et associations pour faire de la promotion, de la prévention et de l'éducation en santé. 

Errance médicale 

Des spécialistes de l’hôpital Nord (15e) viennent aussi consulter ici, une pneumologue et une endocrinologue, une journée par mois ainsi qu’une neuropédiatre toutes les six semaines. Le Dr Michel Rotily, médecin généraliste et coordonnateur du centre des Aygalades, a rejoint le projet en 2017, un an après sa création à titre d’expérimentation. « L’objectif, c’était de mettre à disposition un centre pour les patients en errance médicale, qui n’avaient pas de médecin traitant mais des besoins médicaux importants », explique-t-il. 

Dans le 15e arrondissement, il y avait en 2020  quelque 70 médecins pour 100 000 habitants, sachant que leur nombre avait baissé de 26 % en cinq ans. La fracture territoriale est telle que, dans les quartiers Nord, la surmortalité liée à la grippe et au sida est pratiquement le double de celle constatée dans la région. Le taux de surmortalité infantile est de 60 % supérieur à la moyenne, comme pour l’asthme, et de 30 % pour les AVC chez les plus de 65 ans et le diabète. 

Mailler les quartiers populaires 

Avant de déménager en 2021, l’espace de santé était situé à Capitaine Gèze (15e), un quartier aux abords du marché aux puces, en pleine réhabilitation urbaine. En janvier 2022, sous la direction de François Crémieux à la tête de l’AP-HM, ce projet innovant, financé par l’agence régionale de Santé (ARS), a donc été transformé en « centre de santé hospitalo-universitaire » – une première – entrant ainsi dans le droit commun. « Le but était de pérenniser une offre qui avait démontré son efficacité », explique Johanne Menu, directrice adjointe de l’hôpital Nord, chargée du déploiement des centres de santé du CHU marseillais. Et la dynamique est lancée : à la rentrée de septembre, un deuxième centre de santé de l’AP-HM ouvrira ses portes aux patients à la cité des Flamants (14e) ; la réception des travaux est prévue avant l’été. « Pour l’instant, nous n'avons pas d’autres projets mais il est possible qu’on en ouvre un ou deux de plus en 2024 et 2025 pour bien mailler ces quartiers populaires », où vivent environ 400 000 habitants. 

Le patron de l'AP-HM justifie cette stratégie offensive du CHU. « Il y avait un vide à combler donc on a décidé de l’assumer, renchérit François Crémieux. Ça relève de notre mission de CHU à l’échelle d’un territoire de participer à la réduction des inégalités santé. Nous voulons aussi faire en sorte que l’offre de soins dans ces quartiers ne continue pas à diminuer et que ces centres de santé aident les autres professionnels à rester ou à s’installer. »

De notre correspondante, Natacha Gorwitz

Source : Le Quotidien du médecin