La mobilisation des internes a été rapide et massive, comment s’est-elle organisée ?
Marianne Cinot : Dès que nous avons compris que le système de santé allait devoir s’adapter, les internes et leurs associations représentatives ont organisé des recensements par spécialité et par rapport aux parcours de formation pour être prêts à optimiser les compétences de chacun. Dans beaucoup de territoires, cela s’est fait sur la base du bénévolat et du volontariat des représentants des internes, alors que c’est une des missions des ARS. Il a fallu aller solliciter nos encadrants ou les ARS pour leur demander comment se mobiliser sans trop entacher notre formation. La réaffectation des internes était abordée mais nous n’en avions pas les grandes lignes, et pour les faire bien, nous avons dû nous débrouiller.
Cette crise démontre-t-elle une nouvelle fois la place essentielle des internes dans le système de santé ?
M. C. : Nous sommes praticiens en formation, donc nous faisons partie du système de santé. Mais si les internes n’avaient pas été là et ne s’étaient pas mobilisés en termes de temps de travail et de réaffectation, je ne suis pas sûre que la crise aurait été aussi bien gérée. Cela fait des années que nous demandons une valorisation de notre statut, pas seulement financière mais globale. Les internes ont montré que malgré ce manque de reconnaissance et le ras-le-bol général qu’il y a eu en fin d’année, ils savaient se mobiliser.
Quelles répercussions a eu la crise sur la formation ?
M. C. : Les conséquences sont notables. Les choix de stages ont été reportés. Certaines subdivisions avaient prévu de les faire tôt donc ils ont pu les réaliser avant la crise. Mais les ARS étaient débordées et on nous a laissés seuls pour gérer les choix de stages. Nous avions pourtant alerté la Direction générale de l’offre de soins, les ministères. Cela ne peut pas reposer sur les seules épaules des internes. Concernant les cours théoriques, les facultés ont fermé et les cours en présentiel n’ont pas pu se tenir. Certains ont été réalisés en visioconférence par les départements de médecine générale. Nous demandons un report des cours mais pour l’instant, comme les universités ne vont pas rouvrir tout de suite, il est davantage question d’annulation. Nous resterons vigilants afin que la formation ne soit pas détériorée sur le long terme.
Avec le caractère inédit de la situation, l’appui psychologique pour les étudiants est-il central ?
M. C. : Nous avons lancé une plateforme avec les autres structures jeunes pour recenser toutes les cellules d’aide psychologique. Il y a d’une part des situations compliquées que l’interne va rencontrer en stage, car le Covid est une pathologie avec des manifestations cliniques parfois impressionnantes, et d’autre part la quantité et les conditions de travail pouvant se traduire par un épuisement. Il était donc important d’ouvrir toutes les portes aux internes sur ces différents dispositifs d’aide. Une enquête a aussi été lancée par le CNA (centre national d'appui) en partenariat avec les structures jeunes pour évaluer l’impact de la crise sur les internes.
Article précédent
Covid-19, les étudiants au cœur de la crise : « La solidarité entre soignants est incroyable »
Covid-19, les étudiants au cœur de la crise : « J’avais des doutes, maintenant c’est clair, je veux être médecin »
Covid-19, les étudiants au cœur de la crise : « Nous ne voulons pas du statut de héros »
Covid-19, les étudiants au cœur de la crise : « Nous avons fait notre boulot, comme les caissiers, les éboueurs… »
Covid-19, les étudiants au cœur de la crise : « La solidarité entre soignants est incroyable »
Marianne Cinot, présidente de l’Isnar-IMG : « Si les internes n’avaient pas été là, la crise n’aurait sûrement pas été aussi bien gérée »
« Pour la coupe du monde, un ami a proposé quatre fois le prix » : le petit business de la revente de gardes
Temps de travail des internes : le gouvernement rappelle à l’ordre les CHU
Les doyens veulent créer un « service médical à la Nation » pour les jeunes médecins, les juniors tiquent
Banderole sexiste à l'université de Tours : ouverture d'une enquête pénale